› identité: INA ALTUNES — maintenant, c'est plus qu'un vestige couché sur du papier, c'est plus qu'un souvenir lointain qu'elle préférerait oublier.
› âge, date de naissance: VINGT-ET-UN JUILLET, 21 ANS — c'est la créature qui vieillit et son cœur qui flétrit.
› signe astrologique: CANCER — douce ironie, faut croire que les astres avaient tout compris.
› lieu de naissance, origines: elle a mordu la poussière des contrées arides MEXICAINES à la naissance mais au fond y a surtout l'AMÉRIQUE ancrée dans ses veines.
› emploi, études: déscolarisée après avoir fugué du foyer familial, fallait bien trouver un moyen de subsister. alors elle a vendu quelques sachets à qui voulait bien les acheter, un petit business à son compte, ça lui permettait de piocher dans les réserves. parce qu'au fond c'est ce qui permet d'éloigner les peurs et de donner au monde plus de couleurs.
› orientation sexuelle: y a le coup de cœur qui la fait marcher, y a des draps dans lesquels elle pourra parfois venir se glisser mais au fond c'est surtout des sentiments qu'elle n'osera jamais partager.
› statut civil: trou béant dans la poitrine, le manque qui consume et des lambeaux de cœur abandonnés sur le bitume.
› traits de caractère:Dans sa tête y a une tempête, une rage qui s'propage parce qu'Ina elle a tout d'un orage. Elle essaie même plus de l'étouffer parce que c'est devenu la clé pour lui permettre d'avancer. Et dans son cœur ça gronde colère, ça gronde tonnerre. Y a un brasier prêt à exploser parce qu'Ina elle en veut à la Terre entière de lui avoir pris son être le plus cher. Faut réapprendre à aimer, réapprendre à respirer, mais ça Ina elle sait plus comment faire, alors c'est les mots et les maux qui s'entassent au fond de sa trachée et elle qu'est juste bonne à les recracher. Cœur devenu acier comme seule réponse à cette existence gangrenée.
( la tête tournée vers les étoiles )Quand je regarde l'horizon j'y vois des milliers de constellations mais au fond, la seule étoile dans mon ciel c'est celle qui répond à ton nom, Ema. À jamais t'y resteras.C'était trop beau pour être vrai, la petite existence paisible et sans vague qu'au final un raz-de-marée aura réussi à emporter. Ils ont appelé ça la leucémie, un putain d'tsunami qui lui aura tout pris.
Avant, y avait Ema et y avait Ina – Ema avec les tuyaux qui lui sortaient du nez et les écrans qui clignotaient sans arrêt, et Ina à ses côtés, le regard embrumé et leurs doigts entremêlés. Elle était jeune Ema, trop jeune pour affronter ça.
Maintenant y a plus qu'Ina et les souvenirs-rasoirs et son cœur-trou noir. Y a les étoiles qui oublient de briller et son univers qui à tout moment menace d'imploser. Un quotidien devenu trop oppressant, trop étouffant – parce que tout lui rappelle quand elle était encore là, la petite Ema. Les réminiscences d'un passé où sa sœur était encore à la maison – quand tout était beau, quand tout était bon. Les souvenirs douloureux d'un bonheur parti en fumée, et la culpabilité qui ronge, celle des promesses murmurées mais qui n'ont pas réussi à faire cicatriser les plaies.
Alors faut fuir
Fuir puis courir
Fuir pour ne jamais revenir
Et malgré le manque de repères et les journées sans lumière, c'est le chemin menant directement à Crescents Heights et son quartier le plus malfamé que la gamine réussit à trouver. Elle pense quitter un enfer quand en vérité la seule chose qu'elle parvient à faire c'est de s'y enfoncer encore plus, les deux pieds joints et la tête la première. Cette ville dans le rôle de géôlière, Ina se fait prisonnière de l'étau d'un brouillard épais et duquel elle n'arrive plus à s'échapper. Parce qu'elle a plus son pilier auquel se raccrocher quand l'océan devient trop déchaîné, elle a plus son pilier qui autrefois l'aidait à se dresser contre vents et marées. Parce que ce pilier c'était Ema, sauf qu'Ema est plus là et que jamais elle ne reviendra. À elles deux c'était facile de tout affronter, même qu'elles connaissaient les victoires la gloire et surtout l'espoir, mais après son départ Ema elle lui a rien laissé. C'est un nouveau monde en solitaire qu'Ina doit apprendre à apprivoiser, mais y a ce manque qui brûle et les galaxies qui hurlent. C'est un big-bang permanent, vacarme assourdissant – ça explose en un million de particules qui se veulent plus destructrices que créatrices et au final ça laisse des cicatrices. Elle découvre le monde de la nuit et ça l'abîme autant que ça la fascine, une décadence jugée nécessaire entrainant sa chute précipitée, et le plus commun des mortels parierait que plus rien ne pourrait la faire se relever.
Et pourtant il suffit d'une boulangerie
Pour faire changer le cours de sa vie
Y a la promesse d'un toit décent et d'un petit foyer effervescent, c'est plus qu'inattendu et Ina elle voit ça comme une opportunité à saisir les bras tendus. Cette colocation, ça aussi ça semble être trop beau pour être vrai – et au fond Ina elle prie juste pour qu'y'ait pas un autre raz-de-marée qui réussisse à tout emporter.