et toi qui brûle (bobby)

- la tête tournée vers les étoiles -
(un) des cris, des pleurs. alors que ses parents n’étaient pas fichu de s’occuper d’elle. trop stones. trop occupé à triper. bobby, elle est née dans cette famille étrange du quartier. les doigts pointés, les regards mauvais. géniteurs irresponsables. deux enfants à s’occuper alors qu’ils ne savaient déjà pas se charger d’eux-même. hippies bien trop perchés. mauvais mélange. celui qui a fini par détonner. rythme de vie dont elle a été retiré. protégée. sauvée. (deux) sasha et bobby. depuis le début. rien qu'eux. dans ses plus anciens souvenirs, les plus récents aussi. deux têtes brunes inséparables. sasha, son frère aîné. son père, sa mère à la fois. sasha qui joue tous les rôles. sasha qui prend toute la place. qui tâche tant bien que mal de s’occuper d’elle. à la place de leurs parents. bobby, elle ne serait peut-être plus là sans lui. elle ne sera encore moins là où elle en est aujourd’hui. alors sasha, c’est la prunelle de ses grands yeux d’enfants. la personne la plus importante. celle pour qui elle pourrait se sacrifier à son tour tant il en a fait et qu’il fait encore. frêle brune à ses côtés. bobby sans sasha, ça n’existe pas. (trois) elle étudiait l'art, le cinéma. études bidons sans grand à venir mais qui la passionnait. son aîné, il voulait lui offrir un avenir meilleure que le siens. se saignait à lui payer ses études. mais elle a merdé, bobby. une fois. celle de trop. sasha qui a dû tout rattraper. sasha qui s'est sacrifié. et tout à changé. (quatre) elle s'en souvient encore, du regard de son frère ancré dans le siens. de la sirène des flics qui résonne. fort. beaucoup trop fort. elle avait aucune idée de la gravité de ce qu'elle faisait. que ses nombreux sachets blancs sur elle pouvait la conduire dans une cage miteuse. les barreaux qu'elle verrait de près. mais sasha, il a pas laissé faire ça. sasha, il a tout prit. il lui a juste dis de se taire, de le laisser faire. sasha qu'on lui arrache, qu'on enferme. des années pour quelque chose qu'il n'a même pas fait. et bobby, elle a toujours cette boule au creux de la gorge. quand elle pense à lui. quand elle s'avance vers le parloir. (cinq) elle tise, bobby. fumée qui parcours ses poumons. s'attardent quelques secondes. une taffe pour s'apaiser. une seconde pour faire taire la douleur dans son poignet. elle aime ça la brune. ce sourire qu'elle ne contrôle plus. ses idées qui partent dans tous les sens. tous. pourvu qu'elle ne réfléchit plus. un instant. seulement un petit moment. (six) elle bosse, bobby. depuis que sasha est partit. pour subvenir à ses besoins. pour tâcher de mettre de côté. pour elle. pour eux. les heures qu'elle ne compte pas. son corps qu'elle use. qu'elle malmène. les muscles douloureux. le visage neutre pour ne pas laisser apparaître la douleur. celle des années qui passent. des tâches qui s'amassent. elle a pas le droit de se plaindre, bobby. ne le fera jamais. alors elle se contente de ne rien dire au boulot, d'hocher la tête. même si ses poings se serrent. même si sa mâchoire se crispe. poupée brune regardé de haut par ces riches qui s'offrent ses services. (sept) elle rêve d'ailleurs, bobby. loin. d'ici. elle renierait presque cette ville et tout ce qu'elle lui rappel. pourtant, s'est ancré en elle. alors elle cri, pleure parfois. parce qu'elle aimerait que les choses se passent autrement. qu'elle n'est pas cette peur au ventre. sa gorge qui se serre. la crainte de ne pas revoir un jour son aîné devant elle. sans cette foutue vitre en plexiglas. (huit) l’enfant sauvage, indomptable. bobby, on a jamais su l’encadrer, lui imposer des règles. elle a grandit en dehors des chaînes, on lui a laissé trop de liberté. celle dont elle ne peut plus se passer, celle qu’elle recherche dans chacun de ses gestes, dans chacun de ses actes. gueule d’ange. c’est un ouragan, bobby. trop égoïste pour se soucier des ennuis qu’elle peut causer, trop immature pour qu’elle puisse elle-même s’arrêter. elle se fiche des limites, celles qu’on tâche de lui imposer. elle a toujours tout décidé, bobby. et c’est pas maintenant que ça va s’arrêter. (neuf) les crises, les hurlements. bobby, elle a pas peur de se donner en spectacle pour exprimer ce qu’elle ressent. alors elle gueule toujours plus fort pour se faire entendre, jure encore et encore. contre tous ces cons, contre la terre entière. elle s’en fou de paraître vulgaire, d’attirer les regards. (dix) loup solitaire. princesse au cœur de pierre. détachée, toujours intentionnée. elle refuse de tomber amoureuse. elle refuse de se donner. elle a pas besoin qu’on l’aime, elle a pas besoin qu’on prenne soin d’elle pour se sentir vivre. égoïste même sur ses sentiments. bobby, elle veut pas partager. elle prend toujours, elle rend jamais. bobby, c’est un cadeau empoisonné. (onze) bobby, elle n’a jamais eu beaucoup d’amis. de personnes sur qui compter. pas de temps à perdre à s’attacher. pas vraiment de confiance à partager. bobby, elle est solitaire. bobby, faut savoir l’approcher. doucement. peu à peu. faut s’accrocher pour enfin pouvoir se faire adopter. bobby, elle a toujours apprit à se méfier des autres, à ne pas se laisser berner. (douze) cigarette dans la main gauche, briquet dans la main droite. la fumée qui s’élève de ses lèvres maquillée. bobby, elle a beau être droite, elle traîne pas toujours dans des endroits bien fréquentée. le corps à peine couvert, les talons un peu trop haut. elle se laisse aller à danser vulgairement dans des boîtes miteuses entre deux ou trois cocktails. pour oublier. un moment. juste un instant. ce qui l'entoure. ce qui l'attends dehors.