les anneaux de saturne. (felix)

les étoiles.
c’est haut, les étoiles.
c’est beau, les étoiles.
c’est indomptable, les étoiles.
c’est intouchable, les étoiles.
jacqueline, elle aimerait bien en être une, d’étoile.
mais la vie sur terre, c’est bien aussi.
on doit s’ennuyer quand on est une étoile.
jack sourit quelques instants en entendant les bruits de la salle d’arcade.
y’a une porte derrière le bâtiment – une porte qu’on a pas le droit d’emprunter, mais jack et la loi ça fait deux – qui mène au toit. c’est pas le plus confortable qu’elle connaisse, c’est pas le plus haut non plus, mais on y voit suffisamment bien le ciel découvert.
elle trouve une certaine poésie dans cet endroit.
parce qu’il y a beaucoup de vie. parce que c’est un moyen comme un autre pour jack de renouer avec une vie sociale.
sans ses ventes de bonbons, jacqueline deviendrait folle. enfermée derrière son écran d’ordinateur, les opales fixées sur les petites lettres perdues dans un bouquin trop gros à la bibliothèque… il y a bien les contacts nécessaires au chapardage d’informations – les relations qui se tissent contre quelques billets ou un échange d’informations ; des photos compromettantes contre un nom – mais ce n’est jamais vraiment pareil qu’un instant de vie comme celui-là.
alors jacqueline se laisse bercer par le bruit des bornes d’arcade qui tournent à plein régime.
par ces fortes chaleurs, jack laisse balader ses jambes dans le vide et le vent frôler ses bras dénudés. et elle attend, fermement, déterminée.
elle attend que le chat de gouttière vienne la retrouver.
c’est ce genre de relation – épisodiques – qu’elle affectionne le plus. le genre de relations où on ne se connaît pas vraiment… où on ne doit pas révéler honteusement qu’on est recherchée par la police pour délit de fuite de prison. ce genre de moments où on ne doit pas avouer – non sans une certaine fierté – faire partie d’un gang qui enchaîne les délits, en voyant la peur apparaître dans les rétines de son partenaire de la soirée.
jacqueline, c’est sans doute pas une fille que son homologue masculin aimerait côtoyer si jamais il la connaissait vraiment. de toute façon, si les baisers s’additionnent sans plus aucune timidité, ce garçon ne serait peut-être pas quelqu’un dont voudrait jacqueline non plus.
jacqueline ne veut personne, après tout. dégoûtée de la sexualité à force de la voir être pratiquée. dégoûtée des flirts sans se priver d’user de ses charmes si nécessaires. parfois, jacqueline se fait l’effet d’une prostituée. à minauder, remuer exagérément les hanches pour obtenir l’attention d’un homme et d’autres faveurs… ne jamais se donner entièrement, juste jouer. comme une petite catin qui remue du popotin sur le trottoir.
elle soupire un instant, le moral tout à coup parti faire une virée en enfer.
elle espère qu’il viendra ce soir.
parce que ces rendez-vous sporadiques ne sont jamais prévus. parce que ces rendez-vous sporadiques se font aux grés du vent.
mais ce soir il y a une éclipse. alors peut-être qu’il viendra.
sinon, jack n’aura plus qu’à se consoler avec quelques bonbons.