- alma xxx :on l'a eu, notre bonheur.il porte peut-être encore leur alliance sur lui.
par habitude, malgré les années.
pour ne pas oublier.
ce matin, en sortant du tribunal.
quand ils se sont assis face à face, table en formica d'un diner banal.
il avait juré de ne pas pleurer.
que c'était pour le mieux, que c'était pour eux.
parce qu'il savait ce qu'il devenait.
parce que ce n'était plus vivable.
qu'il les briserait, avant de s'en croire capable.
elle a embrassé sa tempe.
comme un enfant.
elle a caressé ses boucles absentes.
il fallait laisser les plaies suinter.
cicatriser, pour pouvoir à nouveau se regarder.
des mois lointains, de vieux souvenirs.
leur jeunesse et leurs rêves.
ils n'ont peut-être pas tout raté, puisqu'il y a cette fille.
ils n'ont peut-être pas tout manqué, puisqu'ils se parlent encore.
puisqu'elle s'inquiète parfois.
pour ce vieil ami, celui d'une autre vie.
cet homme qu'elle a connu, il y a longtemps de cela.
puisqu'il se soucie encore.
de celle qui le remet toujours à sa place.
de celle qui s'assoie à ses côtés, les pieds dans le vide.
un verre à la main, même si elle le prévient.
de ces petites choses qui ont décousues les liens.
on n'était pas fait pour ça.peut-être qu'il avait raison.
peut-être qu'il ne la méritait pas.
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- charlie harper : à ma fille,
charlotte.
la chair de ma chair,
mon souffle et mon sang.
peut-être qu'un jour, tu m'excuseras. tu comprendras. peut-être qu'un jour, je serai vieux.
assez vieux pour avoir tout oublié, de ce qui m'empêche parfois de t'aimer.
avec des rides sur le visage et de l'arthrose aux mains.
et tu m'appelleras encore "papa."
et je te verrai encore comme une enfant.
celle que je n'ai pas vue grandir.il faudrait avoir les mots, pour tout lui dire à temps.
lui dire combien il l'aime, et combien il a peur.
qu'elle ne s'envole trop vite, qu'elle ne vive déjà trop fort.
qu'elle ne connaisse jamais vraiment les erreurs des hommes de la lignée.
lignée qu'elle a réussi à briser.
plus de garçon en aîné.
et peut-être enfin la mort d'une malédiction.
n'écoute pas ce que les gens te disent.
surtout pas moi, même si j'en rêverai.
et prends exemple sur ta mère.
sauf pour ses choix en amour.
tu seras meilleure que nous.il a été absent, trop de temps.
trop d'années, comme un mirage.
une figure dans la brume.
et aujourd'hui, il court après.
les secondes, les minutes.
pour se racheter, mériter ce rôle.
sans voir que ses efforts ne servent à rien.
j'ai gardé chaque lettre que tu m'as écrite.
tes dessins maladroits et tes baisers de papier.
il y a toujours la photographie de ton premier souffle dans mon porte-feuille.
avec du sable, de la terre, de la poussière.
décolorée par les larmes et le soleil.-- -- -- -- -- -- -- -- --
- niki moon : je n'ai rien à offrir.elle sourit.
il suffit de se taire, de laisser les mots couler.
alcool après alcool.
elle est si jeune, la fougue et le feu.
le monde à ses pieds.
c'est une enfant.
pourtant son corps danse.
ses lèvres embrassent.
et son sang bruisse.
dors-tu déjà ?
c'est l'insomnie.
les nuits arides.
en solitaire.
crois-tu encore ?
je ne suis rien. bientôt mort.
pleures-tu parfois ?
ça s'entend dans ta voix.
ta voix de femme trop forte.dérive et désastre.
les silences en absence.
prison jusqu'à l'aube.
celle de ses bras, celle de son corps.
celle de ses draps, celle de ses peurs.
la fille d'un homme.
elle n'appartient à personne.
et sous le vernis, les écailles.
le lavis et les repentis.
de sa silhouette sibylline.
de ses hanches assassines.
fais taire les monstres qui dorment.
chaleur humaine, retour au port.
il faut bercer à l'eau salée les coups de poignards.
ceux qui constellent les dos fatigués.
rincer dans les ruisseaux les paroles trop souvent proférées.
nourrir à nouveau les ventres vides.
du miel et du lait sur la langue.-- -- -- -- -- -- -- -- --
- rory raynes : quel est ce jeu, auquel tu joues ?elle n'a plus l'âge des poupées et de la porcelaine.
et pourtant ses joues rosées lui rappellent encore l'enfance.
ses cris, ses rires, les vieux souvenirs.
cette fille qui a grandi dans le coin de son oeil.
pas encore une adulte, plus vraiment une enfant.
quel est ce jeu, rory ?
tu es la famille, au même titre que ton père, au même titre que les autres.
pourquoi me regardes-tu ainsi, lever de soleil ?
l'insistance de tes prunelles, une enclume pendue à mes ailes.
tu ne comprends donc pas, rory ?
que ces choses sont insensées, insensibles.
je ne fais que veiller, ma fille.et elle se délecte, sans doute.
de ses épaules nouées et de son regard absent.
de sa présence dans la maison trop grande, à sa merci, complètement.
là pour son bien, là pour les siens.
elle fait danser ses doigts de pianiste sur ses nerfs déjà trop usés.
tu la détruiras, aube.
regarde le chemin que tu empruntes, retourne-toi seulement.
je ne peux plus courir après toi et après elle, depuis longtemps maintenant.
alors pourquoi crois-tu encore qu'il s'agisse d'une bonne idée ?
tu l'entraînes dans ton gouffre, celui que tu ouvres un peu plus chaque jour à mes pieds.
je ne peux pas répondre à tes questions de corbeau.
les cadavres doivent rester sous terre et les squelettes dans la poussière.sorcière infâme, magicienne et vieille âme.
l'adolescence fait des chiffons des monstres inanimés.
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