or nah (sony)

Invité

calme subtil qui lui épouse le coeur. se mélange à ce semblant de respiration étouffée contre ses deux lèvres comme cousues l’une à l’autre en un enchevêtrement vulgaire d’un vermeil éraflé par la friction. elle est l’imperturbable, la figure figée dans cette absence presque éreintante d’une quelconque émotion. le masque impérial lové contre l’épiderme, celui de la tension atrocement stimulante qui lui glisse dans la pulpe des doigts. mais elle ravale cet étrange sourire immonde qui lui chatouille la commissure de la bouche, l’étrangle sous le pli sévère qui déchire le faciès. y’a ce plaisir absurde qui la subjugue en même temps que les effluves du risque qui lui inonde la langue, semblant de transe à l’idée absurde d’avoir sa propre destinée suspendue au bord du gouffre. y’a cette exaltation à la simple perspective d’y plonger, de se laisser enfin dévorer par les ténèbres et perdre un peu plus encore. de quelques jetons qui glissent le long de la table, elle programme sa propre destruction, et le spectacle est bien beau. transcendant, même. pourtant elle sait déjà que sa fin n’est pas pour ce soir, le coeur n’y est pas totalement, les étoiles pas encore totalement alignées pour l’apocalypse. l’oeil placide, la langue acide, elle s’emmure dans l’observation fastidieuse des autres cons piteusement confinés autour de la table. festival de costumes à l’étoffe râpée et à la couleur fanée par l’enchaînement des nuits infinies. à l’odeur dégueulasse de parfum putréfié par la pourriture qui leur fleurit dans les entrailles. une belle flopée de cadavres se dopant à cette même adrénaline qui l’enivre elle aussi, d’oeil vitreux en réalisant que cette vulgaire gonzesse soit bien trop douée à lire les mots sourds et à comprendre les silences assourdissants. offensés par cet ennui désinvolte qui coule de chaque bribe d’air qui quitte ses lèvres pour combler l’atmosphère lourd. elle commence par s’ennuyer, le jeu n’est même plus un brin stimulant quand il est foudroyant de facilité. ce sont les nombres qui s’ajoutent, les jetons qui s’entassent, viennent nourrir un peu plus la forteresse de son dépérissement sous ses opalins crevés et béants. et finalement, comme une providence mystique qui lui murmure à l’oreille alors qu’une nouvelle personne vient s’égarer jusqu’à leur tableau miséreux, y apporter un peu plus de lumière. elle l’observe, et sent le brasier au creux de ses yeux crépiter, se délecter de ce second souffle qu’il lui insuffle juste là. ce soir tu perds, mila. et lui reglisse l’intérêt dans les veines. l’oeillade accusée alors que brusquement elle devient médiocre, les mains gauches et le visage trop expressif. comme toujours, il reste plus qu’elle et lui, la joute infernale aux motivations trop obscure. je me couche. et elle est là, la victoire offerte sur un plateau d’argent, corrodé à un mensonge disgracieux. d’un main lascive elle pousse le tas si aisément amassé pour le faire glisser jusqu’à devant lui, sans quitter le tumulte qui bouillonne au fond de ses yeux. peut-être une fierté à l’illusion d’avoir réellement mérité ce qui lui arrive, probablement trop naïf pour réaliser qu’il ne mérite absolument rien.

Invité

tu l’sens bien, ce soir, sony. tu sais pas trop pourquoi. l’instinct, sûrement. celui bien aiguisé du joueur qui ne perd - presque - jamais. ouais, voilà. c’est ça. l’instinct du jeu, le goût du danger. ce soir, tu vas remporter gros. et ça se confirme déjà, à l’arrière du sinners, dans la salle enfumée par les cubains bien roulés, alors que la partie bien entamée risque de prendre fin plus tôt que prévu. les joueurs se couchent, un à un, à ta plus grosse surprise. les gros bras tirent la gueule et ça te fait un peu crisser sur ta chaise, toi, de les voir te jeter des regards en travers. parce que qu’est-ce que t’y peux, toi ? c’est pas toi qui les plume. t’en sais rien, vraiment. tu te frottes aux as du jeu en espérant te refaire une fortune, rembourser quelques dettes, peut-être. mais tu finis plus souvent plumé qu’autre chose et c’est le cul sur le pavé que t’atterris souvent, quand les gros joueurs décident qu’ils ne veulent plus de toi. et tu les attends presque au tournant, ce soir, déjà prêt à filer avec la thune en poche, bras d’honneur au vent quand tu détaleras enfin, eux sur tes pas. ce soir, ça n’arrive pas. t’attends, pourtant. ils ont tous été mis au tapis, mis à part elle et toi. demoiselle charmante parmi les armoires à glace. pile face à toi, de l’autre côté de la table de poker. et t’as beau la scruter, son visage ne dévoile rien. bluff parfait. c’est dérangeant. inquiétant. qu’est-ce qu’elle cache, sous ses cartes ? pas grand chose, t’espère. parce que ta main est pas vraiment impressionnante et t’as pas vraiment envie d’te rétamer devant elle, fierté du paon en chasse oblige. tes cartes sont même pas bonnes, tu sais même pas bluffer. pourquoi t’es là, sony ? ça a de moins en moins d’sens. et puis soudain, ça t’revient. elle se couche, les cartes posées face contre terre sur la table et la victoire s’offre à toi. elle est là, la nana que tu peux pas oublier. ces dernières fois où elle t’a sauvé la mise, peut-être même sans s’en rendre compte. porte-bonheur personnel. putain, elle est magique. tu devrais lui demander de te suivre, de souffler sur les dés et de tapoter les cartes au blackjack. t’as l’impression de tenir la solution à toutes tes emmerdes, cartwright, et putain, tu comptes bien t’y accrocher. tu montres ta main au reste de la table, qui s’éloigne déjà dans des osupires exaspérés de te voir gagner avec des cartes si mauvaises, et toi, en bon gros abruti, tu te contentes de récupérer les gains, t’y vas à deux mains pour tout fourrer dans tes poches, être sûr de pas oublier un billet derrière toi. belle partie, les gars ! tirez pas la gueule, ça arrive à tout le monde, de perdre un peu de fric ! rire gras, rire nerveux. tu sais plus où t’foutre, sony. est-ce que tu dois décamper ? non, ils te mattent tous de travers, ça semblerait louche. ça ferait que les envoyer derrière ton cul et t’as pas besoin d’une énième course poursuite dans les rues, encore moins besoin qu’ils te suivent jusqu’au garage, jusqu’à l’appart, n’importe où ils pourraient trouver desi qui sera sûrement pas aussi patient que toi. et tu fais de ton de ton devoir de le garder hors des emmerdes, ton jumeau, alors ce soucis-là, tu devrais y faire face tout seul. tu te contentes d’imiter les autres à ton tour, de t’éloigner de la table où tu seras sûrement pas le bienvenu pour une seconde manche, et tu la rejoins au bar, sans la quitter des yeux comme par peur que la chance s’évapore à la seconde où elle quitte la pièce. tu perds le coup de main, on dirait. t’as le rictus amusé, l’oeil malicieux. le coude sur le bar, pour mieux lui faire face. toujours trop près comme toujours, à vouloir lui tenir la jambe. bon gentleman, c’est deux verres que tu commandes et t’es beaucoup trop fier de toi pour ne pas la lancer sur la victoire pitoyable, sony. faut pas t’en faire, ça va revenir. j’peux t’apprendre, si tu veux. à nouveau, la blague au bout des lippes, le sourire qui en dit long. si seulement t’avais idée, que c’est grâce à elle que tu te pavanes ici comme un roi.

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