PROUD.

- la tête tournée vers les étoiles -

( il suffit de pas grand chose
pour retrouver le sourire
s'il y a l'épine, y a la rose
il suffit de s'en souvenir )

au début, y a juste maman. maman, elle est jeune, elle a seize ans. elle veut faire comme les grands. elle veut la maison, le chien et les deux enfants. mais maman, elle n'a pas d'homme. alors, elle va s'en trouver un, le premier qui vient. elle a pas non plus de famille. c'est dommage, ça sait résonner les autres, la famille. mais maman elle s'en fout. le premier qui arrive, c'est le bon, elle en doute pas. elle écarte les cuisses au bout d'un mois. c'est la dernière fois qu'elle le voit.
maman, elle a jamais su faire les bons choix.

après, y a eu papa. papa, c'est pas le vrai, le biologique. papa, c'est le médecin qui suivait la grossesse. papa il est plus vieux, mais c'est un type honnête et franchement fleur bleue. papa, il s'entiche de la gamine malheureuse. il aime bien réparer les gens cassés. et y a pas plus cassé qu'une enfant qui n'a nulle part où aller. qui est seule et désemparée. alors papa, il coupe le cordon à la naissance du petit. puis il reste avec lui toute la vie.

mais le petit, il arrive trop tôt. deux mois trop tôt. c'est beaucoup, deux mois, pour un petit cœur comme ça. à la naissance, il respire pas. mais maman et papa, ils se battent. lui aussi, il se bat. mais il est pas très costaud. il reste longtemps à l’hôpital. un peu trop. et à sa sortie de là, il tombe sans arrêt malade. des années après, il tombe sans arrêt malade. mais lui, il guérit les maux des autres. parce qu'il rayonne comme le soleil.

puis il finit par y avoir nana. nana, c'est une petite bouffée d'oxygène. nana, elle a le mérite de ressembler à la fois à maman et à papa. nana, elle a ça de bien qu'elle n'a pas trop de problèmes. elle est jolie, elle est gentille, elle est normale. dans son corps à chef, ça brille comme sur un sapin de noël. dans celui de nana, y a rien. les gens, ils préfèrent quand il y a rien.
c'est moins contraignant.

puis un jour, chef, il a pris son sac. c'est aussi simple que ça. il a compris qu'il creusait sa tombe à rester là-bas. il a des rêves plein la tête, chef et il veut les réaliser avant qu'il ne soit trop tard. il a embrassé maman, papa et nana, puis il a pris l'avion sans se retourner. parfois ça lui manque tout ça, mais à part eux, il a pas laissé grand-monde derrière.
puis au fond, c'est devant que ça se passe maintenant.

après c'est pas rose tous les jours. chef, il cause pas bien la langue du coin, puis il a pas toutes les nuits un toit au dessus de sa tête. parfois, il fait pas les bonnes rencontres. il est pas au bon endroit. mais maman et papa, ils versent encore un peu d'argent sur son compte, pour l'aider. il regarde les couchers de soleil, il boit des coups avec des rencontres furtives. il se fait dépouiller, il aide les mémés. il aime respirer, mais il s'écroule sur le trottoir quand la santé elle suit plus. au fond, il s'en fout chef de tout ça. il survit pas. il vit. c'est déjà ça.