marche funèbre // aira

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too cold to live, too young to die.

nuit sombre. y a pas d’étoiles ce soir. juste la lune pour veiller sur nora. juste la lune pour lui rappeler qu’elle fait un truc qu’elle ne devrait pas faire. y a que l’ombre de la culpabilité au fin fond du palpitant, que l’ombre d’un regret qu’elle n’aura que bien plus tard, celles que nora tente d’enfouir par tous les moyens. mais y a l’air dur sur le visage de la gamine, celle qui pense savoir où elle va. celle qui pense savoir ce qu’elle fout là. y a ce même sweatshirt porté encore et encore, troué, déformé, qui cache la main tremblante, nerveuse, le poing serré autour du vieux téléphone, en attente d’un sms. d’une réponse qui lui confirmerait qu’elle se lance pas à corps perdu. que ce qu’elle fait n’est pas si dangereux. alors elle s’y rend ce soir, l’esprit presque certain. ouais, ça ira. comme toujours. elle sait pas pourquoi ils ont convenu des rails comme lieu de rendez-vous, nora. peut-être à cause de la proximité de leur vieille baraque, sans pourtant s’attirer les regards des curieux. elle sera sûre d’y avoir la paix nora. personne pour venir la faire chier. personne pour la regarder de travers. et surtout personne pour piper mot à qui que ce soit. elle compte sur lui, la gamine. elle a pas l’choix. et y a comme une honte dans le coeur de nora, quand elle tape du pieds, seule au monde au milieu des rails abandonnées. elle sait bien qu’elle devrait pas faire ça. qu’elle devrait pas être là. nora, elle s’en fout. y a ce creux au fond d’elle qui la persuade que c’est une bonne idée. que ça lui servira. parce que y a personne d’autre pour la sauver. nora, elle se sauve elle-même où elle crèvera sur le côté du pavé. alors quand elle voit la silhouette se profiler au loin, y a le palpitant de nora qui s’emballe. c’est pas trop tard pour faire marche arrière. mais y a toujours que l’expression impassible sur le visage de la gamine, que la rage qui grouille au fond de son ventre. c’est pas trop tôt qu’elle grogne tout bas, grognon. y a le coeur de la gamine qui est prêt à se détacher, trop impatiente. pourtant, elle montre rien, rien que les poings serrés dans les poches de son sweat, rien que les genoux fou, incapables de tenir en place. l’espace d’un instant, elle écoute le silence qui les entoure. étrange. glacial. et puis enfin, elle craque. t’as ce que je t’ai demandé ? coup de menton dans sa direction. y a pas de temps à perdre. faut mettre fin à son calvaire, nora elle tient plus. elle doit la voir, elle doit la toucher, en sentir le poids dans sa main. les armes qu’elle a souvent croisé au sinner, coincée dans la ceinture d’un jean ou bien planqué sous la table, en cas de problème. celle qu’elle lui a demandé de lui ramener, parce que nora, elle se sent glisser. et y a que comme ça que les siens survivent. que comme ça qu’elle s’en sortira aussi. le jouet des morts, pour mieux se défendre des vivants.

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too cold to live, too young to die.

il n'a jamais la paix ali. parce que même quand il n'a visiblement rien pour venir occuper ses pensées. malmener son cerveau. se jouer de sa raison. y'a un truc qui arrive. y'a quelqu'un qui vient foutre son bordel. cette fois, c'est nora. nora qui lui demande un service. un truc qu'il n'aurait jamais du accepter. réellement. truc qu'il finira par regretter, au moins un peu. il le sait. elle finira par faire une connerie nora. c'pas un truc pour elle tout ça. et y'a une voix qui hurle ces mots à la mort. dans un coin de sa tête. qui lui dit de laisser tomber ça. d'l'envoyer chier quand elle viendra réclamer son dû. mais le gamin, il persiste dans sa connerie. comme toujours. fonce tête baissée. parce que la gamine, elle est grande. elle devrait pouvoir s'en sortir seule. savoir ce qui est bon, ou non pour elle.
alors ali, il s'arrange. pour chopper une arme. sans vraiment développer pourquoi il en a besoin. besoin d'une nouvelle arme. il dit rien. se contente d'hausser les épaules. ali, on sait pourtant qu'il a la putain de tendance à faire d'sacrés conneries. mais on le laisse faire. on le laisse enchaîner les conneries sans vraiment s'en soucier pour le moment. mais ali, il sait que ça finira par se savoir ça. qu'ike ou sil finiront par l'apprendre. et lui faire la morale. ou essayer de le faire. ali, il file. l'arme soigneusement cachée sous son large sweat. juste à côté de l'autre. de la sienne. gamin armé jusqu'aux dents. et il peut pas s'empêcher d'se marrer en imaginant les flic venir le fouiller et tomber là-dessus. pensées tordues. clairement. pensées de circonstance pourtant. il n'a pas le temps de traîner ali. déjà en retard. elle peut bien attendre d'toute manière. les rails qui se profilent au loin. une silhouette qu'il reconnait rapidement. l'échange fait à l'écart de tout. l'échange qu'ils ne voulaient pas faire à la maison. pas sous le nez des autres. il s'approche. tranquillement. distingue finalement le genou de la gamine qui ne tient pas en place. nervosité sûrement. gamine qui n'a vraisemblablement pas l'envie de rester bien longtemps ici. qui n'a pas envie d'attendre avant de se retrouver en possession d'sa nouvelle acquisition. mais il répond pas ali. pas à sa question. fais pas d'connerie avec. j'ai pas envie d'me retrouver dans la merde pour ton cul. clair. net. la voix neutre. cacher l'fait qu'au final, il s'inquiète un peu. pour elle. pour ce qu'elle pourrait faire. pour tout et n'importe quoi. mais il ne peut pas l'afficher. vraiment pas. ali, il glisse sa main au niveau de son dos et en extirpe l'arme destinée à la gamine. ses doigts qui s'enroulent autour. pour le glisser à la vue de nora. arme banale. un peu plus légère que les autres. évites d'faire la maligne avec. à l'sortir à tout bout d'champ. parce que ça serait bien son genre à nora. mots qui franchissent ses lèvres sans qu'il ne lui donne pour autant l'arme.

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too cold to live, too young to die.

elle le voit arriver, au loin. et y a son palpitant qui prend un coup de matraque, parce que c’est trop tard maintenant pour reculer. trop tard pour se dégonfler. et nora, jamais elle paraîtra faible devant qui qu’ce soit, certainement pas lui. alors elle reste là, plantée comme une allumette. stoïque. tremblante à l’intérieur. c’est le pas de trop. le flirt avec le danger qui prend une place un peu plus importante. trop d’importance, sûrement, pour qu’elle puisse y changer quoi que ce soit. y a une partie d’elle qui se persuade qu’elle en a pas vraiment besoin. pas vrai ? elle pourrait s’en sortir, des coups de pieds balancés dans les airs, à l’aveugle. des coups de poings pour éloigner, des morsures pour créer la douleur. et y a cette autre partie, plus réaliste, plus sombre aussi. celle qui a vu tomber tous les amis, un à un. aux mains des flics ou à celles des voyous. nora, faut bien qu’elle se rende compte. elle s’en sortira pas. pas comme ça, pas sans rien. alors ça, ce truc qu’ali lui ramène, ce flingue qu’il cache aussi bien que le sien, elle en a besoin. monter un peu plus haut dans ses tours de défense, prouver qu’elle est pas qu’une fille. pas qu’une gamine. nora, elle s’bat comme les bonhommes, avec la fierté des hommes et les droites des gamins nerveux. y a que comme ça qu’elle survit. que comme ça qu’on la respecte. t’occupe pas d’moi, tu m’le files et on oublie. c’est dit sur le même ton, sec et agacé qu’il réponde pas à sa question et qu’il lui fasse pas confiance. impatient, aussi, parce qu’il lui donne pas ce qu’elle veut. ce qu’elle attend. y a l’arme toujours pas dans le champ de vision et nora se demande s’il se fout pas de sa gueule. y a la colère qui monte d’un cran, le volcan toujours sur le point d’entrer en éruption. et le coeur qui fait bang bang, quand elle le voit soupirer pour chercher son dû planqué dans son dos. y a les yeux noirs de la gamine qui brillent d’un reflet étrange, au reflet de la lune. bang bang à nouveau, les billes rivées sur l’ombre noire dans la main d’ali. l’truc qu’il refuse de lâcher. alors elle tend la main nora, elle l’attrape sans qu’il le lâche pour autant. elle doit forcer un peu pour qu’il lâche enfin prise, et nora, elle grogne un peu avant de récupérer l’objet dans ses mains. c’est la première fois qu’elle en voit un, vraiment. d’aussi près. pas à la télé. elle répond pas à son attaque, elle se contente de rester concentrée sur le flingue, comme pour vérifier que c’est bien un vrai. pas juste une blague qu’il paierait très cher. il est chargé ? elle lève pas les yeux la gamine, elle ouvre un peu maladroitement la chambre pour vérifier d’elle-même. trois balles, il a déjà servi. elle dit rien. elle galère un peu, nora, mais elle prétend tout y savoir. pas passer pour une conne. pas le faire changer d’avis non plus. et nora, l’espace d’un instant, elle se dit qu’elle lui doit sûrement une fière chandelle. qu’il tient un truc au-dessus de sa tête, avec ça, qu’il a de quoi lui faire fermer sa gueule sur n’importe quoi. mais elle le dit, pas comme elle sait pas dire merci, la gamine. c’est bien trop douloureux. il est où, le tien ? coup d’oeil intéressé, les yeux droits dans les siens. la tête qui se relève à la va vite et la curiosité qui gratte au fond du ventre de la gamine, de se voir tomber dans le mal et d’aimer ça.

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too cold to live, too young to die.

il sait pas pourquoi il fait ça ali. ce qui le pousse a toujours se foutre dans des histoires de merde. prendre des décisions à la con qui finiront par venir foutre la merde partout. dans sa vie. toute sa vie. récolter la tempête. il le cherche. toujours. sans même le savoir. sans même s'en rendre vraiment compte surtout. là, il s'enfonce dans sa connerie. creuse encore alors qu'il s'est déjà mis au fond du gouffre. gamin qui va se retrouver dans une sale situation. d'ici quelques semaines. quand la nouvelle va arriver aux oreilles d'ike. ou de sil. là, il fera moins le malin ali. peut-être. parce que c'est même pas sur en fait.
il marche. marche. marche vers sa perte sûrement. vers la perte de la gamine surtout. une arme entre ses mains, c'est pas une bonne idée. et il le sait. mais il persiste. va jusqu'au bout. parce qu'il a déjà l'arme avec lui. soigneusement cachée sous son haut. ample. deux armes à cacher, c'est jamais simple. le métal froid qui vient rencontrer sa peau. mais il ne bronche pas. pas le temps pour ça. il a rendez-vous avec nora. aux rails. coin éloigné. où personne ne viendra les chercher. personne ne vient par là surtout. il s'approche. distingue nettement la gamine. elle ne tient pas en place. impatiente. ou nerveuse. il sait pas. il ne demandera pas. ça c'est certain. ali qui se pose en face d'elle. qui se méfie. lui demande de prendre ses précautions. de ne pas faire de conneries. elle ne le rassure pas pour autant. j'rigole pas nora. fais pas d'conneries. j't'aurai à l’œil d'toute manière. l'arme entre ses doigts. la possession d'une arme qui ne le choque même plus. qui ne lui fait plus rien. triste habitude. une quasi lassitude. il garde l'arme entre ses doigts. refuse de la donner à la gamine pour le moment. sauf qu'elle n'est pas de cet avis. elle tire sur l'objet. pour l'avoir enfin en sa possession. s'approprier son bien. elle tient l'arme entre ses doigts, l'observe. ali, il ne la lâche pas des yeux. attentif à chacun de ses mouvements. prêt à parer n'importe quelle connerie de sa part. pose une question. s'il est chargé. la question ne se pose même pas. il n'aurait pas prit une arme sans balles. il aurait été sacrément accueillit avec la gamine sinon. il l'observe fouiller, ouvrir la chambre et observer le tout. tu penses sérieusement que j't'aurai donné une arme sans balles ? et au final, il s'dit qu'il aurait peut-être du faire ça. venir sans balles. lui laisser juste l'arme. qui serait devenu quasiment inoffensive. t'es sûre qu'tu vas t'en sortir ? gamine qui n'a pas l'air bien à l'aise. qui n'a pas l'air de trop savoir quoi en faire. il croise ses bras contre son torse. sans bouger. sans rien ajouter. il attend. attend qu'elle reprenne parole. parce qu'il sait qu'elle va le faire. et la question ne tarde pas. son arme à lui entre dans la conversation. gamin qui hausse les épaules. sans la quitter des yeux. tu veux qu'il soit où nora ? sérieusement ? tu le vois tenir dans une poche ? question ridicule à laquelle il ne répond pas. la réponse va de soit en fait.

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too cold to live, too young to die.

y la patience de la gamine qui s’amenuise. elle pas le temps. pas l’envie de rester là. elle veut tout nora, tout de suite. comme un ordre capricieux qu’elle n’aime pas voir contesté. princesse d’un royaume de crasse. ce qu’il ne lui donne pas, elle prend de force. ce qu’il ne dit pas, elle l’entend quand même, les doutes qu’elle réfute d’un coup d’oeil colérique, presque glacial. il est qui pour parler, ali ? il sait rien. rien d’elle. rien de ce qui la motive à venir lui demander de l’aider, au beau milieu de la nuit. il fait que lui balancer qu’elle sait rien, que lui rappeler qu’elle devrait pas être là. pas avec lui, non plus. certainement pas avec cet objet dans la main. à l’oeil ? qu’est-ce que ça peut bien te foutre ? froncement de sourire, les mots qui sortent, crachés à son encontre. princesse vexée, qu’on remette son pouvoir en cause. elle fait ce qu’elle veut nora. elle a pas de comptes à lui rendre, pas d’explications à lui donner. il avait qu’un rôle dans l’histoire, un rôle qu’il s’évertue à foutre en l’air, comme tout le reste. lui donner l’arme et partir. lui donner l’arme et oublier, sans doute pour le restant de sa vie. mais non, ali, il reste là, à tourner autour d’elle, à mettre le nez dans ses affaires. et ça met la gamine sur ses gardes qu’on s’y intéresse autant, qu’on lui foute simplement pas la paix comme elle le voulait de base. alors bien sûr qu’elle regarde la chambre. elle sait comment l’ouvrir, elle l’a vu dans les films. le reste, par contre, lui semble encore flou. mais c’est nora. les yeux qui lancent des éclairs et le menton toujours bien relevé. elle avouera jamais qu’elle y connait rien. arrête de me prendre pour une gamine. nora, elle sait que crier et râler, que bouder et piquer. réplique assassine lancée dans l’air, peut-être qu’il s’en souviendra. c’est nora, pas sa soeur, pas sa voisine, pas sa meuf. juste nora, nora qui peut pas le saquer, nora qui voudrait pouvoir lui mettre le nez dans la merde plutôt que de voir son regard presque inquiet se poser sur elle. mais il s’en fout, ali. comme d’hab. il n’en fait qu’à sa tête, rappelle une autre fois qu’elle n’y connait rien, qu’elle est bête et stupide. commence presque à se dissuader qu’il aurait pas dû venir. trop tard. alors elle lève les yeux au ciel nora, pour s’enfoncer encore dans les répliques qui ne mènent à rien. elle a encore quelques infos à lui tirer, et elle veut pas qu’il parte avant ça. alors elle s’approche, un pas maladroit quand elle se penche vers lui, trop près, pour glisser dans sa main la seconde arme qu’il planque dans son sweatshirt. la sienne. elle l’a jamais vu s’en servir, ali. et quelque part, l’idée de l’imaginer avec un truc pareil entre les mains le rend plus grand. plus dangereux, aussi. alors elle lui colle le flingue contre l’abdomen, elle lui laisse même pas le choix. montre-moi. elle flanche pas la gamine, jamais. elle se contente de le regarder comme s’il était débile, comme s’il savait pas ce qu’elle attendait de lui. y a le palpitant qui s’agite, à l’idée de frôler le danger. et l’âme qui se réveille, dansante, brûlante. les yeux noirs qui brillent dans la nuit. ça fait quoi, de tirer sur quelqu’un ? et la question qui enfin, franchit la barrière de ses lèvres. ça fait quoi, ali ? tirer, puis tuer.

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too cold to live, too young to die.

elle le gonfle nora. réellement. elle fait la grande. la maligne. devant lui. là. parce qu'elle a son flingue. qu'elle considère comme un putain d'jouet. il l'sait ali. il l'voit. à la lueur qui brille dans les yeux d'la gamine. à l'impatience dont elle fait preuve aussi. du n'importe quoi. du grand nora quoi. surtout. ali, il s'attend a tout avec elle. toujours. alors quand elle lui balance toutes ces conneries, ça ne l'étonne même pas. même pas un peu. le jeune homme qui reste de marbre en face d'elle. n'rien montrer. même s'il s'inquiète quand même un peu. parce que si elle fait une connerie, ça finira par lui retomber dessus. d'une manière ou d'une autre. gamin piègé. qui s'fout dans la merde de lui-même. comme un grand. besoin d'personne. jamais. j'ai pas envie d'me retrouver dans la merde à cause de toi. alors si tu fais quelque chose et qu'j'me retrouve dans la merde, t'en fais pas, tu tomberas avec moi. les mots sifflés. entre ses dents. gamin qui peste. la menace. sans essayer de le cacher. parce qu'elle le cherche nora. elle cherche à le provoquer. à l'faire crier plus fort qu'elle. sauf que tout l'monde sait qu'ali, il gueule fort. et souvent. s'énerve pour un rien. inutile de dire qu'elle ne fait pas l'poids nora. jamais. qu'elle aura beau crier, il criera plus fort. toujours. être le meilleur, peu importe le domaine. règle de base. il s'donne a fond. même pour des conneries du genre. ali, il joue gros sur c'coup. peut-être même son boulot. tout ça pour une gamine qu'il n'apprécie même pas plus que ça. nora, elle l'gonfle, quasiment tout l'temps. ils vivent ensemble pour couronner l'tout, alors il la supporte la majeure partie d'la journée. quand il dort, il s'réveille en entendant sa pseudo douce voix depuis le salon. quand il s'endort, il l'entend claquer les portes comme si elle vivait seule. comme si personne n'dormait. ali, il vit en décalé. vit la nuit. dort le jour. elle s'tape de ça nora. alors ali, il s'dit que nora, elle veut qu'tout l'monde se lève quand elle est levée. qu'tout l'monde dorme quand elle dort. sauf qu'ça ne se passe jamais comme ça. ali, il s'demande surtout si elle ne fait pas ça exprès. exprès pour l'énerver dès le réveil. souvent, même son joint matinal ne suffit pas à l'calmer. et ça l'enrage encore plus l'gamin. l'impression récurrente que rien ne réussira à l'apaiser. les nerfs en boule toute la journée. les moindres personnes qui croisent son chemin qui en font les frais. des insultes qui volent. des regards noirs lancés à la pelle. pour tout et n'importe quoi. nora, elle a enfin l'arme entre ses doigts. et elle l'inspecte. sous tous les angles. on dirait un gosse devant un objet inconnu. et la comparaison ne pouvait pas mieux tomber. la seule chose qu'elle sait faire nora, c'est ouvrir la chambre. vérifier s'il y a des balles. puis pester. mais t'es qu'une gamine. faudra t'faire à l'idée un jour. nora, elle lui demande s'il a son arme. à lui. et elle s'approche quand elle a la réponse. se penche. ali, il ne la lâche pas du regard. évaluant chaque geste. sa main qui choppe l'arme. avant d'la plaquer contre l'abdomen d'ali. et elle lâche quelques mots. lui demande de lui montrer. ali, il fronce les sourcils. tu sais bel et bien pas t'en servir. gamine qui glisse de nouveau son arme à sa place. démerde toi nora. tu veux faire la grande à dire qu'tu sais t'en servir et bah vas-y. il n'va pas l'aider. pas alors qu'elle ne lui demande même pas gentiment. oh non, ali, il lui faut plus que ça. une demande à genoux presque. mais il sait que ça n'arrivera pas. pas avec nora. mais l'idée lui plaît bien pourtant. d'voir la gamine s'plier à sa demande. gamine au bout du rouleau, qui ne demande que son aide. rien d'autre. nora, elle enchaîne. lui pose la question qui devait lui bruler les lèvres depuis le début. depuis que l'idée d'avoir une arme a germé dans un coin de sa tête. il le sait ali. il commence à la connaître. t'as pas besoin d'savoir puisque tu ne vas tirer sur personne. il l'sait pas vraiment ali en fait. il a tiré sur quelques personnes. sans jamais donner la mort. alors c'pas pareil. lui, il tire pour faire mal. pas pour tuer. pour donner une leçon. pas l'dernier souffle.

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elle s’approche trop près nora, elle est capable de le sentir quand elle voit qu’il se braque. tas de chair qui devient tas de muscle, le temps d’une seconde. une seconde où elle est là, trop près de lui, pas par volonté, pas pour l’emmerder, simplement pour lui prouver qu’elle a raison. peut-être. sans doute. parce qu’il veut pas l’admettre ali, et c’est tant pis pour lui. alors il a besoin de nora, pour lui remettre les idées en place, peut-être lui éclairer un peu l’esprit si embrumé qu’il a parce qu’il fume trop. qu’est-ce que ça lui fait à nora ? rien. elle grogne un peu quand elle s’approche, quand elle passe la main derrière son dos pour en tirer l’arme coincé contre ses reins. et elle se recule presque aussitôt, comme prise au dépourvu de cette proximité dégueulasse et insupportable. elle lui colle l’abdomen et elle s’en va, retourne là où est sa place, quelques centimètres plus loin. grincheuse. paumée. elle a le flingue d’ali entre ses doigts, collé contre son estomac, parce qu’elle veut qu’il lui montre. parce qu’il peut pas la laisser dans la nature avec ça, pas alors qu’elle a jamais vu de près la moindre arme à feu de sa vie avant et qu’elle a pas non plus envie d’se faire exploser les neurones avec une fausse manip. mais il veut pas ali. ali aussi, il grogne, il tire la gueule, il croit qu’il peut s’en sortir comme ça, à jouer le gamin capricieux maintenant qu’il a commis la connerie. c’est trop tard pour que les choses rentrent dans l’ordre, et sans doute qu’il en prend conscience maintenant. nora, elle est pas là pour lui faire la morale et elle se fout bien que ça lui fasse plaisir ou pas. j’vois, t’es pas la bonne personne à qui j’demande ça. elle perd pas de sa répartie la gamine. fatiguée. énervée. congelée. elle voudrait bien rentrer et retourner à ses affaires. elle voudrait bien rentrer et qu’il lui foute la paix, qu’il arrête de la dévisager avec ses grands airs accusateurs parce qu’il est pas mieux qu’elle. pas plus dangereux non plus. rien qu’un poil mieux placé qu’elle, parce que y a le corps qui l’a à l’oeil, comme tous les autres qu’il a sous le bras. alors elle le jauge d’un oeil mécontent la gamine. vexée. piquée à vif, avec le besoin acide et brûlant de rendre la pareille. j’suis plus certaine que tu t’en sois déjà servi en fait. y a le sourcil qui se lève, presque curieux d’attendre sa réaction. elle se fait un plaisir de lui répondre, quand elle voit qu’il ne lui accorde pas l’attention qu’elle voudrait. quand il range son arme, que ce sera certainement pas ce soir qu’il lui expliquera quoi que ce soit. quand il lui prouve encore que par ici c’est chacun pour sa peau. y a pas d’soutien, pas bras droit. rien que des traitres et des égoïstes. alors elle sent le dégoût qui monte au même rythme que la colère grimpe dans les veines, vitesse grand v. ça secoue le coeur, une seconde seulement. et puis ça se propage, comme un poison mortel, vicieux et presque méchant, que rien ne peut arrêter. tous ces soirs où tu joues des mécaniques au club, c’est juste pour le voile finalement. t’es pas foutu d’tirer toi non plus. c’est bas, même pour elle que rien n’arrête pourtant quand elle est en route pour blesser. elle sait pas vraiment si c’est vrai, nora, mais y a cette putain de pulsion destructrice qui la prend et qui lui donne envie de tout ravager. les êtres et les bâtisses. les rails et puis même lui. l’seul qu’à pourtant traversé la ville à pieds, rien que pour l’arranger. très bien. viens pas t’plaindre quand j’irai faire un truc qui te plaira pas. elle le crache avec condescendance, parce qu’elle est toute seule dans c’merdier. elle a pas besoin d’son aide, à ali, et c’est certainement pas lui qui l’aidera non plus. elle était bien toute seule quand elle est arrivée, nora, et c’est comme ça qu’elle repartira. elle le laisse seul sur le gravier quand elle lui tourne le dos et elle croit s’tirer dans la nuit, là où les ombres se confondent avec les démons.