first time // leslo

@lewis roxmouth
journée spéciale, oslo. gamin au boulot, l'sourire aux lèvres, la tête dans les étoiles. journée qui s'éternise, journée trop longue. parc'que ce soir, tu sais que tu vas revoir lewis. t'as tout prévu, t'as même prévenu le squad que tu voulais personne pour foutre en l'air cette première soirée, celle que t'espères être la première d'une longue série. tes meilleurs amis qui ont chacun prévu un truc, pour pas être là.

ce soir, il sera là. et oslo, durant ta dernière demie-heure de shooting, derrière ton appareil photo, tu l'imagines. t'imagines ses sourires, ses prunelles noisettes qui croisent ton regard sombre. vos regards qui se croisent. lewis qu'tu veux voir, qu'tu peux pas te lasser de voir. c'est assez étrange, parc'que dans le fond, tu l'as pas vu beaucoup, le garçon. tu l'as pas vu des masses, mais ça sonne comme une évidence, quelque part. ce lien invisible qui s'est créé, au fur et à mesure. par vos sourires, par vos échanges si courts mais quelque part si intenses. chacun de ces jours qui t'ont marqué, où t'as impatiemment attendu le réveil, l'heure de quitter la maison pour être sûr de le croiser, à la bonne heure. jamais une minute de retard, jamais une minute trop en avance. toujours le timing parfait.

ce shooting qui dure trop, qui te parait une éternité. pour une fois c'est presque comme si ton travail que t'adores néanmoins te gonflait littéralement. alors quelques cinq-cent photos plus tard, t'as rangé précieusement ton appareil photo dans son étui, t'as salué tes collègues du jour, et t'as quitté le studio, ton sac en bandoulière rapidement balancé par dessus ton épaule.

il est dix-neuf heures, reeves, lorsque t'es installé derrière ton volant pour traverser crescent heights, pour rentrer chez toi. le trajet qui paraît tellement long, lui aussi. tout qui paraît trop long. ta conscience qui t'crie que c'est peut-être pas très rationnel d'être si attaché à un être, en si peu de temps. qu'c'est pas normal de fonder tant d'espoir, d'un coup. mais lewis, il s'est ancré dans ta tête comme on entre dans une vie. et t'arrives pas à t'en défaire. t'as envie d'le voir, lewis. trop, tout le temps, souvent. oslo, tu claques la porte de ta voiture et la porte d'entrée subit le même sort bien rapidement. tout s'enchaine. tout semble finalement s'accélérer d'un coup et tu t'sentirais presque devenir nerveux.

une douche plus tard, t'as fait simple, t'es pas bien doué toi, pour t'mettre en valeur ou quoiqu'c'soit. t'es simple, oslo, peut-être trop. quelques sachets de chips disposés dans des plats que tu déposes dans l'salon, gamin trop pressé. gamin hâtif.

il est à peine dix-neuf heures quarante, précise, et tu n'tiens plus en place. si bien qu'tu t'décides à gratter les cordes de ta guitare, là, assis sur le canapé financé par tes colocs et toi, un bâton de nicotine coincé entre tes lèvres. des fausses notes signe d'une nervosité certaine, et l'hésitation, soudaine. est-c'qu'il va venir ?
et s'il avait pas envie ?
et s'il t'supportait pas, finalement ?

et la sonnerie qui retentit, enfin, quand tu t'lèves dans la foulée pour aller ouvrir, délaissant ta cigarette et ta guitare. salut ! qu'tu lances, un sourire qui creuse tes fossettes. salut. ta conscience qui s'fout de ta gueule. c'était minable. salut. et tu t'décales de l'entrée, gamin, quand tu réalises que t'es resté planté devant comme un sombre abruti. oslo, toute assurance a disparu. entre, entre. tu vas bien ? tes yeux qui n'le quittent pas, tes prunelles qui s'ancrent sans plus attendre dans les siens, ton palpitant qui s'perd, un peu trop.