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 That's me in the corner trying to reach you (ft. Veredis)

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MessageSujet: That's me in the corner trying to reach you (ft. Veredis)   That's me in the corner trying to reach you (ft. Veredis) EmptyMar 17 Juil - 3:37


that's me in the corner trying to reach you
(ft. Veredis Fjalarsdottir)
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Je suis allé chercher le petit oiseau au pied des rails. Je ne savais pas vraiment à quoi je m’attendais en arrivant à la gare avec ma pancarte « Mademoiselle Veredis Fjalarsdottir ». Comment avais-je imaginé cette adolescente suicidaire ? Je la voyais blonde, peut-être, les yeux baissés, l’air austère et perdue. J’imaginais peut-être ses avant-bras cisaillés de cicatrices, et son minois orné des sillons creusés par les larmes. Je ne m’attendais donc certainement pas à cette jolie fille, d’apparence simple, les cheveux lâchés, un maquillage léger sur ses grands yeux bleus. Un regard si pénétrant que l’on pourrait s’y noyer si l’on ne prend pas garde. Une croix à sa gorge, seul signe de sa foi – un signe auquel j’ai moi-même sacrifié dans mes folles années et qui était, alors, un précieux réconfort –, pour le reste elle m’a parue… normale. J’ai rangé mes a priori sur son compte : je ne sais que deux choses sur elle : son nom est Veredis et elle a dix-huit ans. Pour tout le reste, j’ai décidé de lui faire confiance pour me confier, petit à petit ce qui lui pèse sur la conscience.

Elle s’est approchée de moi, j’ai pu la jauger plus finement du regard. Sa valise m’a semblé neuve, lourde et petite à la fois. Elle est partie pour plusieurs mois, je me suis étonné ainsi qu’elle ait emmené si peu d’affaires. Il me paraissait que les jeunes d’aujourd’hui avaient toujours énormément de choses avec eux et sur eux. A part un téléphone portable à la main et un bagage compact où dansent encore les autocollant des aéroports et les étiquettes des bagagistes, elle n’avait rien en sa possession. Je ne suis pas parvenu à savoir si elle était heureuse ou désemparée d’être ici. Je l’ai accueillie toutefois chaleureusement dans notre langue natale à tous deux. Ma voix a vibré quelques instants dans l’air, un souffle profond

« Bienvenue à Crescent Hights, Veredis. Avez-vous fait bon voyage ? »

Le vouvoiement est une habitude, mais également une précaution. Je n’ai pas voulu l’effrayer. Elle a été envoyée vivre chez un homme qu’elle ne connaît pas, et je ne la connais pas davantage. Coup de téléphone maternel, suppliques, explications de la tentative de suicide de la jeune fille « pourtant bien sous tous rapports », et me voici à jouer les garde-malades pour les mois à venir. Qu’a-t-on voulu lui faire fuir en l’éloignant de notre Islande natale ? Un petit ami toxicomane ? La famille ? Une vie insulaire qui ne lui convient guère ? Quelle responsabilité a-t-on voulu me faire prendre en la confiant ? Comment diable pourrais-je réussir quoi que ce soit avec cet enfant ? Aime-t-elle le théâtre ? La littérature ? Je ne sais rien d’elle, sinon ce que ma mère m’en a raconté : une jeune suicidaire Adventiste qui a réussi de peu son diplôme de fin d’étude. Autrement dit, peau de chagrin, connaissance superficielle.

« Voulez-vous un peu d’aide avec vos bagages ? Il faudra marcher un peu, je vis non loin d’ici, cependant. Nous y serons rapidement. »

C’est sur ces mots que l’étrange cohabitation d’un vieil artiste sur le déclin et une jeune fille sortie de Dieu seul savait où a commencé.

Nous avons cheminé en silence, je ne savais pas quoi lui dire, et la réciproque était peut-être vraie. Je ne suis pas parvenu à savoir si c’était de la défiance, de la peur, de l’agacement qui agitait l’adolescente à côté de moi. Et puis nous sommes parvenus à mon appartement : un logement confortable sans être démesurément luxueux. J’aime les choses simples. Je me suis affairé près de la serrure avant d’ouvrir la porte et de l’inviter à entrer. J’ai refermé l’huis, et nous sommes seuls. En la voyant évoluer dans le salon, je me demande encore si j’ai bien fait d’accepter.

« Un peu de thé ? Que diriez-vous que nous fassions un peu connaissance avant que je vous montre votre chambre ? »
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MessageSujet: Re: That's me in the corner trying to reach you (ft. Veredis)   That's me in the corner trying to reach you (ft. Veredis) EmptyMar 17 Juil - 7:00


that's me in the corner trying to reach you | & Arelius
(Said the sky - disciple)
† chapitre 19, verset 23Tu as quitté à l’aurore ton Islande natale. Le seul pays que tu aies vu, ton île. Tu te rends sur le continent. Un continent lointain, une terre étrangère. Nouvelle langue, nouvelles coutumes, tout est neuf, et surtout la vie que tu vas y mener. Te voici parachutée chez un inconnu, envoyée à l’autre bout du monde comme un colis devenu trop encombrant. Tu sais très exactement pourquoi : il est tabou de vouloir s’ôter la vie. Péché que celui de vouloir décider de l’heure de ta mort. Péché que de vouloir arracher aux mains de Dieu ton destin.

Dans l’avion, tu serres sur toi un manteau bleu, comme pour te réchauffer. Tu redoutes déjà l’instant où il te faudra ôter remettre ton masque pour affronter l’homme à qui l’on confie ton sort. Il est « très bien », paraît-il. Tu as googlé son nom, tu as trouvé un acteur de talent dont la carrière bat de l’aile. Qu’est-ce qu’un gars comme lui pourrait gagner à accueillir une fille comme toi ? Tu te demandes s’il a des liens avec l’Église. Tu sais que sa mère y vient fréquemment, tu avais l’habitude de la voir chaque dimanche, au deuxième rang, pleurer la perte en mer de son premier époux. Elle porte encore le deuil après quarante années passées. Tu sais que son fils, cet Arelius Bjornson chez qui tu vas, est né le jour où périt son mari. Tu n’as jamais pu t’empêcher de prier un peu plus sérieusement qu’à l’accoutumée quand c’était pour elle. Émue par son histoire, peut-être ?

Tu es haut ; tu surplombes les flots d’argent. Tes mains se décrispent un peu du revers de ta veste. Tu n’as jamais très rassurée quand il s’agit de quitter le sol. Plonger te fait peur, voler aussi. L’angoisse sourde et diffuse monte en toi, étau de fer qui te broie jusqu’à l’épuisement. Comment sera-t-il ? Tu sais à quoi il ressemble : tu as vu sa photo, des extraits vidéo de ses performances. Mais comment sera-t-il humainement ? Tu as lu des interviews de lui et tu n’arrives pas à te faire une idée sur ce qu’il est. Tu le sais divorcé deux fois, sans enfant, et tu as vu quelques photos volées de lui avec des femmes ou des hommes dans des restaurants. Est-il un vieil homme débauché ? Tu n’en sais rien, mais cela t’étonnerait fortement que tes parents prennent le risque de t’envoyer vers le Démon. Tu penches plus sûrement pour un artiste à la vie sociale épanouie.

Ton avion se pose, tu récupères ta valise. Tu aurais bien aimé dormir un peu pendant le vol, mais tu es beaucoup trop angoissée pour cela. Le sevrage t’a rendu tes sentiments et ton sourd mal-être. Tu n’es plus une statue de glace aux émotions anesthésiées, et tu tuerais pour le redevenir. Autour de toi, tout va vite, trop vite. Tu te demandes encore pourquoi tes parents t’ont laissée prendre l’avion sans chaperon. Tu pourrais décider de t’enfuir, de disparaître… oui mais pour aller où ? Ton regard accroche ton reflet dans une vitre : tu as une tête de déterrée, il te faudra reprendre contenance, plaquer un masque d’indifférence sur tes traits. Au moins ces histoires de mariage avec le fils des voisins sont-elles ajournées.

Tu t’engouffres dans les escalators, suis les indications en anglais. Tu as un peu de mal à comprendre cette langue que tu lis pourtant couramment. Le manque d’entraînement, sans doute. Tu cherches, cherches, cherches encore le panneau qui pourra t’éclairer sur la façon de rejoindre la gare. Ton train ne t’attendra pas, heureusement, tu as quelques instants pour l’attraper. Le coeur paniqué, tu songes une fois encore que tu pourrais profiter de cette foule pour disparaître totalement, partir à l’aventure, ou tout simplement achever ce que tu avais commencé. Tu pourrais, ici, t’ôter la vie sans que personne ne puisse t’arrêter, tout simplement parce que personne ne s’attendrait à un tel geste de la part d’une voyageuse lambda que tu es. Personne ne te regarde, personne ne te surveille, il suffirait d’un seul geste… d’un seul geste. Tu sens une bouffée de larmes monter dans ta poitrine et gagner ta gorge et l’encoignure de tes prunelles. C’est le moment de ravaler tes sentiments, de redevenir de glace… Tu combats les vagues de douleur, les vagues de frayeur, les vagues de désespoir. Une indication, enfin. La gare est toute proche. Jeter les yeux sur les lettres noires se découpant sur fond te procure un certain apaisement : il y a quelque chose à atteindre, à découvrir. Peut-être cela vaut-il la peine de rester en vie pour au moins savoir comment est ce gars qui t’attendra à l’autre bout du tunnel ?

Le roulis du train sur les rails te berce. Tu as hissé à grand’peine ta valise sur un porte-bagage, et t’es affalée à ta place. A mesure que le paysage défile, l’angoisse te gagne. Tu ne sais vraiment pas si tu as bien fait d’accepter sans condition la demande parentale : peut-être aurais-tu dû tempêter plutôt qu’afficher une sombre indifférence à ton sort. L’homme viendra te chercher à la gare, tu le redoutes déjà. Va-t-il tenter de te faire rentrer dans le droit chemin, te sermonner ? Soupir de lassitude par avance qui s’échappe de tes lèvres. Lorsque le wagon s’immobilise au terminus Crescent Heights, tu sais que tu as atteint ta destination. Peu désireuse de te précipiter au dehors, tu envoies d’abord un sms au numéro que l’on t’a indiqué. « Je viens d’arriver à la gare, je vous rejoins ». Pas un bonjour, pas un merci, pas une signature. Tu n’en as pas la force ni l’envie. Tu veux juste que tout cela cesse, tu veux pouvoir enfin clore tes yeux une dernière fois.

Tes mains attrapent ta valise, tu la décharges, te voici parée. Tu n’as emmené que le minimum vital : quelques vêtements, une Bible pour faire bonne mesure, ton ordinateur, de quoi écrire. C’est tout. Tu ne sais même pas de quoi sera fait ton futur ici. Vas-tu reprendre les études ? Tu n’es bonne à rien. Vas-tu épouser un homme ? Tu n’en veux pas. Vas-tu vivre recluse dans un appartement ? C’est une nouvelle prison.

Tu jettes un regard indifférent sur ce qui t’entoure : cela ne t’intéresse pas. Une feuille blanche et l’homme qui la tient attire ton attention : tu l’as reconnu lui avant de voir ton nom inscrit sur le papier. D’un pas décidé, tu t’avances, traînant ta valise à côté de toi. Il te salue poliment, en islandais. Entendre cette voix profonde et douce te parler dans ta langue fait naître un drôle de sentiment en toi. Tu opines. « Bonjour. Le voyage était tranquille. »

Tu ne dis mot de la Mort qui t’a appelée sur la route, bien sur, ni de ta tentation de fuir si loin de lui et de ce patelin pourri. Tu devines qu’il te jauge, tu fais de même. Tu laisses ton regard dessiner la courbe austère de sa joue, s’égarer sur la fine fente de ses lèvres, remonter vers les billes de ses yeux cristallins. Tu a l’impression que tu pourrais te voir dans un miroir en t’abîmant dans ses iris tant ils sont clairs et pénétrants. Le sentiment de familiarité disparaît un peu : te voici mal à l’aise.

Il te propose de prendre tes bagages, tu déclines d’un poli « ça ira ». Tu es assez grande pour les porter toi-même, après tout.

Tu le suis dans des rues étrangères. Plusieurs fois, tu sens la tentation de lâcher ta valise pour fuir te réfugier quelque part. Mais où ? Cet homme que tu ne sais pas comment appeler est sans doute ce que tu as de plus proche d’un abri, ici. Tu es nerveuse, tu ne parviens que difficilement à te contraindre au calme. Peut-être qu’en te récitant des psaumes ? Non… cela t’agacerait plus que cela ne te calmerait… Alors pourquoi diable as-tu commencé à former dans un chuchotis les premiers mots de l’un d’entre eux ?

Arelius Bjornson te fais quitter le dédale des rues pour un dédale de couloirs jusqu’à une porte qu’il s’échine à ouvrir. Tu peux laisser ton regard dévier sur cet homme de grande stature, impressionnant. Les fils de ses cheveux dansent sur sa nuque, coupés de près, net. Tu es comme hypnotisée, un peu, par l’aspect harmonieux de ton hôte. Il t’effraie parce que tu n’arrives pas à le cerner, parce que tu as tant lu sur lui au cours des dernières heures, parce que tu l’as vu sur scène sur Youtube. Encore une fois, tu te demandes quel intérêt il pourrait prendre à t’accueillir là.

Il te vouvoie toujours, te propose de faire connaissance. Un mouvement de recul t’échappe tandis que l’expression de la panique se peint sur ton visage. Tu redoutes un contact intime, une tentative de séduction, d’attouchement. Ton esprit le refuse autant qu’il le désire. Ton corps frissonne à l’idée d’une si grande transgression. « Je… euh… Si vous voulez. »

C’est la première fois que tu t’adresses directement à lui. Tu ne sais pas trop quoi dire d’autre. Tu le laisses préparer du thé, t’inviter à t’asseoir, abandonnant ta valise dans un coin de la pièce.

« Vous êtes acteur, c’est ça? »Tu poses la question en connaissant déjà la réponse et en te moquant éperdument de ce qu’il pourrait avoir à dire.


Dernière édition par Veredis Fjalarsdottir le Mer 18 Juil - 11:47, édité 2 fois
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MessageSujet: Re: That's me in the corner trying to reach you (ft. Veredis)   That's me in the corner trying to reach you (ft. Veredis) EmptyMar 17 Juil - 13:09


that's me in the corner trying to reach you
(ft. Veredis Fjalarsdottir)
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Passé la première frayeur, je peux enfin apaiser les tourments de mon âme. Le premier contact était, à mes yeux, le plus dur ;  celui qui me faisait sortir de ma zone de confort pour me jeter dans la gueule béante de l’ennemie. L’instant où tout vacille : passer de l’ombre la plus noire à la plus vive lumière des projecteurs. Cette première impression que l’on donne est comme une offrande, un masque mêlé de faux et de vrai que l’on jette en pâture avant que ne puissent se distinguer, sous les traits figés de la porcelaine, une carnation maquillée, puis les traits véritables, nus, et sans artifices. Effeuiller une personne prend du temps. J’espère prendre ces instants pour Veredis, comme j’aimerais qu’elle les prenne pour moi. Je l’observe une courte seconde à la dérobée tandis que je m’affaire en cuisine. J’ai vu ses yeux s’agrandir d’horreur lorsque je lui ai proposé de « faire connaissance ». A quoi donc a-t-elle bien pu penser ? Je n’avais aucune arrière pensée, la spontanéité seule m’a guidé. Mais peut-être la formulation était-elle maladroite ? J’ai eu tôt fait de vouloir la rassurer. Je lui ai souri doucement pour apaiser sa mine paniquée, et lui ai glissé quelques mots.

« Vous ne risquez rien de moi, Veredis, ne vous inquiétez pas. Je ne vous propose rien de plus qu’une discussion autour d’un thé. »

Tout en œuvrant en cuisine après l’avoir invitée à s’installer confortablement sur le canapé du salon où j’ai si souvent appris et récités de longue tirades, je songe promptement au silence qui s’est glissé entre nous. Je me sens, ici, en terrain conquis. Je suis chez moi, dans ma demeure, les mains sur une théière familière, l’air chargé des senteurs de mon earl grey favori. Je suis dans mon fief, ce qui n’est pas le cas de la douce islandaise assise non loin. C’est à moi de la guider sur les chemins de mon territoire pour qu’elle mette un peu d’elle-même dans les murs qui abriteront son corps et son âme pour les mois à venir. Car si l’on m’a donné une date d’arrivée pour elle, on ne m’a jamais signifié le jour de son départ. Je l’ai accepté Dieu seul sait pourquoi. Et si Dieu le sait, Dieu le cèlera sans doute jusqu’à ce que je me décille par moi-même.

Je sors de derrière le comptoir, un plateau sur le bras : une vieille théière de porcelaine anglaise et deux tasses côtoient quelques quartiers de citron, le fumet du thé noir, et des biscuits à l’orange. Je pose avec douceur ma charge sur la table basse non loin de la jeune femme et m’installe à ses côtés, à distance respectueuse, néanmoins, pour ne pas risquer de la brusquer. J’ai voulu cet endroit à mon image : tout de boiserie et de teintes claires vêtues. L’ombre des lambris répond à la clarté de la crème soyeuse des murs. Les meubles sont en bois naturel sombre, et s’y battent en duel des livres, des minéraux, des planches botaniques encadrées et une cloche remplie de papillons plus vrais que nature qu’une artiste japonaise a formés et peints pour moi. Leurs ailes bleues, blanches, vertes étincellent de mille nuances qu’aucune main, sinon celles de cet artiste et de Dieu n’auraient pu réaliser. La précision est un don précieux, l’admiration que suscite l’observation de cette merveille l’est tout autant. Je sers le thé dans un première tasse que je tends à Veredis, puis me sers moi-même. L’ambre vacille sur l’éclat blanc et lisse.

« Je suis comédien, en effet, j’enseigne aussi le théâtre ici, à Crescent Heights. Si vous aimez le théâtre ou l’opéra, d’ailleurs, je serai ravi de vous y emmener. Et vous, Veredis ? Qui êtes-vous ? Je vous avouerai que l’on m’a peu parlé de vous, et que je ne sais rien, sinon que vous cherchiez un hébergement ici. »

Je la fixe du regard avec douceur. Je suis prêt à accueillir tout ce qu’elle me livrera, tout ce dont elle aura besoin de me parler, tout ce qu’elle pourra me confier par ses gestes ou ses mots. A cet instant, tout mon être frissonne d’une caresse d’attention pour l’adolescente perdue.
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MessageSujet: Re: That's me in the corner trying to reach you (ft. Veredis)   That's me in the corner trying to reach you (ft. Veredis) EmptyMar 17 Juil - 15:09


that's me in the corner trying to reach you | & Arelius
(Said the sky - disciple)
† chapitre 19, verset 23Tu regardes autour de toi, incertaine de la marche à suivre. Ton hôte a bien tenté de te rassurer, mais ce faisant, il a éveillé en toi des sentiments contraires. Une partie de ton être voudrait croire ces paroles douces comme le miel et se laisser bercer par la délicatesse de sa voix. Une autre part se méfie comme la peste. Peut-être est-ce un nouveau tour de tes parents et du pasteur pour te mener là où ils le désirent. Et il te vouvoie toujours… Cela te met mal à l’aise plus que tu ne pourrait le dire : personne ne se vouvoie dans ta paroisse, de même que tes professeurs ont toujours employé le « tu » familier réservé aux inférieurs hiérarchiques. Arelius Bjornson est littéralement la première personne à te témoigner cette marque de respect et de distance mêlées. Tu ne sais pas vraiment qu’en penser : cela te rappelle que tu es à des mille et des mille de chez toi, et t’envoûte dans le même temps comme si ce « vous » portait en lui le charme d’une antique malédiction. Tu as opiné en silence à son invitation, as laissé un moment de silence et a finalement accepté ce qu’il te proposait : « D’accord pour le thé. Et la discussion. »… Tu supposes que tu as bien fait, même si tu doutes plus que tu ne saurais le dire avec des mots.

Tu t’asseois sur le canapé qu’il t’a indiqué, attends quelques instants. Tu as le dos droit, parcouru d’un frisson inexplicable. Tu n’as pourtant pas froid : l’épaisse toile de ta veste bleu nuit protège ton échine d’une couche protectrice. Tu ne l’as pas ôté, ne te sentant pas assez à ton aise pour te dévêtir ainsi. Un vêtement de plus, une armure de plus. Tu jettes autour de toi le cristal bleu de ton œil : des papillons attirent ton attention. Tu les devines mal, à contre-jour, mais ils te semblent si réels que tu en frissonnes presque. Figés les ailes ouvertes, tu ne doutes pas un seul instant que cette cloche abrite un massacre en règle d’éphémères créatures de Dieu. Tu vois aussi une croix, des livres, du bois, des teintes claires. Il y a, ici, tout ce que tu pourrais souhaiter pour te sentir bien… et pourtant, tu n’es toujours pas chez toi, crispée d’en savoir plus. Vierge effarouchée, animal sauvage, on pourrait te définir ainsi.

Le temps que tu furètes autour de toi, il est à nouveau près de toi, assis, cette fois-ci. Tu peux le détailler plus avant pendant qu’il s’occupe du thé. La précision de ses gestes et la douceur de son visage te laissent pantoise. Pour le moment, tu n’as vu de lui qu’un aspect bienveillant, mais qu’en est-il réellement ? Que cache cette façade collée derrière les traits rudes de son visage et ses pommettes taillées à la serpe ? Que dissimulent la douce sérénité de son regard et l’écho de sa voix ? Tu tuerais pour le savoir sans même en avoir conscience. Il t’intrigue et te rebute dans le même temps. Pelure d’oignon, tu es une gousse encore bien engoncée dans ses couches de protection, prête à passer l’hiver de ton coeur en solitaire.

Il te tend une tasse. Tu l’attrapes en tremblant un peu. Ta main peu assurée fait cliqueter la porcelaine sur la soucoupe et dessine des cercles concentriques à la surface de l’ambre du thé. L’odeur est étrange. Tu n’as jamais bu de thé, encore, mais tu n’as pas osé le lui dire. Sa voix étiole une fois encore le silence en se faisant attendre. Une longue inspiration puis des mots. Des questions plus que des réponses. Un long frisson encore te redessine la colonne vertébrale. Il te pose des questions sur toi et ne semble rien savoir. Une chance de renaître… est-ce cela que tes parents ont voulu te donner en t’envoyant ici ? Ils t’ont confié à lui sans rien mentionner de tes frasques ? Vraiment ? Tu te sens soudainement soupçonneuse. A la bouffée d’euphorie succède la suspicion. Tu as appris à être prudente, un peu.

« Je m’appelle Veredis Fjalarsdottir, j’ai eu dix-huit ans il y a peu, et… euh... » Tu bafouilles puis tu te résous à lui lancer un défi. Tu relèves la tête pour le toiser. « Je voudrais mourir. »


Dernière édition par Veredis Fjalarsdottir le Mer 18 Juil - 11:49, édité 1 fois
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MessageSujet: Re: That's me in the corner trying to reach you (ft. Veredis)   That's me in the corner trying to reach you (ft. Veredis) EmptyMer 18 Juil - 2:32


that's me in the corner trying to reach you
(ft. Veredis Fjalarsdottir)
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La vapeur qu’exhale le thé de ma tasse se mêle au silence en une chape pesante. Les mots que vient de proférer la jeune Veredis Fjalarsdottir résonnent encore, écho ténu sur le fil de la porcelaine. Je pose avec précaution ma tasse sur la table basse et emmêle mes doigts en joignant les mains sur les hauteurs d’un genou. Il me semble que quelque chose a changé. L’enfant apeurée et fragile que j’ai vue jusqu’à présent laisse place à quelque chose d’autre. Une infime vibration dans l’air troublée seulement par le bruissement d’une de ses mèches de cheveux sur l’étau de sa veste qu’elle n’a toujours pas daigner ôter. Mon mutisme est plus surpris qu’atterré. Je ne m’attendais pas à une si brusque déclaration et songe à toute allure. On a déjà dû lui faire pléthore de sermons sur la mort, le sacre de la vie, l’interdit tabou d’attenter à ses jours. Elle vient d’un milieu si rigide, si étriqué à de nombreux égards.

Mes chemins de foi ont pris un sentier bien différent de ceux de ma mère. Si elle s’est engouffrée, corps et âme, dans la croyance, ce ne fut pas mon cas. Je suis resté loin des institutions, loin des affaires des hommes et loin, surtout, de leur discours. Il n’y a guère qu’une croix dans mon logis, simple, nue, en bois vernis, pour rappeler parfois les premiers temps chrétiens. Je sais que cette enfant a entendu tous ces discours et bien plus. Sans doute lui a-t-on récité, gravé dans la mémoire et dans la peau les versets bibliques correspondants. Je gage qu’elle pourrait, si elle le voulait, me les réciter de mémoire.

Ma main s’avance vers la sienne, prend sa tasse, la pose sur la table avec douceur, et se loge dans ses paumes. Je sens la chaleur de ses petites mains sous la mienne, le frisson de ses doigts sous la caresse de mon pouce. J’aimerais la réconforter par ce seul geste, mais je devine qu’il ne sera pas suffisant. Derrière nous, je jurerais voir s’ébattre les papillons de bois figés dans leurs somptueux coloris.

« Veredis… Pourquoi ? Pourquoi voudriez-vous mourir ? »

Je voudrais l’attirer à moi, l’enlacer pour la protéger, mais je pressens qu’elle n’acceptera pas ce contact physique. J’ai glissé ma deuxième main auprès de la première. Sécurité, douceur. C’est là ce que je voudrais qu’elle retienne de son séjour ici. Je ne peux oublier l’éclat de défi passé dans son œil lorsqu’elle m’a déclaré préférer le grand sommeil. Nul ombrage, nul courroux. Je ne devine que trop qu’elle sort là les dernières protections de son âme meurtrie pour apaiser ses blessures à vif.
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MessageSujet: Re: That's me in the corner trying to reach you (ft. Veredis)   That's me in the corner trying to reach you (ft. Veredis) EmptyMer 18 Juil - 12:21


that's me in the corner trying to reach you | & Arelius
(Said the sky - disciple)
† chapitre 19, verset 23Tu entends un étrange bourdonnement dans tes oreille. Un chuintement à la frontière de l’audible qui fait frissonner ton tympan d’une note aiguë. Tu sens un mélange de chaleur et de glace parcourir tes veines, te monter aux joues et figer ton œil dans une expression froide et altière. Tu dardes, tu jauges sans ciller. Le comédien, l’acteur, peu importe qui il est, a intérêt à te servir autre chose qu’un grand jeu de scène. Tu détailles avec une attention trop grande pour être honnête le moindre de ses mouvements : tu le vois poser sa tasse sans un bruit, t’ôter la tienne des mains. Tu es comme médusée, captivée par les gestes plein de grâce de l’homme. Un long frisson te parcoure tout le corps, remonte le long de ton échine pour se perdre dans un sursaut sur ta nuque. Tu as vacillé : ton masque si parfait s’est effrité. Tu voudrais retirer tes mains de sa paume, mais elles restent lovées contre la flamme dévorante de ses doigts. Tu voudrais lui demander de te lâcher, mais tu restes captive de la pénétrance de son regard. Tu t’affoles, tu paniques. Le cri est bloqué dans ta gorge.

Des sentiments étranges montent en toi, vague, vague, roulis d’émotions trop longtemps refoulés à coup de médicament. Pleure, pleure, les larmes menacent de t’emplir les yeux de cristaux, et tu te prends à rêver de te blottir contre ce corps inconnu. Lorsque Arelius prend enfin la parole, tu redoutes un sermon. Tu sais que tu n’es pas de taille à affronter un argumentaire en trois actes t’expliquer pourquoi la vie est sacrée : ta mère, ton père, ton fiancé et le prêtre te l’ont déjà servi sous l’oeil médusé d’une infirmière. Chant chorale de voix que tu as laissé glisser sur l’indifférence de ton désespoir.

Loin de condamner ton geste, il t’en demande la raison avec une empathie désarmante. Vague, vague, roulis d’émotion, tu as envie de pleurer plus encore. Tu sens une perle glisser sur ton cil, te piquer l’oeil, tomber sur ta joue alors qu’il joint son autre main à la communion silencieuse dont il te fait la grâce. Tu sens qu’il pourrait t’ouvrir ses bras si tu le lui demandais. Tu tuerais pour avoir le courage de reconnaître ton désarroi et l’implorer de te tenir contre lui. Ta fierté, ton honneur, ton orgueil t’en empêchent, de même que le choc de son comportement à mille lieues de ce que tu redoutais te retient d’ôter tes mains dans un élan de mauvaise foi. Tu as l’impression que ta peau pétille à l’endroit où il la tient tandis que s’éveille un monstre affamé de contact physique et de tendresse dans tes entrailles. Tu t’es toujours privée de la chaleur d’une peau sur la tienne, d’un bras sur le tien, de lèvres sur les tiennes. Tu n’as jamais voulu rien d’autre que l’austère image de la croyante parfaite pour celer tes démons. Les voici qui menacent de te submerger. Tu résistes, tu faiblis. Tu cherches une réponse à sa question. Un aveu de la tempête qui t’a prise par surprise : « Je ne sais pas… »

Tu réfléchis sérieusement à sa demande. Tu sais quel est le déclencheur : tu ne voulais pas être « adulte ». Refuser tes dix-huit ans, c’était refuser le mariage et la place que l’on voulait te voir prendre dans la société. Refuser la main de ton benêt de promis, refuser de prêter ton ventre à ses enfants, refuser de prêter ton coeur à Dieu. Refuser d’aimer, de sourire, de rire sur commande. « J’ai voulu être libre. »

Tu as enfin ta réponse. Elle fait perler une nouvelle larme sur ta joue. Tu libères enfin tes mains de son emprise et te recroqueville de ton côté du canapé en sanglotant. Avec tout ça, tu ne sais toujours pas quel goût a ce thé.

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MessageSujet: Re: That's me in the corner trying to reach you (ft. Veredis)   That's me in the corner trying to reach you (ft. Veredis) EmptyMer 18 Juil - 15:22


that's me in the corner trying to reach you
(ft. Veredis Fjalarsdottir)
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La moindre perle qui roule sur les joues de la jeune fille m’émeut et me fait trembler de l’intérieur. Je la dévisage sans la moindre retenue, avisant l’écorce de sa chevelure veinée d’ombres et de lumières, les changements de l’ombrageux regard qui me dardait il y a quelques secondes encore alors que résonnait sa volonté de mourir. Mains dans les mains, yeux dans les yeux, je puis presque déceler les mouvements de son âme. J’ai senti tressaillir sa peau sous mon doigt, fleur fragile de chair et de sang. Le carmin lui est monté aux joues tandis que les orbes étincelantes d’azur me fusillent sur place. Elle semble désemparée, presque choquée que je lui pose la question. L’expectative juste a guidé le flot de mes pensées : tous ont sermonné Veredis sans daigner lui demander la raison de son acte.

Je vois la frêle jeune femme trembler, je perçois le tressautement de la paume, la moiteur des doigts, et le long frisson qui lui grise l’échine, gravissant avec grâce le bas de ses reins pour affleurer entre les omoplates et pincer la nuque de son bec de glace. Lorsque, après un éternel silence, sa voix fait enfin entendre l’ignorance des causes de sa situation d’un trémolo ténue et surpris, faible mais affirmé, je ne peux que vibrer avec l’écho de son désarroi. Que m’ont-ils envoyé là ? Et surtout, qu’ont-ils infligé à cette enfant pour qu’elle soit à ce point brisée ? Malgré moi, je l’imagine déjà contrainte par un homme, blessée par ses paires, et je scrute le peu de peau qu’elle donne à voir en quête de cicatrices, preuves matérielles d’une maltraitance.

Sa voix résonne à nouveau, déchirant appel murmuré dans la quiétude du soir. Elle aurait crié ces mots que l’effet aurait été le même : glaçant. Sa voix semble lointaine, comme si extraire de son coeur ce constat lui avait ôté jusqu’à la dernière écharde de ses émotions. Comme je sens l’impuissance de ma situation tandis qu’elle brise notre échange muet en retirant ses mains. J’ai toujours été quelqu’un de tactile aimant le contact physique, mais je sais que le corps est une barrière protectrice pour beaucoup de monde. Une terre inviolée que nul ne peut toucher. Je demeure interdit pendant quelques secondes en voyant les larmes perler sur sa joue et ses épaules se hérisser de soubresauts. Je me maudis intérieurement, puis tends la main pour la poser sur son bras. Elle semble si désemparée, si fragile fleur balayée par les vents et soumise aux tourmentes de la tempête.

Je me maudis et cède à ma pulsion première. M’approchant d’elle, je l’attire à moi pour l’enserrer dans mes bras. Je laisse souplement mes paumes reposer sur son corps blotti contre le mien, n’exerçant aucune force, aucune pression. Si elle veut se dégager de mon étreinte, elle pourra le faire à peu de frais. Je laisse quelques doigts se perdre dans la masse de ses cheveux avant qu’une paume paternelle ne se pose à l’arrière de son crâne.

« T… Vous pouvez être libre ici, Veredis, dans cette ville, loin de l’Islande. Vous pouvez prendre un nouveau départ. »

Et je veux l’y aider.
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MessageSujet: Re: That's me in the corner trying to reach you (ft. Veredis)   That's me in the corner trying to reach you (ft. Veredis) EmptyJeu 19 Juil - 11:57


that's me in the corner trying to reach you | & Arelius
(Said the sky - disciple)
† chapitre 19, verset 23Au beau milieu de tes larmes, tu ne sens rien d’autre que les égarements de ton coeur, le vide dans ta poitrine, la plaie béante de ton crâne. Tu ne réfléchis plus, recroquevillée comme un petit fétu de paille qui ne cherche qu’à se protéger en prenant le moins de place possible. A peine sens-tu une main sur ton bras, si légère qu’elle ne semble faire que te frôler comme une aile de papillon. Tu te détournes légèrement pour ne pas donner en spectacle ta vive bouffée d’émotion. Tu voudrais lui demander de t’indiquer ta chambre pour que tu y puisses celer tes larmes, mais tu ne parviens qu’à lâcher un hoquet incertain. Tu te maudis intérieurement de ta faiblesse, et sens monter une vague d’angoisse, de désespoir et de colère contre toi-même. Tu ne sais même pas comment ton masque a pu si aisément se fissurer pour te mettre à nu de la sorte.

Tu est si inattentive à ce qui t’entoure, seulement occupée à ta douleur, que le geste d’Arelius est un choc pour toi. Tu sens ses bras te couvrir les épaules et son torse offrir un soutien à ta tête. Tu sens la chaleur de son corps monter contre toi, et la douceur de ses gestes ne cesse de te faire frissonner. Tous tes muscles se sont contractés à son toucher, et tu tentes de faire la part de deux envies contraire. La première serait de te blottir contre lui pour pleurer toutes les larmes de ton corps jusqu’à ce qu’éreintée, tu t’endormes, les bras autour de son torse, le visage niché dans les plis de son vêtement. La seconde envie tonne et gronde dans ta conscience. Elle te hurle de cesser de te donner en spectacle et de repousser ces bras qui ne peuvent être que malintentionnés.

Tu ravales tes larmes, sèche rageusement le coin de tes yeux : tu te sens ridicule de te laisser ainsi emmener si loin par l’ire tonnante de ton désarroi. Tu voudrais le repousser, t’échapper de son étreinte, courir loin de cet appartement où bouillonne trop de bienveillance pour toi, mais harassée par le voyage, par les montagnes russes de tes sentiments, tu ne parviens qu’à te redresser un peu, sans quitter tout à fait cet espace protecteur. Tu as peur de lui. Sa capacité à voir au-delà de ta carapace t’effraie. Comment vas-tu faire pour survivre avec quelqu’un qui se soucie réellement de ton état et te surveilles de si près ? Tu crains déjà d’être fliquée, étouffée par la bienveillance et les bons sentiments. Tu savoures en te maudissant une dernière fois la sensation de ses mains sur ta peau, et tu t’écartes pour de bon, le sang emperle tes joues d’une rougeur violente. Tu voudrais te lever, tu te sens trop faible. Ta main attrape le thé. Tu trembles franchement. Tu portes la tasse à tes lèvres. L’eau chaude chargée de théine et d’effluves sombres et boisées te fait du bien. Le goût est léger, la texture connue, la boisson coule dans ta gorge et t’aide à reprendre contenance.

« Vos papillons, là, c’est des vrais ? » Tu tuerais pour pouvoir échapper à cette conversation, elle te fait bien trop peur.« Et vous avez beaucoup de bouquins. Qu'aimez-vous lire ? »
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MessageSujet: Re: That's me in the corner trying to reach you (ft. Veredis)   That's me in the corner trying to reach you (ft. Veredis) EmptyJeu 19 Juil - 14:57


that's me in the corner trying to reach you
(ft. Veredis Fjalarsdottir)
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J’ai laissé le corps frêle du papillon m’échapper, me couler entre les doigts comme la fraîcheur de l’ondée de cristal. Une brume évanescente qui file, file, insaisissable oiseau qui n’a encore fait son nid ici. Je l’ai vue retrouver un équilibre en celant savamment ses larmes. La pâleur d’un visage aux yeux rougis par le désarroi. Il lui faudra tant et tant d’instants accolés pour renaître de ses cendres.

Le vacillement de sa main caresse la tasse et ricoche en cercles concentriques à la surface de son thé. Je l’observe avec attention avant de me saisir de ma propre porcelaine pour y abreuver ma curiosité et mon attention.

L’ambrée liqueur
tonne sur la langue
en longue saveur.


Je l’entends me questionner sur la pièce, indirectement sur ma personne. Changement de sujet qu’elle imprime à la conversation, priant sans doute pour que je n’y revienne pas frontalement ni même par des chemins détournés. C’est mal connaître le fin amateur des vagues de l’âme que je suis. Je secoue la tête doucement, un sourire aux lèvres.

« Ce sont des maquettes en bois. Laissez-moi vous les montrer. »

Je repose ma tasse, emprunte la souplesse du chat pour me lever, file jusqu’à l’étagère qui semble avoir attirer l’éclat des mirettes étrangères. Je crochète un ouvrage à la couverture de cuir fatigué. Une vieille édition des Sonnets de William Shakespeare sous le bras, je m’empare ensuite de l’audacieuse sculpture sous cloche et la ramène vers la table basse. Les ailes demeurent parfaitement immobiles, fines plaquettes veinées sur lesquelles ont été apposées mille couleurs chatoyantes. Je reprends le livre en main pour le lui montrer.

« J’ai beaucoup de livres mais ne prends que trop peu souvent le temps de les parcourir, malheureusement. Je suis, comme tous, bien trop absorbé par les tourments de la vie moderne. Toutefois, j’aimerais vous conseiller cet ouvrage : ce sont les Sonnets de William Shakespeare, un ouvrage remarquable. »

Quelques instants flottent avant que je ne me décide. Le cuir buriné par les lectures semble palpiter dans ma main. Je retourne la paume, l’ouvrage y tombe ouvert sans effort. Je fais voler quelques feuillets jusqu’à trouver celui que je veux lui faire entendre. Sourire d’excuse.

« C’est du vieil anglais, je vous le traduirai après vous l’avoir fait entendre. »

Voix profonde chargée du doux appel du texte à devenir père, un écho vibrant à la présente situation.

« O, that you were yourself! but, love, you are
– Oh, si vous existiez par vous même ! Mais, ami,
No longer yours than you yourself here live:
–  vous ne vous appartiendrez plus dès que vous aurez vécu votre vie ici-bas.
Against this coming end you should prepare,
– Contre cette fin fatale, vous devez vous préparer
And your sweet semblance to some other give.
– Et faire le don de vos doux traits à un autre

So should that beauty which you hold in lease
– Ainsi, cette beauté que vous n’avez qu’en gages
Find no determination: then you were
– Ne connaîtra pas de fin, ainsi
Yourself again after yourself's decease,
– vous pourrez survivre après votre décès
When your sweet issue your sweet form should bear.
– quelqu’un de votre douce famille conservera votre douce apparence.

Who lets so fair a house fall to decay,
– Qui donc laisserait tomber en ruine une maison si belle
Which husbandry in honour might uphold
– quand les soins du ménage pourraient la conserver en honneur
Against the stormy gusts of winter's day
– contre les rafales des jours d’hiver
And barren rage of death's eternal cold?
– et la rage funeste de la bise éternelle qu’est la mort ?

O, none but unthrifts! Dear my love, you know
– Oh, nul autre qu’un prodige ! Cher amour, vous le savez
You had a father: let your son say so.
– Vous avez eu un père, laissez un fils après vous en dire autant. »


Je laisse les mots mourir dans le roulement de ma voix. Le texte m’a toujours beaucoup ému, et il prend ici une résonance étonnante. Cette jeune femme fragile, j’aimerais qu’elle puisse dire qu’elle ait eu un père, au moins à une époque de son existence.
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MessageSujet: Re: That's me in the corner trying to reach you (ft. Veredis)   That's me in the corner trying to reach you (ft. Veredis) EmptySam 21 Juil - 2:55


that's me in the corner trying to reach you | & Arelius
(Said the sky - disciple)
† chapitre 19, verset 23Tu te sens désormais plus en sécurité. La conversation a roulé sur de nouvelles préoccupations, loin de toi, loin de tes problèmes. Tu es en terrain inconnu mais non plus effrayant, et tout ce que tu peux apprendre sur ton hôte est bon à prendre. Tu laisses s’échapper un soupir de soulagement, et tu suis du regard cette homme étrange à la grâce troublante. Chacun de ses mouvements semble être habité d’une présence étonnante. Toi, tu se sens bien transparente à côté de lui, comme s’il avait une identité, un être-présent, et toi pas. Tu te sens petite, petite, une fourmi à côté de l’imposant lion.

Le lion ne dévoile pas ses crocs, pourtant, ni même ses griffes. Il rapporte dans ses bras l’objet de ta curiosité. Vaste cloche de cristal emprisonnant un amas complexe d’ailes de bois délicatement peintes : les veines de l’arbre jadis se sont faites élytres. Tu es captivée par le travail de l’artiste qui fait parfaitement illusion. Même le nez collé sur le verre, tu as la sensation qu’ils pourraient s’envoler si l’on venait à soulever la coupole. Tu lâches un « c’est magnifique »  énamouré. Il y a trop de beauté autour de toi, ça te fait presque mal au coeur. Tu avais pris l’habitude, en Islande, de ne plus t’émerveiller ni du levant, ni du couchant, pas plus que de la mer, des hauteurs et des crevasses. Ici, ces prodiges de la nature que les tiens appellent l’œuvre de Dieu te frappent de plein fouet. Sur les ailes des papillons immobiles, ce sont tes souvenirs qui valsent.

Tu lèves des yeux embrumés au coin de la paupière vers Arelius lorsqu’il se met à te parler de livres. Tu n’as jamais lu beaucoup en dehors de tes bouquins pour les cours et de la Bible. La passion qui transparaît des mots de ton vis à vis t’effraie et te fascine… Comme le reste du personnage, songes-tu. Tu vois ses doigts parcourir le flanc de cuir sombre d’un ouvrage, l’ouvrir, en caresser les pages jusqu’à trouver le bon texte. Tu n’as pas réussi à détacher ton regard de cet étrange ballet. La voix suave de ton vis à vis te fait détourner le regard de ses mains pour monter jusqu’à son visage. Il n’est pas absorbé dans sa lecture comme tu aurais pu le croire, mais s’adresse directement à toi en suivant son récit du fil des doigts. Tu croises son regard et t’empourpre tandis qu’il lit, lit, et fait résonner les mots de cet auteur anglais jusqu’à toi.

La lecture à voix haute te trouble. Elle donne corps à un texte figé, elle fait naître d’étranges échos en toi. Déjà, les lectures des Evangiles à la messe te fait cet effet, mais tu pensais que c’était à cause de la parole de Dieu. Il n’en est rien. Le timbre porte les mots de Shakespeare, les mène à ton oreille et t’ensorcelle. Tu es émue plus que tu pourrais ne le dire de cette invitation à la paternité, à la parentalité. C’est comme si ton vis à vis voulait te signifier qu’il acceptait de te prendre sous son aile, d’être un père pour toi si tu voulais l’accepter en tant que tel. Tu sens que ta voix sera tremblante si tu prends tout de suite la parole, aussi choisis-tu de t’emparer d’une gorgée de thé d’abord. « Je ne connaissais pas cet auteur, enfin, je sais juste qu’il a écrit Romeo et Juliette quoi... » , lâches-tu, tasse à la main. « C’est beau, et émouvant » . Probablement ta plus longue remarque jusqu’à présent. Tu voudrais entendre encore résonner cette voix pour toi, si chargée d’émotion : tu l’as déjà entendu dans des captation vidéo, mais ces dernières ne rendent pas le quart de la charge émotionnelle véhiculée par Arelius. « ça ne vous manque jamais de jouer en islandais, la plupart des rôles que vous avez assurés sont en anglais, je crois ? »
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