Les fins de soirées étaient les moments préférés d’Oliver. Lorsque tout le monde s’était bien amusé, que la plupart des convives s’éclipsaient, et qu’il ne restait que quelques personnes, quelques âmes sous la lune. Souvent, c’était un entre-deux, des moments suspendus où l’on ne savait plus vraiment ce qui était réel ou non. Des moments propices aux confidences, à des discussions plus profondes que le jeune homme affectionnait particulièrement. S’il aimait rire de tout et de rien avec un groupe d’amis – puisque l’équipe du refuge, salariés comme bénévoles, était plus proche d’amis que de collègues, Oliver préférait encore pouvoir parler de choses plus intéressantes. Que ce soit le cosmos, la vie après la mort, l’extinction des dinosaures, d’obscurs courants artistiques ou simplement apprendre à connaître une personne avec ses désirs et ses failles. Au refuge, il y avait toujours beaucoup à faire, beaucoup trop pour avoir le temps de faire réellement connaissance. C’était quelque chose qu’il aimait, évidemment, le contact des animaux. Même s’il n’était salarié qu’à mi-temps, il lui arrivait de passer du temps au refuge même les jours où il ne travaillait pas, comme les bénévoles, pour veiller sur les chatons. Particulièrement depuis que la petite pensionnaire à trois pattes était arrivée, ils s’étaient tous attachés à elle. Beverly particulièrement.
Aussi lorsqu’il se retrouva seul à table avec elle, il y trouva vite l’occasion de faire un peu mieux sa connaissance. Bien qu’il ne manque pas de contact humain, tout et tout le monde l’intéressait, plus encore ces collègues de travail à la fois si proches et presque des inconnus pour lui. Et comme si elle lisait dans ses pensées, ce fut elle qui parla en premier. « Bien sûr que non, à moi aussi ils me manquent déjà. » Oliver esquissa un petit sourire à l’intention de Beverly. C’était toujours triste de dire adieu à des animaux qu’ils avaient recueillis, soignés et élevés, mais d’autres viendraient bientôt prendre leur place. Et chaque membre de l’équipe pouvait être fier du travail accompli, surtout lorsqu’ils parvenait à trouver de bonnes familles, attentionnées et aimantes, pour les abandonnés qui n’auraient jamais cru à une seconde chance. Mais sa collègue, malgré son sourire, semblait tout de même attristée. « Fluffy c’est bateau comme nom. Pour nous ce sera toujours toujours trois pattes… Tu l’aimais beaucoup, n’est-ce pas ? Ca ne te dirait pas d’en adopter un, un de ces jours ? » La question était autant adressée à Beverly qu’à lui-même. Il y pensait depuis quelques temps, après tout pourquoi pas ? Un chat sur un bateau, ce n’était pas commun, mais si le félin s’y plaisait… Oliver se leva et fit le tour de la table pour s’asseoir à côté de sa collègue, ne manquant pas d’attirer avec lui ce qu’il restait de son gâteau au chocolat. « Qu’est-ce que tu fais, en dehors du refuge ? C’est vrai, on a tellement peu l’occasion de parler. C’est quoi, tes passions ? » demanda-t-il en attaquant une nouvelle bouchée de gâteau.[/color]