prisme de lune (kitty)

- la tête tournée vers les étoiles -
Prends ma vie Denis, vas-y sers-toi un coup pour voir si tu tolèrerais la moitié de ce que j'ai vécu. Fais pas trop le malin, tu sais que tu as tord et j'veux pas t'entendre gindre. T'as tout pour être heureux, alors dévore la vie Denis, bouffe là morceau par morceau, avant que ce soir quelqu'un d'autre qui te bouffe. T'es qu'un maillon de la chaîne, un de plus tout comme moi, donc prépare toi à vivre enfin. Sourire au lendemain sans complainte. Déverser sa joie sur les autres comme j'aime le faire sur toi. Prends ta mère en exemple, pas la mienne. Soit prêt à tout même aux pires moments. Tu trouveras toujours le moyen de venir à bout de la négativité. Crois-moi, j'étais pas prête à partir, j'pensais pas tout quitter d'un coup non. Mais j'ai pas eu le choix, ce sont eux qui m'ont forcé, j'avais pas le choix tu le sais. On dit que ces gens là on le cœur pur, qu'ils sont plus proches de dieu que son fils lui-même. Des disciplines honnêtes et braves, ardus au travail et priant sans démesure. Je n'étais pas comme eux, j'ai toujours essayé d'échapper aux principes religieux. Ils n'ont rien compris. Quand j'ai demandé à devenir une artiste, ils m'ont bafoué. Quand j'ai demandé un piano,  ils se sont moqué. Et quand j'ai tenté de leur expliquer, ils m'ont enterré sous silence. Ils pensaient être les seuls capables de régir ma propre vie. Et les voilà dépourvus. J'ai mis tant de choses de côté, éliminés trop de rêves pour un gars qui n'existe probablement pas. Alors j'ai quitté le nid un soir, sans vouloir le retourner, sans même un mot pour caresser leurs âmes une dernière fois. Je suis partie loin de leur vie, loin de ma famille. Mes pieds ont dévalé les pavés à une vitesse impressionnante. J'ai marche longtemps, pleuré beaucoup. J'irais pas dans les détails mais, cette course n'a pas épargné ce corps trop frêle. Il a vécu un peu trop en si peu d'instant, il a subit énormément et parfois même sans consentement. On me disait trop jeune pour savoir ce que je faisais, trop naïve pour voir le nez du diable en personne. Alors j'ai abdiqué devant ce monde ou rien ne va. Ou on tombe souvent mal née. Pas de pardon pour les têtes brûlées, les filles déréglées. Sauf que là n'est pas la fin de l'histoire. J'ai perdu la foi, enfin celle que je n'ai jamais eu. Et j'ai pu découvrir la vie, la vraie. Avec ses hauts et ses bas, ses jours de pluie et ses quelques rayons du soleil. Une main tendue quand l'autre vous pointe du doigt. J'ai vécu au delà des barrières que ma vie me consolidaient jusqu'alors et mes chaînes se sont brisées ce jour là. Jour de peine intense devenu danse de joie. Respirer vaut la peine d'essayer, pleurer donne la force d'y croire, mais c'est surtout la joie qui pousse à continuer. On y prend goût lorsque l'on y prête attention. L'infime secret deviendra polichinelle tant que le reste du monde s'attardera sur la manipulation des âmes. Mais moi tu sais, je profite sans convenance. Ma route m'a mené non loin de la décadence, trop proche d'un lieu de perdition. C'est ce que les gens normaux disent. Sauf qu'ils viennent tous, s'agglutinent dans les alcôves pour venir découvrir les prémisses de l'envoûtement corporel. C'est beau à voir malgré le vice. C'est redonner de l'entrain aux vivants, tout en sécurité. Je n'aimais pas danser avant, les traditionnelles m'ennuyaient amèrement. Et puis j'ai découvert celle du félin fort et suave, les rythmes du sinners troublant. Depuis je danse comme je n'ai jamais dansé, je me laisse porter par la latence du moment, éclairée par les néons accusateurs. Je vole au dessus de la perversité, sans douter que les cœurs battants en dessous ne sont pas des saints. Mais je n'ai jamais trouvé meilleure place ni meilleure endroit pour m'y lover, enfin chez moi.