(le goût du néant)

- la tête tournée vers les étoiles -
elle a beaucoup pleuré, quand elle est née. peut être bien parce qu'elle savait, que maman ne voulait pas d'elle.

maman ne l'a jamais tenue dans ses bras. ça s'passe comme ça, la mère touche pas l'enfant. c'est pas comme si elle le voulait, de toute façon.

les Rose c'est des gens biens. ça veut dire qu'ils roulent en range rover et qu'ils portent des fringues trop chers. et parfois, il donnent de l'argent aux africains qui crèvent la dalle. et puis même que parfois, ils adoptent des gamines blondes qui gueulent trop fort.

luxe, luxe, luxe. luxe tout le temps. luxe partout. la tête et les pieds dedans. jolie princesse, jolie couronne. gâtée pourrie pour lui faire oublier que maman l'avait jetée.

les livres, un peu, beaucoup, passionnément. parce qu'elle est si bien, dans son monde. loin de tout. des gens qui parlent trop. des hommes, qui mentent trop. les pages qui glissent sous ses doigts et qui, comme par magie, suffisent à calmer la tempête dans son crâne.

surdouée. ça sonnait comme une maladie inconnue. un truc dangereux. genre cancer.
ça veut juste dire qu'elle comprend plus vite. lit plus vite. parle trop vite. et dans le fond, c'est quand même une maladie. un truc qui la suit.

elle a toujours eu du mal, avec les sentiments. avec ses parents, qu'elle aime, sans trop aimer. qu'elle comprend pas. elle est comme handicapée, avec son coeur. trop cartésienne pour comprendre les relations. et c'est pareil avec les garçons. trop méfiante. trop précieuse pour s'abandonner à ces frivolités. personne ne la comprend.
personne n'a jamais cherché à l'apprivoiser.

y'a bien une personne, qui fait bondir son coeur. ce frère. pas vraiment frère. pas du tout, même. pas le même sang. les mêmes faux-parents. ça fait longtemps qu'il est parti, pourtant. vivre sa vie, loin d'ses yeux bleus. son coeur, il bat parfois au rythme de son absence, d'ailleurs.

marie, elle fume, parfois, c'est vrai. pour calmer sa nervosité un peu chronique. un peu trop chronique. c'est drôle, la mort au bout de ses lèvres. c'est pas crédible.
ça fait sourire. la jeunesse qu'elle abime, sa jeunesse qu'on ne voit pas faillir, pourtant.

elle sait pas vraiment parler aux gens. sa voix elle tranche trop. elle repousse les gens, sans trop l'vouloir. sans trop l'chercher. même si elle les comprend pas trop,
de toute façon. alors marie, elle fuit les soirées. trop de gens. trop de contacts. trop d'alcool. elle panique facilement. un peu trop. c'est peut être bien pour ça, que les gens osent pas l'approcher, d'peur qu'elle ait peur.

toujours son baume à lèvres à la cerise dans son sac. toujours un miroir. toujours un paquet de clopes, au cas ou. toujours un bouquin écorné. toujours un carnet, pour dessiner, les gens qui marchent, la vie qui passe.

elle aime être celle qui gueule le plus fort. elle aime être la meilleure, partout, tout le temps. elle aime être celle qui fusille le mieux du regard.
et puis, elle aime être celle qui a l'dernier mot. surtout.