garden shed...lio

l’ange arbore les différentes ruelles plus ou moins escarpées au bruit du ronronnement de pégase. puis la moto suit complètement ses mouvements, puisque la petite sœur est descendue s’aventurer dans la ville elle aussi, sûrement en train de décider de la couleur qu’elle donnerait au bâtiment en échange du cream qui définit un gros bloc du quartier, crachat de mur qui la dégoûte plus que tout, qu’elle échangerait volontiers pour un vermillon agressif, un vermillon crystal.
la laissant derrière lui, azur s’envole un peu plus loin, s’échappe, se perd et se retrouve avant d’atterrir dans le quartier d’east vista, quartier où il résidera plus tard, sans même encore le savoir. acte manqué divin, c’est vers les rails que l’ange emmène son bolide, faisant crisser la moto sur le terrain tout autour.
mais ce n’est qu’après plusieurs palettes de bois qu’il observa longuement, essayant tant bien que mal d’en distinguer les différences, même les plus moindres, qu’une ombre apparaît au tableau, comme un vulgaire montage que l’on aurait fait du monstre du loch ness. mais l’âme légère et embrumée, azur avance, azur roule lentement. et la tâche sur le tableau, similaire à une tâche de boue qu’il aurait pu faire sur un des tableaux accrochés à la ficelle au cul de sa moto en roulant trop vite, se transforme en un petit bonhomme qui ferait presque sourire l’ange. rictus à moitié plaqué sur les lèvres, presque trop heureux d’avoir trouvé quelqu’un, il disparaît aussitôt en voyant l’état dans lequel le petit est. sa joie se transforme, presque comme un automatisme, une coutume, en un espèce de sentiment de pitié et de condescendance, émotion qu’il pousse à s’envoler, s’envoler plus haut que lui déjà, racines d’une éducation trop peu altruiste refaisant déjà surface comme une blessure mal maquillée. azur s’assoit.
puis il cherche pas forcément à comprendre automatiquement ce qu’il se passe, habitude des dégage trente secondes, ‘pas envie d’te parler de l’autre, consigne qu’il tente tant bien que mal de respecter, en finissant toujours par céder à la tentation, céder à sa nature spontanément curieuse et presque affolée de voir un gars pas bien comme ça sur le bord de rails. puis c’est un ....h.hey.., ça va ? qu’il lance, toujours à moitié indécis dans les mots à employer, azur valse au dessus de couteaux aiguisés pointés vers lui, la mort au moindre dérapage. mais l’ange vole, vole, vole.

profit from despairC’est le rendez-vous nocturne avec les rails.
Les lèvres en croissant de lune pendant, Lio a le regard perdu, les bras ballant. Ça s’égare, par ici. Ça s’improvise funambule dans la peau d’un lourdaud maladroit. Les souliers malhabiles glissent et trébuchent sur le fil de fer. Ça vacille. Ça dévie. Ça tangue, ça tangue comme sur la mer. On peut presque entendre la houle qui susurre à l’oreille des matelots. Sel marin inhalé par narines frémissantes. Giclée mouillée sur la peau. Le navire se faufile à travers les flots.
Sauf qu’on a tout faux, c’est pas un navire, c’est un putain d’train qui déraille.
Un peu comme Lio.
Lio, il est pas très bien construit. Monté à l'envers. Comme s’il avait été construit bateau alors qu’on le pensait locomotive. Le flop flop continuel de l’écume contre la coque blanche se reflète dans l’ambre liquide que le gamin tient en main. Et ça continue d’avancer pas très droit, et ça laisse dériver les pensées. On les libère une à une dans l’air frais et elles bruissent toutes en disant au revoir. Gorgée amère. Et les pensées s’en vont toutes. La tête déjà à deux tiers vide.

Et Lio tombe d’un coup. Ça fait un plouf incongru, l’alcool asperge un peu le sol. C’est marrant, le môme n’est même pas saoul. Il sait ce que ça fait, d’être saoul – c’est quand tu t’sens vraiment comme un capitaine en pleine tempête, avec l’équilibre qui fout l’camp, et la barre qui tourne à toute vitesse, et le cap qu’on perd, et qu’on tourne en en rond, tourne en rond, tourne en rond, tourne, tourne tourne tourne.
Mais là, non ; rien. Juste le grand vide des pensées. Le garçon rampe sur le sol pour atteindre le rail et s’y adosse, à moitié couché par terre.
Il attend.
Longtemps.
Quoi ?
Ça, c’est le grand mystère.

C’est somnolant que les deux petits soleils prennent Lio. Il y tourne un regard incertain, des yeux tout plissés, surpris d’être dérangé en pleine nuit.
Ou peut-être est-ce le jour ? Peut-être s’est-il assoupit plus longtemps que prévu, et que les pétarades qu’on entend sont celles de la belle citadine qui se réveille ?
Non.
Les crépitements mécaniques s’arrêtent. Les lumières solaires se meurent aussi, et il n’y a plus que l’éclat lunaire pour les guider.
Le garçon voit la silhouette derrière la moto en descendre jusqu’à lui. Il l’observe quelques secondes sans mot dire, sans même s’poser la question de sa présence ici. Les reflets argentés effleurent la chevelure du nouveau venu. « …H.hey…, ça va ? »

Lio cligne des yeux. Une fois, deux.
Puis c’est comme si les quelques mots balbutiés dans la nuit noire avaient débloqué quelque chose. Les larmes commencent à couler. Sans prévenir. C’est la pluie qui s’abat sur la mer. Il s'écroule, s'écoule, coule dans les souvenirs emmêlés. Silencieusement, mais c’est la cohue à l’intérieur, ça s’accumule et se bouscule, et Lio doit se forcer à y mettre un ordre. Il joue l’flic pour que tout ce beau monde se terre à l’intérieur d’une belle petite boîte hermétique. Faut pas oublier qu’on est plus tout seul.
Le gamin hoche la tête et s’essuie le dessous de l’œil avec une manche. « O… Oui oui. T’inquiète. » qu’il assure ensuite oralement, pas certain d’avoir été clair. « C'est rien. Faute... à la pleine lune. » Il détaille l’autre un peu plus longuement maintenant qu’il n’y a plus que quelques reniflements discrets pour troubler la tranquillité. Les traits longs et fins du visage encore épargné de vieillesse, la tignasse comme un millier de constellations scintillantes, des émotions simples effleurant le visage, le corps délié et posé là. Simplement. « Est-ce… Est-ce que t’es un ange ? » On dirait un ange. Le kiddo forme un pont jusqu’à la tête céleste avec son bras tendu. Celui qui tient la bouteille moitié vide à son extrémité. « Tu veux ? C’est l’eau de vie qu’j’ai raflé sur l’ponton du galion tout droit vers Utopia. » Eclair de sourire. Un peu de whiskey bon marché piqué à Oliver. « Moi j’aime pas d’toute manière. » Preuve en est, presque tout s’est renversé sur le sol et non dans son gosier.

tout comme le commencement d’une symphonie de violon mélancolique, la note de départ semble être l’arrivé d’azur, chef d’orchestre de cette cacophonie à deux, le bruit de leurs esprits plus fort qu’un requiem douloureux. et le petit pleure, les larmes coulent plus ou moins rapidement, viennent colorer de rose les joues du brun, rivière venue réchauffer la pâleur de sa peau presque fantomatique. sauf qu’azur n’a pas de mouchoir, ses mains trop osseuses en guise de morceau de tissus qu’il n’ose pas déposer sur le visage du petit. se baissant un peu, funambule se tenant en équilibre sur ses jambes pliées, il tapote à plusieurs reprises le dos du garçon, cherchant à tout prix à être le plus réconfortant possible, azur enfilant son costume intégral d’ange, comme une combinaison que l’on zipperait dans le dos. et il répond, balbutie, o… oui oui. t’inquiète. ça sent l’alcool. ça sent crystal. crystal qu’il n’a pas vu depuis un peu moins d’une semaine, évaporation angélique précoce qu’il ne peut rattraper, elle reviendra pour subsister, pour mieux repartir. mais azur n’a même pas encore le temps de réfléchir si longtemps que le petit reprend, que le petit se reprend et transforme ses mots, c'est rien. faute... à la pleine lune. puis azur le regarde longuement, petit être qu’il n’aurait jamais pensé affecté par le placement des étoiles, planètes alignées provoquant peut être leur rencontre, les désirs astraux brouillant l’esprit de l’âme inconnue au moral décapité.
mais besoin de rebondir sur autre chose, de changer les idées, l’ange astronaute s’en va dans les étoiles donner un coup de poing à la lune blafarde en lui lançant un ah ouais je vois.. t’es un loup-garou c’est ça? blague de mauvais goût utile dans la seule et unique manière d’apaiser l’atmosphère et faire sourire ces planètes peu courtoises, azur s’assoit et sourit.
changeant le regard de position en le laissant s’échapper vers la verdure tout autour, c’est celui du petit qui vient se poser sur lui, détaillant son être au microscope, l’ange devenu rat de laboratoire. est-ce… est-ce que t’es un ange ? réflexion peut être enfantine qui se pose dans l’esprit du bleu, qui affiche maintenant un rictus un peu plus prononcé. j’imagine, oui, c’est ce que j’aime me dire en tous cas. ce que j’aimerais être. il tourne sa tête vers le garçon. c’est mon surnom, tu vois.
et l’ange sort une cigarette, l’allume et tourne la tête à nouveau seulement pour trouver une bouteille déjà bien entamée tendue vers lui, le parfum alcoolisé enrobant maintenant l’entièreté de ses narines et de son corps tout entier. tu veux ? c’est l’eau de vie qu’j’ai raflé sur l’ponton du galion tout droit vers utopia. l’ange sourit à nouveau, puis hoche la tête et empoigne la liqueur, en tire une gorgée et la repose à côté de lui, en équilibre sur un morceau de terre. l’acidité tirant ses traits, azur a de la peine à avaler. mais la brûlure alcoolisée est presque délicieuse, et lui fait plisser les yeux. j’ai une théorie comme quoi l’alcool gratuit est toujours meilleur. puis cet alcool là est différente de celui des vernissages, celui des ventes et des rendez vous, champagne et vin blanc trop cher pour avoir bon goût. l’ange regarde le petit. ma théorie fonctionne jusqu’ici.
moi j’aime pas d’toute manière. l’ange acquiesce, hoche la tête et observe un peu plus loin, sol presque imbibé d’une large flaque, c’est du whisky ou du vomi, ‘sais pas. puis il le regarde d’un peu plus prêt, le garçon, sans vraiment se rapprocher mais avec plus d’insistance sans même être condescendant. le peu de lumière lui suffit pour décrypter le visage qui se cache derrière ces boucles, et pour déchiffrer à vue d’œil son âge, surtout.
puis je viens d’arriver ici, t’sais. avec ma soeur. il renifle. pas d’émotions mais simplement le dépaysement qui affecte son fonctionnement et lui a filé un rhume. c’est à forte de conduire trop vite. et il lui tend une main amicale, presque trop pour le peu de temps d’échange, mais la lumière lui donne un semblant de clair obscure caravagien qui le fait sourire, puis penser à tous ces tableaux qu’il avait piqué à ses parents, toujours là pas loin, une vingtaine de visages qui le regardent à travers les chiffons qui les recouvrent. azur. azur monroe. enfin, ange si tu préfères. ange, premier du nom. peut être pas, d’ailleurs, mais pas grave.

profit from despairLio sent l’inconnu lui tapoter entre les omoplates. Ça lui fait penser aux jeux de gosse qui s’enchaînaient dans les cours de récréations, les garçons et les filles qui tournent autour d’un de leurs amis en tapant sur son dos courbé, en entonnant des comptines, le fromage est battu, le fromage est battu. Le gamin peine à sortir de la torpeur des souvenirs.
« Ah ouais je vois… T’es un loup-garou c’est ça ? » Éclair en demi-lune qui cisaille le visage du kid. Il ressert un peu sa prise sur la bouteille lovée contre lui en un geste de protection puéril, quand le nouveau venu s’assied à côté de lui. « Ouais… Attention à pas t’faire mordre, graou. » Sans l’entrain qu’il aurait fallu injecter dans la voix. Et puis, il se demande, si face au lycanthrope égaré ne se dresse pas l’ange tombé du ciel. « J’imagine, oui, c’est ce que j’aime me dire en tout cas. Ce que j’aimerais être. C’est mon surnom, tu vois. » Le sourire s’élargit sur les traits du brun. « Tu dois être tombé sacrément loin de ton étoile alors, pour t’paumer… là. » Il a un regard qui embrasse les alentours. Parce qu’on peut pas vraiment dire que les rues grises de la ville, et la cambrousse qu’on devine au bout du chemin, ne soient un paysage très féérique.
Le gamin hausse les épaules et abandonne l’idée. Qu’importe. Il propose à son nouveau compagnon de partager l’ambre acide, son petit trésors, et lui passe la bouteille. « J’ai une théorie comme quoi l’alcool gratuit est toujours meilleur. Ma théorie fonctionne jusqu’ici. » Petit sourire complice, un peu soulagé dans l’fond, calmé de l’inquiétude stupide de s’prendre un refus – ce qui, globalement, n’aurait pas changé grand-chose. Mais Lio secoue la tête. Pas d’accord, pas tout à fait. « C’pas drôle si c’est gratuit, si tu l’as comme ça, en claquant des doigts. C’est mieux quand tu l’mérites, sinon tu finis par ne plus être satisfait de tout l’alcool du monde ingurgité. Parce que ça d’vient fade. C’est mieux quand t’as quelque chose à donner en échange parce que tu prouves que tu l’mérites. Et c’est pas avec d’l’argent. » De quoi tu parles, Lio ? De boisson ou d’autre chose ? Le garçon soupire, sourit. « Comme quand tu prends ton courage à deux mains et te mets en tête de consoler un loup-garou traînant sur l’bord de la route. » Blague qui sonne déjà un peu plus ronde que la précédente. Lio, il aime pas d’toute manière, ce whiskey.

Changement de sujet. « Je viens d’arriver ici, t’sais. Avec ma sœur. » Il renifle. L’autre fronce les sourcils mais, ne voyant aucune émotion sur son visage, décide que ça doit être l’air de la ville qui lui ravit sa santé. « Tu… ‘fin, vous venez d’où ? Du sud ? » Il tape au hasard, Lio, mais peut-être que l’ange vient au contraire de bien plus haut. Des gènes nordiques, norvégiens, finlandais, islandais, pour garantir une telle blondeur dans la tignasse. « Azur. Azur Monroe. Enfin, ange si tu préfères. Ange, premier du nom. » Petit rire. Très bien, Ange premier du nom. Et on sert la main à Ange premier du nom. « Ca me va, l’Ange azur. Moi c’est Lio. Simplement. » Lio tout court. « Juste… Lio. » Parce que Lio Kentucky, c’est l’gamin du quartier. C’est le môme qu’on a vu grandir à qui on pince les joues dans les fêtes de famille, qu’est là, comme un con lancé sur un trottoir entouré de deux murs, sans réelle issue, libre mais pas vraiment, heureux mais pas vraiment. « Ca doit être sympa d’avoir quitté ta ville. D’plaquer tous les visages qui t’observent depuis ta naissance et pis d’dire au revoir à l’intérêt à peine réel qu’ils te portent. C’est un peu malsain leur truc, quand on y pense. » Petit regard sur sa bécane. « Ta sœur, tu l’as fait voyager sur ta moto ? » Et pis, c’est là qu’il remarque les grandes toiles par derrière. Ça forme des angles de partout et, mine de rien, bouffe quand même une bonne partie de la place restante. « Tu transportes ta maison sur l’siège arrière ou quoi ? » Lio, il s’rend compte qu’il devient comme ces adultes qu’il méprise en secret, à mitrailler de questions pas très discrètes pas très intéressantes, alors il hausse les épaules. « Pardon. C’était con à demander. »

tu dois être tombé sacrément loin de ton étoile alors, pour t’paumer… là. l’ange hausse les épaules. tu sais je sais même pas exactement où je suis, puis ça m’importe peu, alors bon.. azur regarde un peu plus loin. regard perdu entre les feuilles des arbres en face de lui, cherchant tant bien que mal signe de vie animalier pourtant inexistant.
c’pas drôle si c’est gratuit, si tu l’as comme ça, en claquant des doigts. c’est mieux quand tu l’mérites, sinon tu finis par ne plus être satisfait de tout l’alcool du monde ingurgité. parce que ça d’vient fade. c’est mieux quand t’as quelque chose à donner en échange parce que tu prouves que tu l’mérites. et c’est pas avec d’l’argent. azur hausse les épaules à nouveau. parce que tout l’alcool hyper cher qu’il a pu boire jusqu’à maintenant ne provenait pas de sa poche. puis il donnait pas grand chose en échange, en plus. peut être juste sa présence, ses performances. puis les traits de son visage suffisent à payer des litres de champagne. comme quand tu prends ton courage à deux mains et te mets en tête de consoler un loup-garou traînant sur l’bord de la route. il rit un peu, discrètement presque, simple expiration saccadée. parce que le petit joue le jeu, et que c’est quelque chose qui le rend heureux. mais je sais même pas si j’arriverai à te consoler, donc c’est peut être pas une bonne idée de me payer maintenant, tu sais. qu’il déblate d’une traite, agitant la liqueur de sa main en quelques mouvements.
tu… ‘fin, vous venez d’où ? du sud ? l’ange secoue la tête et fait la moue après avoir repris une mince gorgée. los angeles. pas tout près d’ici.
et le petit rigole, puis l’ange sourit à nouveau, parce qu’il est peut être pas si mauvais pour remonter le moral des gens finalement, même celui des loups garous. ça me va, l’Ange azur. moi c’est lio. simplement. un hochement de tête se perd dans la conversation. l’ange sourit. juste… lio. et il l’observe un peu plus. le visage se dévoilant petit à petit derrière les boucles qui auparavant cachaient l’entité du visage. j’aime bien, lio. ça roule sur la langue, on dirait presque un bonbon un peu acide. tu vois ce que je veux dire ? imagerie peut être un peu trop poussée, azur n’y prête pas attention, trop intéressé par le souvenir d’une gélatine fondante sur le palais, d’une couleur trop chimique, un rose pétant qui rendrait la sucrerie pourtant d’autant plus appétissante. un bonbon rose, ouais.
puis l’ange sort ses propres sucreries, paquet de cigarettes enveloppé d’une pochette en tissus fleuri qu’il ouvre seulement pour dévoiler la réelle nature de ses délices à lui. dizaine de joints alignés et préroulés à souhait, azur en retire un délicatement puis le place entre ses lèvres. farfouillant un peu dans ses poches quelques secondes, il en ressort un zippo en métal, petit ange nu un peu trop kitsch gravé dessus, puis son prénom écrit en dessous. cadeau de maman.
et la douce odeur qu’il apprécie tant commence à embaumer les corps des deux garçons, nuage flottant les emportant peut être vers un paradis un peu plus haut, un peu plus beau. puis entre quelques taffes, l’ange tourne la tête vers le loup, et tu veux fumer dessus?
ça doit être sympa d’avoir quitté ta ville. d’plaquer tous les visages qui t’observent depuis ta naissance et pis d’dire au revoir à l’intérêt à peine réel qu’ils te portent. c’est un peu malsain leur truc, quand on y pense. azur hausse les épaules. parce qu’il y avait pas complètement pensé comme ça. y avait pas réfléchi de cette manière, enfin. avait peut être pas eu le temps de le fait, en fait. et puis comme un flash, reviennent les regards des amis des parents, les regards des parents eux même, les regards les regards les regards. azur souffle. c’est même pas par rapport à leur intérêt ou je sais pas quoi. surtout l’environnement. puis l’ange se rend compte qu’il était en train de fixer un point bien loin devant lui, et même pas le petit. puis il tourne la tête bien vite. l’impact que la vie de mes darons avait sur moi devenait étouffant, t’sais.
et comme en un automatisme, l’ange retourne la tête et tire une grosse latte sur son joint.
ta soeur, tu l’as fait voyager sur ta moto ? petit sourire rien qu’en pensant à crystal agrippée à lui qui crie de joie dès qu’ils entrent dans un virage, princesse cherchant à tout prix à caresser le sol le plus possible. ouais, elle adore ça. vous devez sûrement avoir le même âge, je pense. azur réfléchit. se demandant finalement quel âge pourrait avoir le petit. elle a dix-sept ans. un temps. t’en as combien, toi? un temps. vous serez peut être au lycée ensemble, en fait.. haussement d’épaules. peu importe, en fait.
tu transportes ta maison sur l’siège arrière ou quoi? azur rit un peu, plus un pouffement, et n’a pas encore le temps de répondre que l’autre se remet à parler. pardon, c’était con à demander. il secoue la tête. non, non, au contraire. c’est parfaitement légitime. il tourne la tête vers sa moto, vers pégase puis continue, le sourire en coin. c’est ma collection, ça. de tableaux. puis il se lève, et le cône en bouche, se dirige vers la bécane et l’amas de peintures attachés au derrière de la machine. détachant habilement la corde, il dépose délicatement la trentaine de tableaux sur le sol, comme une réelle exposition portable. mes parents sont collectionneurs, tu vois. puis je me suis permis de piquer plusieurs tableaux en partant. un temps. histoire d’étendre la fortune dans d’autres villes, tu vois ? il soupire presque en observant tous ses tableaux. puis histoire de me faire un peu d’argent. histoire de survivre avec ma soeur. il pouffe de rire en voyant un tableau précis. viens voir, viens voir. y’a un portait qui mérite d’être observé. en effet, la femme représentée méritait d’être regardée. un espèce d’effroi mélangé à de l’arrogance dans ses yeux, un triple menton menant à un décolleté avantageux mais qui aux yeux d’azur ressemblait simplement à des fesses de bambins. tu penses qu’elle fait cette tête parce que son corset est trop serré ?

» living in the garden of evil (sadie)