il faudra bien mourir et me finir entre tes lèvres. (Raf)

J'avais les mains froides à c'qu'il paraît - ou bien l'esprit juste embrouillé. J'sais pas, j'arrive plus à savoir ; ni à réfléchir correctement. J'passe mes journées à réparer des bagnoles, j'arrive à comprendre comment connecter un fil avec un autre. Pourtant, quand j'dois essayer de donner un sens à mes actes, j'me retrouve le coeur aussi noirci que mes doigts après une journée d'boulot. J'repense encore une semaine après à ses yeux ; ou plutôt ce regard qui se pense impénétrable. Pourtant, on voyait bien à sa façon de s'pavaner qu'elle n'attendait que ça - qu'un p'tit con comme moi vienne embrasser ses reins.
J'ai voulu jouer, j'ai voulu goûter, lécher son échine jusqu'à tanguer d'ivresse.
Mais des mots ont coulé entre temps, des bribes d'âme qui m'ont griffé la joue tant j'les appréciais.
J'voulais plus être cet énième être ;
J'voulais pas que la noirceur vienne gratter sa mémoire l'aube venue.

Alors les phrases amers ont coulé - j'ai retiré mes doigts de mon verre et mon regard du sien. J'avais peur,
peur d'me noyer,
d'partir à la dérive,
d'plus savoir comment nager.
J'connais même pas son prénom, mais j'sais qu'il a le goût de la mer. Quelques syllabes salées qu'on n'est pas foutu d'attraper ; cette fille, elle coule entre les doigts du monde. Semblable à des vagues, elle fait de longs va-et-viens dans la réalité - parfois rattrapée par des ouragans qui détruisent tout ; surtout elle. Sauf qu'cte fille, elle va tout faire pour s'persuader qu'elle n'a rien senti.
Comme la mer, comme l'océan, elle est infinie, elle est longuement parcourue - mais vite oubliée.
Parfois certains marins doivent s'être accrochés,
mais elle, elle ne fait qu'effleurer leur p'tite barque.
Elle, elle n'a besoin de rien ; si ce n'est d'exister.

J'me dis ça en finissant un vieux boulot pour lequel j'avais pris du retard, puis j'réalise combien j'me fais des idées. P'tet que dans quelques semaines, j'aurai tout oublié ; puis elle, elle a certainement dû trouver un nouveau batard à aller baiser.
J'essuie mes doigts pleins de merdes grisâtres avant d'aller vers l'entrée du garage où j'ai entendu quelqu'un arriver.
J'me retiens de me gratter les yeux pour vérifier si je n'rêve pas.
Un rictus me bouffe le visage ; parce que j'suis un putain de con pas foutu d'réussir à montrer ce qu'il s'passe vraiment au fond.
Le ton presque enragé, j'balance:

- Ouais c'est pour quoi ?