si j'avais un coeur (jordan)

- la tête tournée vers les étoiles -
(un)Maman fantôme Papa absent, l’odeur de l’alcool et de la cigarette qui collent aux murs de la maison. C’est Jill et Jordan, c’est Jordan et Jill. Harper envers et contre tout, J&J pour défier le monde. Maison sale, maison seule, maison loin des rêves quotidiens. C’est le gâteau d’anniversaire sous forme de kinder pingui pour souffler les bougies et les rires dans les couloirs. (deux) Jill c’est synonyme de trahison, le cœur cassé, le cœur brisé. T’es partie où putain, pas de mot, pas de note, rien. C’est la solitude écrasante, c’est Jordan sans personne le soir, à manger face aux tâches d’humidité qui s’impriment sur le mur. C’est plus Jill pour la coiffer, c’est plus Jill pour l’aider. Elle remonte ses manches Jordan, il est temps de grandir. (trois) Etre adulte quand on est jeune c’est fatiguant. Jordan elle a du mal, dans sa solitude, dans sa différence, trop à l’écart des gens, jamais invitée aux anniversaires. T’as vu ses parents ?. Seule aux réunions parents professeurs, seule aux journées portes ouvertes, seule au spectacle de fin d’année, seule, seule, seule, seule. Merci Jill. Vraiment. (quatre) Faut bien combler les vides quand personne veut de toi, gamine silence au pas un peu trainant. Alors elle se perd Jordan, dans des livres qui sentent la poussière, entre les lignes, sous les couvertures. Elle s’immerge dans les histoires, classique ou science-fiction, elle voyage à travers le temps et l’espace à chaque fois qu’elle tourne la page. C’est Cosette, c’est Elisabeth Bennet ou Catherine Earnshaw dans lesquelles elle s’imagine, gamine aux rêves qui ont un goût de papier usé.(cinq) Les cours c’est compliqué pour Jordan, elle a du mal avec les chiffres, ça se mélange dans sa tête et personne pour lui expliquer. Les cours c’est compliqué pour Jordan, les rumeurs, les murmures, les regards. On l’aime pas vraiment, trop différente, avec ses bagues sur les dents et ses cheveux qui ressemblent plus à une crinière de lion qu’à autre chose. Elle est pas très jolie Jordan, pas très douée non plus, trop timide et qui se laisse trop souvent marcher sur les doigts. Un jour ça changera, elle se le promet.(six)Y a cette fille, un jour. Y a cette fille trop différente du reste, au sourire tordu et aux ongles peints dans les couleurs de l’arc-en-ciel. Hazel et ses cheveux pleins de perles, Hazel qui tend la main. Première amie, elle a le cœur qui bat Jordan. Jordan comme un garçon, t’es marrante jt’aime bien. Elle a le charme mystérieux Hazel et les mots qui réchauffent le cœur. Ca devient un autre organe, un troisième poumon, de quoi mieux respirer le soir. . (sept)Hazel&Jordan c’est comme un ouragan, des soirées passées sous la couette à rigoler, à s’empiffrer de conneries en parlant des gens de la classe. Hazel&Jordan elles sont inséparables, années après années, c’est les liens du cœur avant les liens du sang et quand Jordan passe plus de temps chez Hazel que dans sa propre maison. Invite la à boire un coup qu’ils disent les parents, pas vraiment inquiets de trouver la maison dans le noir en rentrant. (huit) Le lycée, c’est pas vraiment différent, ptêtre en plus violent. Mais Jordan elle baisse pas les bras, elle a un but bien en vue et compte pas baisser les bras. C’est les petits boulots à côté, mettre de l’argent dans des enveloppes et les cacher, c’est bosser comme une forcenée pour faire rentrer ces foutus chiffres dans le crâne. Elle fait de son mieux Jordan, pour pas couler, briller à sa manière comme elle peut. (neuf)Gamine modèle qui change peu à peu, jolies chemises bien repassées et sourires au gout de fraise. On l’aime bien Jordan, parfois un peu trop sérieuse mais on sait que c’est compliqué. Pas populaire non plus, elle est entre les deux, dans la normale quand elle a pas le nez dans ses cahiers. Y a toujours Hazel puis y a les autres qui s’ajoutent petit à petit, les sorties le week end ou les soirées au ciné. Elle aime bien Jordan, cette bande de bras cassés, ceux qui restent toujours au milieu. Trop banales.  (dix)La passion pour l’histoire c’est pas arrivé comme ça. C’est le prof trop charmant, c’est les sourires encourageants. T’es douée Harper. Première fois qu’on lui dit ça en lui rendant une dissertation. Elle l’aime bien Mr. Davis. Ptêtre même un peu trop quand il lui adresse des sourires et son cœur qui s’emballe. Alors elle passe les nuits à dévorer les livres, cette fois ci c’est l’Histoire avec un grand H avec qui elle voyage, dans l’espoir de devenir quelqu’un aux yeux d’un trop prof trop affectueux. (onze)C’est plus Mr. Davis, c’est Casey. C’est aussi le secret. 18 ans plein le cœur et la sensation de voler. Y a plus d’Hazel, y a plus personne, juste Casey. Et l’Histoire. Elle apprend à mentir Jordan, se perd dans une bulle qui l’isole du reste. Mais c’est pas grave, elle est amoureuse.  (douze) Mais y a tout qu’explose. Merci Hazel, de meilleure amie elle passe à pire ennemi. C’est la jalousie qui vient tâcher le tout, ternir la lumière. C’est Casey qui fait ses cartons, dans le silence, et les rumeurs qui trainent dans les couloirs. T’avais pas le droit Hazel de bousiller deux vies comme ça. Y avait rien de mauvais dedans, rien d’abusif, rien de méchant. Alors pourquoi ? Et Jordan qui se raccroche aux vieux livres cornés, décroche la bourse pour l’université mais y a personne pour la féliciter. Pas même toi Jill, t’es où quand on a besoin de toi ? (treize) La solitude qui revient sur les bancs de la fac. Grandir c’est nul, quand les parents sont même plus gênés de te proposer une bière ou un joint. Elle voudrait repartir en arrière Jordan, comme avant, mais ça marche pas. Ça marche plus. Elle est triste Jordan, pas mélancolique, surtout en colère. C’est pas une vie tout ça, courir entre les boulots pour payer le loyer quand les parents oublient, courir entre les TD pour pas perdre la bourse, courir après le temps pour trouver quand dormir.Tic tac dit la bombe (quatorze) Elle explose Jordan. En millier de petites étincelles, elle devient un feu de forêt, brûle, brûle. Elle balance tout, les petites robes modèles et les ballerines. Les sourires agréables et la politesse qui colle à la peau. Elle mue Jordan, quitte sa chrysalide parce qu’elle ne fait qu’étouffer, de gamine elle devient sale gosse, comme ça, elle a juste glissé. Faut dire que y a plus personne pour lui dire d’arrêter de déconner ; Plus d’Hazel, plus de Casey, pas de parents et plus de Jill. Menteuse, elle est là sur le pas de la porte, prend la dans tes bras – plutôt crever – (quinze) C’est les mauvaises fréquentations, c’est tomber un peu plus bas à chaque fois, aggraver la gueule de bois. Shots jusqu’au bout de la nuit. Elle se perd Jordan, amazone en furie, elle dance jusqu’à s’en faire saigner les pieds, jusqu’à s’en faire saigner le cœur. Elle hurle, chante, brûle. Encore. Y a plus de nuit que de matin, plus de vie que de quotidien. C’est l’impression d’appartenir à quelque chose, la bande qui va et vient, jeunesse mauvaise à fumer dans la salle de bain. Il dirait quoi Casey hein ? S’il voyait tes notes ? Il répond plus depuis longtemps, il a disparu.. Elle dirait quoi Jill, si elle te voyait à genoux sur le carrelage, à vomir tes tripes et pleurer tes larmes ? Sans doute qu’elle s’en foutrait, elle est déjà partie une fois, pourquoi pas une autre ? (seize) C’est une descente aux enfers programmée, Jordan qui se laisse happer, descend la rampe d’escalier sur les fesses et s’étale sur le sol en rigolant. Elle fait comme elle peut mais ça foire un peu, beaucoup, les avertissements qui s’entassent, les renvois pour les jobs, et Jill tenace sur le pas de la porte. Dégage je veux pas de toi alors que tout en elle hurle à sa sœur : aime moi. (dix-sept) Dans la débâcle y a un peu de bien. Y a le crew maladroit qui se forme un peu par hasard. C’est des mots hargneux sur du papier, c’est dégagez les loosers quand ils se présentent, et quand parfois ils se demandent comment ils en sont arrivés là. Elle aime bien ça Jordan, sa bande de marginaux au sang chaud. C’est pas des coups qu’ils balancent quand ils veulent voir le sang couler, c’est des mots, des vers, des rimes. Bang, bang pseudo-MC on fait semblant d’être doué pour exister. (dix-huit)Elle sait plus grand-chose Jordan, paumée dans toutes ses personnalités. Elle se laisse fracasser petit à petit, s’use trop vite et ferme les yeux au moment de l’impact. Elle s’était promis pourtant, de jamais finir comme ça, mais faut croire que ça colle au sang des Harper. Y a eu Jill et maintenant c’est son tour, de tout flinguer, de tout rater, pour un petit brin de liberté. Tu parles.