à l'ouest - dim & vic

Les nuits sont toujours agitées. Pour l’un comme pour l’autre. Tu te réveilles en sursaut avant la mort. Sous l’emprise des flammes qui lèchent ta peau ou juste avant l’impact d’un saut dans le vide. Il grogne souvent. Pourtant il presse son corps contre le tient sans un mot. Et les battements de son cœur contre ton dos finissent par apaiser ton souffle. Lui, c’est un peu différent. Il ne se réveille pas en hurlant, mais c’est comme s’il se battait contre le vent. Il te tire du sommeil par ses mouvements brusques voir des coups de pieds. T’as pris l’habitude de venir effleurer la peau qui lie la base de son cou à sa mâchoire. Là. Sans un mot. Et il finit par s’apaiser. Finalement, dans le chaos des ténèbres, il y a la constance du corps de l’autre qui apaise les esprits.

Ton coloc passe la plupart de son temps à étudier, bosser ou dormir. Et si tu le voyais déjà pas énormément avant, tu ne le vois quasiment plus. Quant à ta coloc, elle passe la plupart de son temps chez son copain. Sans que vous le réalisiez vraiment, cet espace de vie est devenu le vôtre. C’est plus vraiment chez toi, mais chez vous. Il a ramené sa console et la plupart de ses vêtements. Et même si ça gueule souvent, le lit subit les réconciliations bruyantes que les mots ne savent toujours pas bien exprimer.

Tes notes sont doucement remontées. Il te lit parfois des chapitres de livres quand il est d’humeur. Sa façon de buter sur certains mots te fait sourire. Et tes sourires le font gueuler. Susceptibilité exacerbée. Pourtant, la fois d’après, vous recommencez. Peut être qu’il est aussi satisfait de voir que tes notes s’améliorent.

Tu repenses aux paroles de l’élève qui témoignait de son séjour à l’étranger. Il parlait de l’apport culturel et de la possibilité de sortir de sa bulle de confort. Son discours était formaté par les besoins académiques, mais il y avait dans sa voix un véritable enthousiasme. Tu réalises que Gabriel vient de te poser une question que t’as complètement raté. “Quoi ?” Tu sais que ça serait presque impossible pour toi. On envoie pas les gamins aveugles à l’autre bout du monde. Et puis … C’est long 6 mois. C’est cher aussi. Gabriel finit par t’abandonner en bas de chez toi en se plaignant que t’es à l’ouest aujourd’hui. Tu l’es probablement. A l’Ouest jusqu’en Europe.

équilibre bancal qui s'est installé. l'instabilité des choses qui essaye de tenir. c'est comme si tenir sur une corde tendue et d'avancer contre le ventre. contre les tempêtes qui finiront bien par arriver... pas certain que l'équilibre se gardera debout encore pour longtemps. il retournera sans doute s'écraser la gueule contre la falaise, abimé, brisé en quelques morceaux pour peut-être essayer de vaguement se reconstruire encore moins solide qu'avant. d'un éternel pessimisme faut dire qu'on t'a pas apprit l'opposé. pourtant tu laisses les choses faire Dmitri, pas ton genre d'aller te battre contre vent et marée; il t'a pourtant adoucit et apprit à au moins pas tout envoyer dans le décor sous prétexte d'une fin annoncée. c'est stupide, le manque te le rappelle parfois. puis après le matin revient s'lever, la clope de l'aube vient effacer tes morbides pensées, tu les repousses loin. et l'immobilité gagne du terrain. t'envoies rien au sol, tu détruis rien pour l'instant. et doucement son appartement devient un peu tien.
sous les feux de Lysandre, sous les impacts parfois violent de vos disputes quand vos chemins se croisent et que vous êtes incapable de vous éviter. comme la peste qui infecte l'humain, l'un comme l'autre vous vous glisser dans la tête de l'autre.. incapable de s'éviter comme incapable de s'empêcher de respirer. tu tais à Victor les soupçons qui s'éveillent chez ton meilleur ami. tu tais à Victor les abysses qui se creusent entre vous et te laisser un peu plus meurtris que tu l'étais. tu pensais pas pouvoir creuser plus profond des blessures que tu ne pensais exister.

mais il est doué l'aveugle pour panser tes colères, tes blessures, tes doutes. trop doué à ton goût. pour apaiser les spasmes et cauchemars. tu voudrais parfois que ça s'arrête vraiment; mais t'es pas certain que ça puisse arriver. on ne noie pas ses démons Dmitri. tu l'sais depuis longtemps. tu les contentes d'étouffer leur bruit sous les occupations, le travail, la bouffe, les soirées parfois, et Léandre qui vient aussi sauver tes ennuis en t'amenant parfois chasser la vie et courir après l'adrénaline. et par tu ne sais quelle folie, vous avez finit affalé sur le canapé du salon. celui de Victor, un peu le tien aussi. à jouer à a console, boire et brailler après un personnage qui ne répond pas assez vite à vos demandes. t'as finit plus tôt aujourd'hui... et Léandre n'ayant rien de mieux à faire que venir te tenir compagnie, tu râles sur sa manière de se battre contre son adversaire jouant en même temps au hasard quelques notes avec tes doigts. t'occuper les mains et l'esprit. et entre la guitare que tu fais vibrer et vos commentaires féroces sur le jeu vous entendez même pas l'arriver de Victor que tu pensais repoussé à encore quelques heures. c'est pourtant le mouvement dans le coin du salon qui fait tourner la tête d'Léandre pendant que tu joues un peu de sa guitare... t'arrêtant quand la voix de Victor passe par dessus la musique de la console. heu...salut ? y'a l'ton de sa voix qui semble avoir capté que t'es pas solo et peut-être aussi en faite parce qu'il y a deux secondes vous râliez comme des clochards. tes doigts s'arrêtent alors que tes muscles se tendent sans que tu bouges. qu'est-ce tu fous là si tôt ? la gentillesse il a du lui même faire un trait dessus depuis le temps qu'il te fréquente. on vous entend depuis l'ascenseur... seul l'bruit d'la console vient remplir l'espace comme réponse. y'a Léandre qui t'lâche un regard de biais sans que tu le captes avant qu'il prenne les devants avec son habituel sympathie. tu vois malejka je t'avais dis qu'tu jouais trop fort.. qu'il balance avec humour comme s'il pouvait détendre l'atmosphère devenu glacial venant d'toi. t'bouges juste la main pour lui montrer ton majeur. fuck off. tu marmonnes en finissant par retirer la clope que t'avais entre tes lèvres depuis un moment et dont la cendre menace de s'écraser au sol. il change de cible finalement reposant son attention sur Vic alors qu'il s'lève à peine pour lui tendre la main. moi c'est Léandre, déso mec de taper l'incruste. taper l'incruste... maintenant clairement c'est ce qui  se passe parce que personne ne vous fréquente quand t'es avec Vic. personne. jamais. il t'voit pas connard. que tu marmonnes avec humeur en posant la guitare à côté d'toi.

Tes doigts parcourent les boutons de l'ascenseur, comptant les cercles pour y trouver le tient. Tu repenses à cet étudiant. Tu regrettes de ne pas avoir osé lui poser des questions. Il aurait été gêné de ne pas pouvoir te dire que ça serait différent pour toi. C’est sur. Tout est toujours différent pour toi. Les portes de l'ascenseur s’ouvrent et tu peux entendre le boucan qui semble provenir de ton appartement. Il y en a que deux sur la droite et le second est celui d’une vieille dame. Tu rates un battement de cœur quand la pensée que Lysandre puisse être là te traverse l’esprit. Non. Il est con, mais pas autant. Tu t'arrêtes pourtant devant la porte, tes clés à la main, pendant de longues secondes. La gorge serrée, tu écoutes les bruits à l'intérieur. Tu écoutes les voix. La sienne que tu connais par cœur et puis une inconnue. Ce n’est ni ton coloc, ni quelqu’un que tu connais. Tes sourcils se froncent légèrement de confusion. L’idée qu’un ami à lui soit là te parait presque absurde. Tu tournes les clés dans la serrure avant de pousser la porte et poser tes affaires dans l’entrée. Ca ne semble même pas les perturber. “Heu… Salut?”

Tu hausses un sourcil à sa question. A cette façon trop abrupte de la poser. Tu te contentes de dire qu’on les entends depuis l’ascenseur, regrettant un peu de ne pas l’avoir envoyé bouler en disant que c’est chez toi, et que tu fais un peu ce que tu veux. C’est surtout ce changement d’humeur qui vient te heurter. Il riait il y a quelques secondes et ta voix à suffit à le fermer comme une huître. Tu serres un peu les dents, t’apprêtant à botter en touche lorsque le garçon ouvre la bouche pour répondre à Dim. De cette façon si naturelle. Leur complicité se lit dans ces simples mots et te désarçonne un peu. T’as même pas le temps de répondre que Dim rétorque que tu l’vois pas. Tu comprends qu’il devait te tendre la main. Et c’est con, mais tu t’sens comme un putain d’idiot à cet instant. Tu esquisses un sourire géné alors que tu tends ta main devant toi dans sa direction, le laissant vers le dernier geste pour venir la serrer. “Victor” Tes doigts sont gelés. Il faisait même pas si froid dehors mais le stress est monté soudainement en entendant les voix à l'intérieur. Et tes doigts sont toujours froids quand t’es stressé. “Désolé… J’ai les mains gelées…” C’est toujours moins pire que de les avoir moites.

Tu te retrouves un peu comme un con. T’es pas sûr de ce que t’es censé dire. Tu passes une main dans tes cheveux parce que tu ne sais pas quoi en faire. T’as l’impression de déranger comme jamais. “Hum… J’vous laisse jouer tranquille alors…” Tu te diriges vers ta chambre. Votre chambre. Évidemment, tu ne vois pas le regard interrogatif de Léandre qui se demande pourquoi tu vas dans la chambre que Dim lui a vaguement indiqué comme la sienne.

l'humeur qui change comme on enclenche un interrupteur. c'est pas d'le voir qui t'fait vriller, mais la situation qui fait tout s'enclencher. l'appart comme seul témoin de votre intimité. y'a plus jamais rien qu'a approché de cette vérité dans ton entourage. si t'as bien dû d'forcer à certains effort quand tu sentais que t'allais l'perdre y'a des mois de ça... y'a une abyme de séparation entre l'fait d'aller dans un restaurant avec lui et l'fait d'voir Léandre comme témoin d'votre relation. personne d'ton entourage... le chaos de la rencontre créé quand Lys y avait été confronté t'a toujours bien dissuadé de cela. même si Léandre n'est pas Lysandre. même si Lys est fucked up. même si plein d'chose Dim, t'as quand même jamais voulu retenter ça. Puis pas du genre à t'confier, ou à partager. pas du genre à accepter d'laisser transparaître la moindre faiblesse. même tenir à une go a toujours été presque risible dans l'monde que tu côtoies alors assumer aux yeux d'quelqu'un que tu reverras que la personne qui calme tes angoisses et t'retourne la cervelle est un mec... Silence. Léandre avec son éternel simplicité vient l'briser à coup de mot décontractés. il serre la main d'Victor, sans réussir à vaincre le bloc de malaise qui s'est installé. il le capte, Victor le capte. l'mec en bas de l'immeuble doit bien aussi le capter tellement c'est obvious. Hum… J’vous laisse jouer tranquille alors… tu grognes comme acquiescement, il tourne les talons sans rien demander de plus. tu te hais d'avoir laissé Léandre entrer dans l'appart, tu t'hais de pas vraiment réagir à ça. tu te hais encore plus quand tu croises le regard d'Léandre après que Vic disparaisse dans ta piaule. tu t'fermes encore plus Dim. reflexe impossible de protection contre l'monde et tout c'qui entoure cette histoire depuis le début. c'est sa... 'fin notre... bref joues à cette putain d'console. tu bugues, tu butes sur les mots et c'est évidement la violence, le froid glaciale qui reprend ses habitudes. sauf qu'Léandre, s'il est pas aussi taré qu'Lysandre, il en a aussi la carrure pour encaisser toute ton agressivité. fucked up lui aussi dans un tout autre domaine. il ricane à cette menace même pas voilé... reprenant la manette quand toi tu t'lèves du canapé. fallait p'révenir si c'était un moment important où tu voulais m'présenter ta dulcinée. il manque de justesse de se prendre ta manette dans la gueule... et la vitesse à laquelle elle s'écrase dans le coussin montre bien à quel point les conséquences auraient été désastreuse pour son visage. violence extrême qu'il provoque tout en dédramatisant la chose. violence extrême qu'il provoque sans sourciller, parce qu'il aime jouer avec le feu... parce qu'à une seconde prête c'était son arcade qui finissait à se faire recoudre aux urgence et que c'est assez d'adrénaline pour l'faire kiffer. c'est bien l'seul truc qu'il retient de l'échange. tu devrais capter Dmitri qu'il y a que pour toi que tout l'reste est une montagne.
tu traverse le salon fermant la porte d'votre chambre quand tu la passes. j'te pensais en cours pour l'reste de l'aprem. froid, distant et pourtant si loin de la violence d'il y a un instant avec ton pote. comme toujours perdu entre l'envie de l'avoir et l'envie de le voir partir dès qu'il y a des putains de témoins. foutu refoulé dans chacun de ces instants.

L’arrière de ton crâne vient reposer sur la porte close de la chambre alors que tu passes tes doigts sur tes yeux dans un soupir. Tu repasses dans ta tête la conversation en te tapant les doigts intérieurement pour avoir eu l’air si con. T’aurais pas pu parler un peu ? Dire autre chose j’ai les mains froides. La pensée qu’il a dû te prendre pour un débile en plus d’être handicapé te retourne le ventre. T’arrives pas à desserrer tes dents. Et puis cette jalousie à la con qui te crame le ventre sans que t’ai rien demandé. C’est même pas tant l’idée qu’il soit avec un gars chez vous. Sans savoir pourquoi, c’est pas quelque chose qui t’a traversé l’esprit. Non. C’est son rire qui s'évanouit sous ta voix. Tu marmonnes “j’vous laisse jouer” en répétant ce que tu viens de dire dans un ton moqueur et dépité.

En plus t’as laissé ton sac avec ton ordinateur dans l’entrée et tu ne peux pas vraiment ressortir maintenant pour aller le chercher. T’aurais l’air encore plus idiot. Ton bouquin est dans le salon. Tes écouteurs dans tes poches de manteau. Alors tu vas t’retrouver là à rien faire parce que t’es infoutu d’avoir l’air d’un humain normal qui parle et sympathise.

Tu viens à peine de te reculer de la porte pour aller vers le lit quand elle s’ouvre de nouveau, te faisant sursauter de surprise. Il referme la porte alors que tu te tournes vers lui. Le mélange de ta vulnérabilité face à la situation et sa froideur provoque une réaction de défense inéluctable. “Ca s’fait de prévenir quand on invite des gens” C’est distant. C’est froid. C’est instinctif. “J’ai eu l’air d’un putain d’con...”. Et comme pour prouver tes mots, ce n’est que là que tu réalises qu’il t’a suivi. Qu’il aurait pu rester avec son pote en ignorant ta présence, mais il est là. Tu fronces un peu les sourcils, sans vraiment comprendre. Et comme souvent, ton cerveau prend des raccourcies dans ta compréhension de la situation  “Ca va... j’dirais rien…” Pour vous. Ou pour lui qui aime les gars.

Ca s’fait de prévenir quand on invite des gens défensif, violent; ça vient effleurer ton corps sans même te faire plus que sourciller. trop habitué depuis toujours à vous écorcher, il fut un temps c'était que comme ça que vous saviez communiquer. et comme toujours le naturel revient au galop; incapable d'réagir en pseudo adulte l'un fasse à l'autre. incapable d'résonner comme de bons p'tits humains bien calibré. faut t'décider si c'est ma piaule j'fais bien c'que j'veux sans avoir d'compte à rendre. tu lâche avec acidité et la même froideur avec laquelle il t'a répondu. t'sais pas trop pourquoi il est en colère lui. tu sais jamais vraiment faut dire mais parfois t'as des pistes. genre quand tu viens renverser son monde et le percuter de ta violence, y'a de quoi un peu se douter mais là tu vois tes motifs et les siens te restent inconnu. J’ai eu l’air d’un putain d’con... il t'donne beaucoup trop de matière pour la tourmente faut dire le Wilde. d'puis toujours aussi. tu grinces des dents. ça change pas d'd'habitude. tu lances dans un grognement en l'toisant même s'il est incapable de le voir. t'sais bien que tes attitudes et ton arrogance il les sent aussi bien qu'il pourrait les voir. aussi dérangeant que ça puisse être t'as finit par t'y faire à cette manière qu'il a d'trop connaître tes manies pour même les voir sans ses yeux. Ca va... j’dirais rien… froncement d'sourcil, pas sur d'comprendre ce qu'il dit. tu l'regardes comme si en effet il était con ou juste comme s'il parlait pas la même langue que toi. quoi que ça... c'est vrai d'puis tout le temps. t'en dis pourtant beaucoup d'puis deux minutes... tu comptes rester enfermer jusqu'à c'qu'il se tire ? ..j'dois l'mettre à la porte ? t'as beaucoup jouer au dur et l'envoyer chier quand il ose t'dire que t'aurais pu prévenir, y'a quand même cette question que tu finis par poser avec mauvaise grâce et humeur toute aussi peu glorieuse. jamais lui donner raison ou lui laisser gagner du terrain quand il s'agit de dispute à batailler. stupide connard à l'égo démesuré.

Sa piaule. Votre piaule. L’idée te retourne le ventre un instant. L’idée qu’il en parle. Qu’il le réclame. C’est sa piaule ou pas. C’est agaçant quand il a raison. Tu relèves les yeux vers lui. Ces yeux vides qui se posent pourtant presque sur son visage que tu devines renfrogné. Un petit grognement s’échappe de tes lèvres alors que tu t’planques déjà derrière ta propre insécurité. Derrière ce sentiment de pas avoir été à ta place. Etre à ta place. Comme si y’en avait qu’une de place. Tu sais juste plus comment faire. Comment avoir l’air à l’aise. C’est comme si tu avais oublié les règles. T’étais meilleur avant. T’étais peut-être juste meilleur à faire semblant. Quand tu débarquais, du haut de tes 15 ans, dans une soirée où t’avais pas vraiment ta place. L’amertume de la bière te faisait grimacer, mais il y avait cette fierté de pouvoir te tenir là. Au milieu de ces gens différents. Tu lâches un léger rire. Non. C’est pas un rire. C’est juste de l’air sous pression expulsé de tes narines et agrémenté d’un petit son. C’est ce petit “ah ok” qui s’exprime sans mot. Il trouve pas ça différent de d’habitude. Tu passes la main dans tes cheveux en respirant profondément.

Tu diras rien. Tu te rends pas vraiment compte à quel point la peur t’enchaine. Tu ne la reconnais pas tant elle a l’air absurde. T’as peur d’agir de façon à ce que son pote sache pour vous deux. T’as pas peur pour toi. T’as peur pour vous. De ce que ça pourrait déclencher chez Dim. T’as peur qu’il se braque et qu’il te blesse. Et t’es prêt à l’faire en premier pour ne pas ressentir la violence du rejet. Et le pire dans tout ça, c’est à quel point c’est instinctif. Tu t’enfermes tout seul dans le placard.

Tu fronces les sourcils à sa question en enfonçant tes mains dans les poches de ton jean. Il te met face à l’absurdité de la situation. “Non mais… C’est juste que…” Bordel. T’arrives pas à mettre des mots sur cette sensation qui te tord le ventre. Sur son rire avorté. Sur les faux semblant constants. “ …j’ai juste pas envie de… réflechir à tout ce que je peux dire ou faire…” Cet appartement est devenu le seul endroit où vous pouvez être vous. Et cet endroit vient d’être colonisé.

ses yeux sur ta gueule comme toujours ça à l'don d'te perturber autant que te calmer. c'est comme s'il pouvait t'faire oublier toutes tes erreurs, toutes tes horreurs. comme s'il pouvait t'voir pour de vair, comme si ses pupilles fixaient ta gueule sans y voir qu'un obscurité qui porte ta responsabilité. foutu frustration quand il fait ça. pourtant s'il voyait t'aurait s'besoin de soutenir son regard, d'le toiser et d'gonfler ton égo. connard que tu es, par moment son handicape t'fait échapper à beaucoup d'réalité. vous rester là un instant à vous "toiser" face à face comme si l'un d'vous pouvait plier. éternel répétition. si ton égo est le plus gros et acéré, faut pas croire Victor garde le sien bien haut placé pour pas s'laisser bouffer par sa sensibilité.

t'finis par mettre un terme vaguement à ce qui pourrait s'étirer encore pendant des heures. vous êtes fort pour ça, s'écharper jusqu'à c'qu"il reste plus rien, jusqu'à perdre le souffle et l'énergie même de causer. l'envie de mettre ton pote à la porte te transporte pas d'joie pour autant.. tout plutôt que ranger ta fierté d'vant Léandre en obéissant bien sagement si Victor t'dit de le virer. tout plutôt qu'voir le sourire narquois d'ton pote qui demanderait sans aucun doute où tes couilles sont passées. pourtant t'fais l'effort de quand même demander à Victor, même si , manipulateur au possible, t'sais très bien qu'il ira jamais jusqu'à qu'te le demander. Non mais… C’est juste que… silence, il bafouille; tu fais un geste de tête que, s'il pouvait voir, te voudrait sans doute un coup de sa part. l'genre de geste qui dit "oui, la suite arrive quand ?" qui n'a rien de glorieux et qui l'ferait se braquer. t'es loin d'être parfait. …j’ai juste pas envie de… réflechir à tout ce que je peux dire ou faire… froncement d'sourcil, tu comprends rien. parfois il parle en crypté et t'as jamais l'décoder pour le cerner. tu grognes. wilde fais pas ta meuf, j'comprend rien à c'que tu racontes.. tu grognes avec mauvaise grâce sans pour autant jouer au con et ignorer ses propos. t'fais l'effort au moins t'attendre, d'essayer d'le laisser s'exprimer plutôt que d'lui donner un mur de froideur comme simple réponse à s'qu'il semble avoir tant de mal à prononcer ou a t'faire comprendre.

Sa remarque te fait à la fois grincer des dents et sourire. Il a cette façon de jouer avec les mots, de te pousser à t'exprimer même lorsque tu es réticent. Il te force à mettre des mots sur tes peurs. A les exprimer haut et fort. Vas y Victor. Nomme la terreur qui te crame le ventre depuis ce jour. Le goût de sang te remplit la bouche. Tu sais pas si c’est un relent du passé ou si t’as juste mordu ta joue trop fort. Les cicatrices de ses anciennes fréquentations marquent encore trop ta peau. T’es pas certain de vouloir en rajouter des nouvelles. La crainte qu'il apprenne votre relation te terrifie. Ou plutôt, tu redoutes sa réaction. Le dégoût. La violence. La douleur. Et pourtant, tu rêverais que cela soit simple. Comme pour tous les autres. Pas besoin de déclarations grandiloquentes. Tu souhaites qu'il n'ait pas honte de vous. Tu ne demandes même pas qu'il t'embrasse devant tout le monde. Tu veux juste être libre de prononcer quelques mots sans craindre de trahir ce que vous partagez. Tu rêves de pouvoir effleurer sa peau sans te tourmenter de ce que les autres pourraient penser.

Tu dégluties. "Je... Je ne sais pas comment expliquer..." ta voix tremble légèrement, trahissant ton insécurité. Les mots se bousculent dans ton esprit, mais les articuler semble une tâche monumentale. Tu inspires profondément, les muscles de tes épaules se détendant lentement. Les mots se forment enfin. “J’ai pas envie de cacher qu’on est ensemble…” C’est pas tout à fait ça. C’est pas si simple. C'est une toile complexe de sentiments qui s'entrelacent et se heurtent. Parfois violemment. Parfois silencieusement. Des perles de peur. Des bourgeons d'espoir. Des cailloux d'angoisse.

Il est dans le placard. Et toi juste devant. Face à lui. La porte est ouverte, mais tu ne peux pas t'y engouffrer. Et tu peux pas non plus l’attirer à toi. Il suffirait pourtant d’un pas. L’éternelle séparation. Habituellement, la porte n’est juste ouverte et vous allez et venez sans questionnement. C'est simplement un placard à l'intérieur d'une chambre. Que tu sois à l'intérieur ou à l'extérieur, tu es toujours dans la même pièce. Mais sous le regard d’un autre, la précision prend de l’importance.

“ici … on peut être… nous, t’sais ?” Nous à la ramasse. Nous bordélique. Mais nous. Ta question résonne dans la pièce, suspendu entre vous deux comme une fragile bulle d'émotion. Tu te concentres sur les sons subtils qui accompagnent ses réactions, les respirations, les inflexions. C'est comme si tu pouvais presque le voir à travers ces signaux subtils, comme si l'obscurité n'était pas une barrière insurmontable entre vous deux.