(divers) viens je t'amène au fond - 1/1

l'errance.
adieu terrible réalité, jusqu'à demain tu préfères oublier. oublier le ton dictatorial, les salles froides et les règles à foison. oublier les cours pour ne garder que le bon, le repas de midi, les blagues entre chaque cours, les couloirs bondés, et ne jamais s'ennuyer. tes pieds ils glissent tout seuls dans ces couloirs désertés, école à moitié abandonnée juste pour toi. souffle de repos avant de reprendre le rôle le moins drôle. le sac sur une épaule, ton bomber qui coupe le vent frais de cette fin de printemps. bientôt la liberté, bientôt la nouveauté. plus de réunions qui t’intéressent pas, plus de beaux discours sur l'importance des révisions, plus de lumières si joliment braquées sur ce délégué de classe si propre et si souriant, à peine insolent, juste assez intéressant. adieu le lycée. t'sais on aura beau dire, t'arriveras pas à me berner... douceur et irrégularité, y'a ce joli paradoxe de cet élève bien habillé, chaque tendance s'incrustant dans ta peau comme l'élève populaire que t'as toujours été... face à elle et ses cheveux jamais trop coiffés, ses boots en cuir abimé, ses jeans déchirés sans autre but que de provoquer, son anneau dans le nez, ses bras marqués d'encre qui font tant parler... alors cette heure de colle, c'était intéressant ? sourire d'ange qui n'a rien à se reprocher, yeux pétillants d'un gars trop bien intentionné, moqueur sans provoquer. dans la mesure, jusqu'au dernier degré. elle marche à côté, elle t'observe à peine sans même s'énerver, comme si elle aussi tout l'amusait. tu ne m'auras pas avec ton p'tit sourire et tes allures d'enfant parfait... ça marche peut-être sur le monde entier, mais je vois clair... je sais ce que tu fais. et j'ai beau passé pour la toxico tarée... crois moi on se vaut. elle sourit, elle s'éloigne pleine de promesses et d'angoisse. elle sait. que l'enfant n'est pas parfait, que la façade n'est qu'un mensonge, et que les propres substances qu'elle prend sont les mêmes que celles que tu vends. que ta copine n'est qu'un rideau bien tiré, que tes notes sont l'écran de fumé sur tes sorties nocturnes pour aller t'exploser. et la toxico c'est ton épine dans le pied, celle qui fouine un peu trop, qui te cherche beaucoup trop tôt, qui veut te faire tomber dans ses filets, dans ceux qui font crever les critiques, ceux qui font hurler les mères. la catin face au gentil petit saint, tu voudrais bien te dire que c'est vite résolu, que tu gagnes sur tous les terrains. mais elle revient sans cesse, pire qu'une MST dans une école publique infectée, elle est partout. elle est vautour. tu t'amuses à jouer avec ses nerfs, à jouer avec ses repères, tu la trimballes comme un pion en espérant la perdre en chemin. mais elle tient bon, alors tu te fatigue à l'éloigner. pour ton image de petit saint, pour garder la façade des rires qui n'ont plus rien du vrai gamin. tu n'es plus. tu t'es perdu. Teddie la façade abandonnée, Teddie le garçon parfait qui s'est oublié. entre les grammes de coke et les barres de shit, t'as oublié comme tu pouvais vraiment exister. comme simplement rire au début c'était naturel et pas surfait. mais tout le monde est dupe, tout le monde y croit, à l'enfant roi, à l'enfant sain; au naïf petit Teddie qui ne fait rien de mal, qui provoque parfois mais qui a le fond bon. foutaises et stupidités, chacun ne voit que la coque vide d'un Teddie marionnettiste.