désir hématome (Sil)

Ezio, il est encore d'sortie ce soir. Son coeur est à la fête. Pas comme la dernière fois. Pas comme avec Lia. Non, aujourd'hui, il a un fin rictus qui anime son minois cerné. Il n's'est pas senti comme ça depuis un moment. Il a l'impression d'être léger. Qu'les poids sur ses épaules, qui compriment son torse, ont disparu en quelques secondes. Il sait pas si c'est l'alcool qui parle ou la fumette. Il en sait rien et il veut pas savoir. Ez', il l'vit, c'est tout. Il lâche des rires courts et rauques quand ses collègues tentent une blague. Il admire les jolies filles qui se trémoussent, s'arrêtent devant lui. Ouais, Ezio, il se sent fort, indestructible. Il s'laisse l'âme vagabonde. Errant dans les airs sans jamais se poser. Mais quand il voit son verre vide, il grogne comme un animal sauvage. C'qu'il est de base. Il a soif et une flemme monumentale de se déplacer. Mais c'est certainement pas les autres qui vont le faire. Alors il s'lève sans grâce, faisant grincer sa chaise. Il avance docilement, ses pieds connaissant le chemin par coeur. Il fait attention à personne cette fois-ci. Il n'pense qu'à l'alcool. Et une fois arrivé au comptoir, il dépose sa carcasse dessus. L'serveur approche aussitôt, pas besoin de patienter, c'est c'qu'il aime ici. « Whisky sans glace, tu s'ras mignon.» des paroles tremblantes. Des lèvres qui s'écorchent. Il fait plus attention à c'qu'il prononce. De toute façon, il s'en fou. Pourtant, quelqu'un l'a bien entendu. Des mots qui ont eu un poids plus important que c'qu'il désirait. Parce que Ez', il l'voyait pas de cette manière. Il y a jamais pensé. Mais pas cet homme qui se tient à ses cotés. « Je savais pas que c'était ton truc tout ça..» qu'il lui dit d'une voix presque suave. Ezio, il fronce les sourcils. Idiot sans cerveau. Il n'arrive pas à réfléchir. Alors il hausse simplement les épaules, considérant cette action comme une réponse. Mais l'inconnu, il l'prend encore différemment. « Tu sais, ça peut être intéressant si t'en as envie..» qu'il ajoute en se rapprochant d'une manière délicate. Sauf que cette fois-ci, Ez', il capte. Son cerveau s'allume, ses neurones s'actionnent. Malentendu. Confusion. Il n'sait pas quel mot employé pour décrire ce qui vient d'se passer. Mais Ezio, il est pas apte à rester calme. Pas avec de l'alcool dans le sang. « Mais t'es malade, sale con ! Dégages de là ! » qu'il crie en se reculant comme si l'inconnu était devenu la peste à fuir. Et au fond d'son coeur, c'est l'cas. Alors il s'éloigne, le dos courbé, le regard noir.

T’as l’coeur esseulé depuis qu’maya a crevé. C’est drôle, parce que tu la connaissais plus vraiment. Elle était plus qu’un visage parmi d’autres. Un doux souvenir. Mais sa mort a rouvert les mauvaises blessures. Celles jamais cicatrisées. Et tu remets toute la faute sur la substance. Putain de substance. Celle qui t’a pris tes parents. Ta vie. Ton futur. Et celle qui s’attaque maintenant à tes amis. Alors t’as envie d’boire. D’oublier un peu. Juste un peu. T’égarer dans la boisson ambrée. Ou entre les cuisses d’une jolie poupée. Ce soir, tu bosses pas, et ça t’arrange bien. T’avais aucune envie d’voir leur gueule de dégénérés. Non, ce soir, tu sors. Et tu vas t’défouler. A coups de poings ou à coup de reins. Tant qu’il y a l’ivresse.

L’alcool coule dans tes veines, remplaçant peu à peu l’sang. Tu papillonnes vaguement dans la pièce sans que ton regard ne s’arrête sur une seule personne d’intérêt. Si futiles. Alors c’est ça l’monde ? Butter les âmes qui brillent et garder les autres ? Tu portes ton verre à tes lèvres. T’y penses encore. T’y penses toujours. Tu grognes vaguement lorsque ton regard s’arrête sur eux. Le barman qui t’a sucé dans l’arrière salle y’a quelques mois. Et puis Ezio. T’observes la scène avec un intérêt nouveau. Ce soir, on dirait que t’a trouvé ton terrain de jeu. Ton sourire se décide enfin à revenir. Et tu débarques dans l’arène comme une diva. Tu passes ton bras autour du cou d’Ezio, l’attirant à toi. Comme un vielle ami. Ou un bel amant. « Tu fais ta prude, bébé ? » Tu fais pas dans la discrétion. Ta voix s’élève. Mielleuse. Rieuse. Les regards se tournent déjà vers toi, détectant les emmerdes à venir. Et les gens, ils aiment ça. Observer. Qu’ils regardent bien. Parce que le spectacle ne fait que commencer. Ce soir, t’es là pour jouer. T’es là pour perdre. Alors tu joues à fond. T’en rajoutes encore un peu. « Tu m’avais pas dis qu’tu voulais en gouter d’autres ? » Tu souris largement. Allusion difficile à rater. Ce soir, tu fais dans l’autodestruction. Ou la destruction mutuelle. Peut-être que t’en profite aussi pour régler une vieille rancune. L’agacement de l’avoir apprécié un instant avant d’te faire jeter pour une raison inconnue. Alors tu l’entraines avec toi dans tes emmerdes. Dans ton besoin d’foutre la merde où tu peux. Juste pour oublier le reste.

Il voulait juste profiter. se sentir apaisé sans avoir tous ces poids qui lui compriment la poitrine. ez', il avait la tête ailleurs. l'esprit voyageur. il était bien, ce soir. il était joyeux, aimable. trop d'sourires qui se cognaient contre ses lippes. trop d'pensées positives qui s'agitaient dans son cerveau. c'était rare. c'était beau. mais ça n'a pas duré longtemps. ezio, il aurait aimé qu'ça continue. cette euphorie bancale. il aurait voulu qu'ce sentiment si bâtard dure toute la nuit. mais cet inconnu a tout fait basculé. une incompréhension. un malentendu et le bonheur a foutu l'camp. maintenant ez', il s'retrouve avec cette émotion trop connue. avec cette amour pour la haine, la colère. parce que clairement, il rage l'gosse. il sent son sang chauffer. mais c'n'est rien comparé à c'qui suit. s'il avait su. il aurait tout stoppé. s'il l'avait vu, il se s'rait tiré bien avant. mais non. ez', il était perdu. loin, très loin dans son monde. alors quand sil s'approche de lui, son expression tombe. quand sil passe son bras autour de son cou, ez', il a l'coeur en vrac. il tente de comprendre le gamin. il essaie d'éclaircir c'qui se passe. mais la réponse ne lui plait pas. clairement pas. « attends quoi..? » qu'il lâche comme une furie. paroles qui s'extirpent rapidement de ses lèvres. poings qui se serrent pour enfoncer ses ongles dans la chair. ez', il bouillonne. à quoi joue-t-il ? qu'est qu'il fout ? les mots de sil tambourinent dans son esprit. ezio, il a envie d'rire. un rire forcé qui dégage cette noirceur qui le consume. il pensait avoir touché le fond, il a eu tort. « j'te jure sil..ta gueule.» qu'il balance sans pour autant bouger. parce qu'au fond, cette proximité l'intrigue. parce qu'au final, il sent son corps se battre en duel contre deux sentiments distincts. la rage et le plaisir. et il est perdu l'gamin. il n'sait plus sur quel pied danser. rester ou partir. l'insulter ou le complimenter. le haïr ou l'aimer.

La vérité, c’est qu’t’as sacrément bu. T’es passé d’la bière à plus fort. Ce soir, t’as envie d’rien t’souvenir. Ce soir, t’as envie d’oublier jusqu’à ton prénom. Ce prénom à con donné par une mère camée. De toute façon, ce soir, tu rentreras pas. T’iras surement t’écrouler quelque part dans une rue dégueulasse à attendre la mort. Mais tu rentreras pas, parce que tu sais qu’ça lui ferait du mal de te voir dans cet état. Peut être que tu ferais mieux de chercher l’oublie auprès d’une jolie fille. Ou d’un joli garçon. Peut importe. Juste de quoi te perdre dans d’autres draps. Tu devrais ouais. Ca serait p’tète plus sain. Et encore. Mais faut croire que t’as jamais été comme ça. Qu’il faut toujours que tu choisisses la solution la plus merdique. Genre, t’foutre en l’air et emporter l’ambiance à la coloc avec toi. Comme ci c’était pas déjà la merde. Mais non. Faut que t’en rajoute encore. Encore et encore. Jusqu’à tout faire exploser.

« Bin quoi ? » Tu souris largement lorsqu’il t’repousse, Ezio. Là. Avec colère. T’aimes bien la voir, sa colère. Peut-être parce qu’elle reflette la tienne. Celle à l’intérieur qui sait pas bien comment s’exprimer. Alors tu l’aimes bien sa colère. Cette lueur brulante au creux des yeux. Tu voudrais qu’elle brule plus encore. Plus fort. Tu voudrais qu’elle vienne cramer la tristesse qui t’bouffe à l’intérieur. Qu’elle se mêle à la tienne pour ne forger plus qu’un énorme feu. Une putain de tempête. Alors tu t’fous en face de lui. Haussement de sourcil provocateur. Tu souris même lorsque t’attrapes son menton entre tes doigts. Ca pourrait être affectueux si ça n’était pas tout l’contraire. Provocation ultime. Tu lui claques un smack sur les lèvres. Comme pour le punir d’jouer au con. Pour l’punir d’avoir été assez proche de toi pour quelques semaines avant d’se comporter comme le dernier des connards. Sauf que dans l’jeu des connards, tu l’battras toujours, t’en es persuadé.  « Fait pas ta mijoré, bébé. » Tu t’fais mielleux. Autours de vous, ça rigole vaguement, mais l’attention est vite détourné. Parce que la vérité, c’est que la plupart des gens, ils s’en foutent royalement. Mais ça, les Ezio, ça le comprend pas vraiment. Y’a que l’barman qui a encore le regard rivé sur vous. T’sais pas trop si ça l’fait juste bandé ou s’il s’inquiète franchement de ce qui va s’passer. Parce que c’est pas compliqué de sentir la tension. C’est pas compliqué d’savoir que ça va surement mal tourner. Aller. Frappe moi. J’le vois que t’en crève d’envie.