satellite heart lost in the dark (leo)

Le bruit de la pluie qui s'abat sur son pare-brise est si fort qu'on pourrait la croire capable de briser la vitre. Ses essuies-glaces battent le rythme en vain, la visibilité est tellement mauvaise qu'il y a de quoi se demander si un jour le soleil brillera de nouveau sur Night Fall. Un milkshake menthe-chocolat dans un énorme gobelet en plastique a remplacé sa sempiternelle bouteille de Jack. Il a le ventre rempli et l'état comateux avec, propre aux repas un peu trop gras. Il est en prise de masse actuellement, car il a enfin trouvé un moyen de rembourser la dette qu'il a envers Gemma. Il a entendu qu'un type organisait des combats de rue, des clients en parlaient à voix basse au comptoir de son bar il y a quelques jours et ça lui était apparue comme une évidence. C'était la solution qu'il attendait, un truc qui lui ferait du bien à tous les niveaux, qui satisferait son besoin de vengeance, de violence et d'argent. Tout ça à la fois. C'était l'opportunité qu'il attendant sans le savoir, rien de tout ça ne lui faisait peur et si le type en question refusait de lui donner sa chance alors il avait un plan B. Un plan B qu'il ne préférait pas envisager tout de suite, parce qu'il nécessiterait de l'organisation pour ne pas se faire griller. En combattant il s'évitait tout ça. Maintenant il fallait qu'il trouve le mec en question et que celui-ci le laisse combattre mais pour être crédible dans sa candidature, Nikos devait d'abord se remettre en forme et pour ça, il devait définitivement passer par la reprise du sport et vite. Il avait toujours été sportif, un excellent joueur de football américain même mais là il devait passer la seconde, alors il avait triplé ses repas et bouffait tout ce qui lui passait sous la main. C'était pour ça qu'il était parti manger seul au Diner du centre-ville, il était maintenant sur le chemin du retour avec le ventre rempli et l'envie de se vautrer dans son lit devant n'importe quelle idiotie qui passait à la télé. Il vient de passer la limite de Night Fall et meurt d'envie d'écraser la pédale de l'accélérateur de sa Chevrolet mais la visibilité est tellement mauvaise que ça serait suicidaire. Il hésite à griller le feu rouge lorsque celui-ci passe au orange et finit par s'arrêter lorsqu'il voit dans son rétroviseur droit une silhouette encapuchonnée aux longs cheveux blonds sous la pluie battante. Nikos plisse les yeux puis les écarquille brusquement. Qu'est-ce qu'une nana fout dans ce quartier sous cette pluie avec une température aussi basse ? Ca ne peut clairement pas être une prostituée étant donné qu'elles ne sortent jamais par temps pareil, aucun intérêt, tout le monde reste chez soit. Peu importe les pulsions viles qui les prennent à la gorge. Si cette nana n'était pas une prostituée, Nikos pouvait affirmer sans trop se mouiller que son instinct de survie était en veille. Mais qu'est-ce qu'elles ont toutes à venir trainer dans ce coin flingué bordel... Il enclenche la marche arrière et baisse la vitre une fois arrivée à sa hauteur. T'as besoin d'aide ? Il se retrouve obliger de gueuler pour couvrir le bruit de la pluie. Super Nikos a encore revêtu son habit de Superman, peut-être parce que c'est encore une des rares personnes de ce coin paumé à se soucier des âmes en peine qui s'égarent dans les pires quartiers de Crescent.

les yeux embués de larmes et la respiration saccadée, la gamine observe autour d'elle sans savoir se repérer. elle ne sait plus dans quel sens se trouve l'appartement d'aran ni même l'endroit où sont déposées ses maigres affaires. elle aurait dû y réfléchir à deux fois avant de s'échapper comme ça, mais elle était bouleversée et pas en mesure de faire quelque chose de cohérent. la journée, elle traîne beaucoup dans ce quartier et habituellement, elle serait capable de retrouver n'importe quel bâtiment, mais à cause de la pluie qui ne cesse de tomber et de l'obscurité qui l'entoure, leo doit bien avouer qu'elle est perdue. elle rabat une mèche de cheveux mouillée qui lui tombe sur le front à l'arrière de sa tête pour essayer d'y voir plus clair, mais rien n'y fait. le froid lui mord la peau et elle se maudit d'avoir quitté l'endroit où elle était, elle aurait simplement pu s'installer sur le canapé, mais son hôte de fortune ne l'aurait certainement pas lâché aussi facilement. il l'aurait forcé à discuter, à s'ouvrir et elle aurait eu envie de lui planter un couteau de cuisine dans l’œil. plutôt mourir que de parler de ses parents à qui que soit. rien que le mot lui donne des frissons. une nausée incontrôlée prend la blonde par surprise et elle rend son repas sur le bord de la route. l'estomac en vrac, le cerveau rongé par ses mauvaises pensées, elle décide de marcher pour s’aérer l'esprit. elle a vécu des situations pire que celle-là, ce n'est pas la pluie et le noir qui l'arrêteront après tout. elle doit retrouver son chemin pour récupérer son butin puis elle retournera chez le brun, elle ne sera plus aussi ingrate qu'avant, elle acceptera son aide, son toit, sans broncher. si jamais il se décide à lui dire oui pour qu'elle revienne. elle a besoin de ça leo au fond. elle a besoin de se sentir en sécurité. c'est juste qu'elle a beaucoup de mal à l'assumer. les bras croisés sur sa poitrine, elle grelotte sans s'arrêter d'avancer. cette route semble interminable, elle espère se diriger dans le bon sens parce que le retour risque d'être encore plus dur, elle n'est pas sûre d'avoir la force de l'effectuer ce soir. les yeux dans le vide, elle se rend compte de la lumière qui a soudainement illuminé son chemin, elle se retourne pour voir d'où elle provient. des phares de voiture l'éblouissent, elle met ses doigts devant ses yeux pour y voir quelque chose. le véhicule s'arrête finalement à sa hauteur et leo soupire franchement pas d'humeur à repousser les avances d'un pervers. « t'as besoin d'aide? » légèrement surprise par la tête du gars qui n'a ni l'air d'un psychopathe, ni d'un ivrogne, elle se demande ce qu'ils ont tous à vouloir la sauver en ce moment. la rue n'est pas si affreuse que ça quand on s'y habitue. elle se mordille la lèvre ne sachant quoi répondre, elle observe un instant le long chemin qui l'attend encore et puis capitule intérieurement. elle cherche son stylo cassé dans sa poche et sur sa main mouillée, elle note des mots qui menacent de très vite s'effacer. « je suis pas une pute. j'ai pas d'argent. j'ai juste besoin d'un chauffeur. » et d'aran, elle a besoin d'aran. mais de cette information, il peut en faire que dalle.

Un ange perdu dans l’enfer, c’est tout ce que la fille lui inspire lorsqu’il se penche vers elle et découvre un visage poupon entre quelques mèches de cheveux trempées. Merde… Il s’attendait pas à ce qu’elle soit si jeune. Elle a l’air frigorifiée, un peu perdue et la manière dont elle serre ses bras contre elle montre que la température de son corps s’approche plus de celle du sol que celle du soleil. Il se demande un instant si les gens qui l’ont mise au monde se doutent d’où elle se trouve, ce qu’ils en penseraient. Personne n’imagine qu’une fille comme elle se retrouverait dans un quartier aussi pourri une nuit aussi noire et pourtant. Nikos est là lui aussi seul. Si il y a bien un truc qu’il a comprit ces dernières années, c’est que contrairement à ce qu’il avait toujours pensé il n’a jamais été le seul à se sentir aussi seul. C’est même le point commun à toutes les âmes en peine qui flânent dans ces rues. La solitude les ronge un à un et la plupart du temps ils se contemplent les uns les autres sombrer. C’était plus facile que de montrer la voix, que d’espérer la lumière. A croire que sous la lune de Night Falls l’espoir n’était jamais permis. Sauf ce soir, Nikos tend la main. Les phares de sa vieille Chevrolet percent la nuit et la pluie, offrent un foyer de lumière rassurant pour quiconque croise successivement le regard du brun et les halo de lumière au sol. Nikos inspire un tas de trucs, sauf la peur. C’est du moins ce qu’il espère, car la laisser au bord de la route se rajouterait à la liste de choses qui l’empêchent de sombrer dans le sommeil la nuit une fois tombée. La fille semble hésiter un moment, avant de glisser une main dans sa poche. Nikos s’attend à tout et hésite à remonter la vitre sauf qu’il est du côté conducteur donc il risque pas grand chose en théorie. Il est habitué aux nanas armées depuis qu’il a vu Gemma par deux fois pointer un flingue. Une fois sur lui, une fois sur un autre. Sacré petit chaperon rouge. Mais la blonde n’est pas la rousse car contre toute attente, c’est un stylo qu’elle sort de sa poche. Nikos hausse les sourcils, perplexe lorsqu’il la voit griffonner sur un papier qu’elle lui tend. Il lit le papier, puis la regarde à nouveau. Alors là, c’était une situation inédite. C’est lui qui était décontenancé maintenant. Mais même si la situation était bizarre, ça n’empêchait pas qu’elle avait besoin d’un chauffeur et que lui possédait une voiture. Pas une pute, pas d’argent, juste un chauffeur. Tant mieux, il avait pas besoin de la première, un peu plus du deuxième mais il ne s’était pas encore improvisé chauffeur Uber donc…  Monte. Il se penche pour ouvrir la portière de l’intérieur et la laisse prendre place à ses côtés. Il augmente le chauffage une première fois, puis le met à fond lorsqu’il entendit la fille claquer des dents, transie de froid. T’as mal choisi ton jour pour une balade… dit-il, sarcastique au possible. Il enlève le pied de l’embrayage et la voiture se remet à rouler plus doucement cette fois-ci. La visibilité est mauvaise et il ne veut surtout pas affoler sa passagère. Alors où est-ce que je t’emmène ? Elle devait sûrement être sur le retour pour rentrer chez elle. Les bus ne passaient plus à cette heure-ci et les voitures se faisaient rares. T’as eu de la chance de tomber sur moi, t’es dans le pire quartier de la ville. Il ignore si elle est muette ou juste timide, le fait est qu’il s’en fout. Le silence ne l’a jamais dérangé. Il pouvait parfaitement s’en accomoder.

elle observe la surprise se peindre sur le visage du jeune homme alors qu’elle lui tend ses paroles écrites à travers la vitre baissée de sa voiture. elle est habituée aux réactions que son mutisme inspire, généralement les gens deviennent méprisants, ils se sentent offensés qu’elle ne prenne pas la peine d’ouvrir la bouche pour eux, tous ces gens se trouvent si merveilleux, s’imaginent qu’ils pourront la sauver en la faisant parler. tous des abrutis. elle sait qu’aran est un peu pareil qu’il trouve qu’elle est idiote de ne pas s’exprimer avec des mots plutôt qu’avec des bouts de papier, et ça l’agaçait tellement le garçon qu’il a réussi à la faire parler. c’est comme ça qu’elle a compris qu’il y avait des gens bien plus entêtés qu’elle sur cette planète et qu’il en faisait partie.  mais ce n’est pas parce qu’elle discute quelques fois avec lui qu’elle se sent de le faire avec tout le monde, elle a encore besoin de s’habituer, de se sentir en confiance, ça fait si longtemps que sa voix n’avait pas fonctionné, l’entendre la fait se sentir mal à l’aise. le garçon dans la voiture acquiesce en lisant et lui demande de monter, elle soupire de soulagement leo parce que le temps empire et qu’elle a peur de jamais arriver au bout de cette route, elle monte dans la voiture sans trop hésiter, après tout ce type a un visage plus amical que tous ceux qu’elle a vus jusqu’à présent dans night falls, elle sait aussi que les apparences sont parfois trompeuses, mais faut pas oublier que c’est qu’une gamine, elle est naïve. elle remercie intérieurement l’inconnu d’augmenter le chauffage à fond pour qu’elle puisse se réchauffer, elle est assez consciente de tremper le siège passager, mais c’est lui qui lui a demandé d’être ici après tout. « t’as mal choisi ton jour pour une balade. » elle hoche la tête en soupirant, la pluie tape au dessus d’eux comme une forcenée. il roule prudemment, elle se détend. « alors ou est-ce que je t’emmène? » c’est le hic dans tout ça, elle ne sait vraiment pas. aran ne voudra peut-être plus de sa présence, mais est-ce qu’elle a vraiment le choix? elle s’est faite une promesse à elle même, autant essayer de la tenir, au pire, elle se fera rejeter. « t’as eu de la chance de tomber sur moi, t’es dans le pire quartier de la ville. » elle sait leo qu’ils se trouvent dans un endroit loin d’être fréquentable, c’est lui qui sait pas que c’est elle aussi qui l’est pas. elle se mord la lèvre puis sort de nouveau un stylo et du papier humide. elle prend comme appui le tableau de bord pour noter quelques mots. « je n’ai pas d’adresse précise à te donner, est-ce qu’on peut aller dans le centre pour chercher mes affaires? ensuite je saurais me repérer. » elle examine encore son visage quand il tente de lire ses mots sans les tuer en tombant dans le ravin. peut-être qu’il ne voudra pas l’emmener plus loin que le centre, mais tant pis, si elle doit rester sous la pluie cette nuit autant que ce soit dans un endroit qu’elle connaît bien. finalement presque au niveau de son abri provisoire leo a une bouffée d’angoisse, elle voit le regard noir d’aran, la porte qui claque. et elle se remet tout de suite à écrire. « tu connais pas un endroit ouvert même la nuit? » cette fois, elle sent qu’il se pose des questions. c’est qu’une gamine de même pas vingt ans qu’il trimbale dans sa voiture, il s’imagine sûrement la fugue ou quelque chose dans le genre. « la vérité c’est que j’ai nulle part où aller. » ça lui fait mal de lui apprendre ça, mais elle sait pas quoi faire ce soir leo, elle se sent perdue. elle a encore besoin d’être sauvée.

Le mutisme ça le connait Nikos. On l'a assez raillé sur le fait qu'il soit si peu enclin à ouvrir la bouche, peu importe qui s'improvise son interlocuteur. Tout passe dans le regard en général, tantôt noir, tantôt vague, tantôt triste, les nuances des sentiments Nikos les décline à l'aide de ses pupilles. Pendant des années, il n'a ouvert la bouche que parce que les conventions sociales l'y forçaient. Il se souvient de son père, fou de rage, qui hurlait en grec de toutes ses forces car son fils refusait de répondre à une simple question ou de simplement lui répondre. La parole était surcôté de l'avis de Nikos, peu de gens le comprenaient. Ils le pensaient généralement malpolis ou asocial, il était carrément asocial et poli lorsque les circonstances s'y prêtaient. De son avis les mots entachaient tout. Gemma et lui en étaient la preuve vivante, tout allait bien jusqu'au moment où l'un des deux ouvrait la bouche. Les mots étaient des couteaux tranchants pour qui désirer faire mal, contrairement au silence qui lui était réconfortant en toute circonstance. Ou presque. L’habitacle de la voiture est loin d'être silencieux, le ciel s'applique à se faire remarquer et l'eau qui s'abat sur la carrosserie fait un vacarme de tous les diables. Il roule et regarde du coin de l'oeil la blonde tirer des bouts de papier de ses poches pour écrire dessus. Nikos se demande un instant si il a le droit d'être malheureux alors qu'il est en possession de tous ses sens. Elle veut aller dans le centre alors Nikos y va, ils sont pas loin. A quelques blocks. Ta famille doit s'inquiéter, tu veux mon téléphone pour les appeler ? Il se reprend, s'insulte mentalement de gros con indélicat mais faut dire que la situation est inédite. Enfin, leur envoyer un message. Il lui faut un petit temps d'adaptation c'est certain, mais la fille s'en offusque pas, visiblement habitué. Mais la suite des messages de l'inconnue le font descendre de 30 étages. Il lit le papier, un peu comme il peut, étant donné qu'il ose pas quitter la route des yeux sous cette pluie diluvienne et relit à nouveau avant de lui jeter un bref coup d'oeil. Comment ça nul part où aller ? Puis Nikos se souvient de ce sentiment qu'il avait quand il était ado et que son père venait encore de lui coller une raclée. Lui aussi avait erré dans les rues de Night Falls au fil des saisons, sans jamais trouver de refuge. Ce qui le mène à s'interroger sur la raison de son errance. Une fugue ? Une dispute avec son mec ? Une foule de questions lui vient en tête puis il se rend compte qu'il s'en tape un peu finalement. Tout le monde a une vie de merde de toute manière dans cette ville ça sera pas la première fois qu'il entend un récit à faire pleurer dans les chaumières. C'est pas son problème. Son problème c'est qu'elle a nulle part où aller et qu'il est face à un dilemme à présent. Il se gare sur le bas côté, près de l'endroit qu'elle lui a indiqué et pousse un long soupir. Il la regarde du coin de l'oeil un nouveau puis déclare. Bon écoutes y'a deux solutions : soit je te dépose à un hôtel et tu te payes une chambre, soit tu viens chez moi, y'a une chambre inoccupée tu peux y dormir le temps d'une nuit pour dépanner mais faudra que tu sois partie le lendemain. Parce qu'en temps normal ce n'est pas une blonde qu'il héberge mais une jolie brune qu'il doit impérativement mettre en sécurité étant donné les conneries qu'elle était capable de faire seule. Une vision de l'appartement enflammé pop-up dans son cerveau et il se demande un instant si un jour il arrêtera de ramener des filles paumées à son appart'. Et les clients qui pensaient qu'il collectionnait les conquêtes. Plutôt les meufs à problèmes.

« ta famille doit s'inquiéter, tu veux mon téléphone pour les appeler? » un rictus dégoûté s’affiche sur le faciès fatigué de la gamine trempée. pas à cause de lui, mais à cause des mots qu’il prononce, famille est une notion qu’elle a depuis bien longtemps rayée de son propre vocabulaire. « enfin leur envoyer un message. » elle apprécie le geste, mais elle soupire tout de même doucement assez fort cependant pour qu’il comprenne qu’elle n’est pas muette, mais simplement loin d’être bavarde. capable de prononcer tous les mots qu’elle voudrait, mais pas l’envie. surtout quand il s’agit de discuter du passé. elle se demande si c’est un alignement des astres qui a lieu ce soir d’abord aran qui ouvre sa bouche, qui pose des questions auxquelles elle n’a pas envie de répondre, plutôt crever. et maintenant, son second sauveur de la soirée. elle soupire encore comme si ça pouvait l’aider à oublier que ses parents se foutent bien de l’endroit où elle peut se trouver et puis même si ça leur importait un peu qu’elle ait disparu, ils ne prendraient certainement pas la peine d’appeler les flics pour signaler qu’elle est partie, parce que ce serait courir le risque qu’on la retrouve et si on retrouve la gamine égarée alors il faudra qu’elle s’explique et c’est bien la dernière chose que les membres de sa famille pourrie voudraient. surtout que leo est prête aujourd’hui, maintenant qu’elle a grandi, elle est prête à raconter aux autorités sans sourciller tout ce que papa faisait, tout ce que son frère reproduisait. elle se ficherait des regards, des jugements, jugée par qui? elle n’a plus personne dorénavant et elle vit mieux comme ça, mieux sans toi, mieux sans amis, mieux sans famille, personne pour la violenter, pour la trahir, pour l’insulter. alors, elle hoche la tête pour dire non quand il lui tend son téléphone. pas la peine d’appeler qui que ce soit. elle sait se débrouiller, elle aurait juste galéré un peu plus si ce type n’était pas arrivé pour la sauver de la pluie et du froid, mais elle aurait finit par y arriver. elle a échappé à bien pire que ça. la blonde se concentre de nouveau sur le paysage qu’elle aperçoit à peine à travers la fenêtre, la pluie semble se calmer peu à peu, mais la nuit risque d’être longue. elle reconnaît l’endroit en quelques secondes, on est dans son coin, vers ses affaires. la voiture se gare sur le côté, il risque pas de gêner qui que ce soit à cette heure-là si ce n’est quelques piétons mal lunés, des ivrognes égarés. « bon écoutes y'a deux solutions. » elle allait ouvrir la portière pensant que c’était la fin de la balade. mais elle se tourne pour l’écouter avant de s’échapper. « soit je te dépose à un hôtel et tu te payes une chambre, soit tu viens chez moi, y'a une chambre inoccupée tu peux y dormir le temps d'une nuit pour dépanner mais faudra que tu sois partie le lendemain. » sa bouche s’arrondit en un petit o parfait, deux propositions d’être logée en moins d’un mois, elle a vraiment eu raison d’arrêter sa course à crescent heights ici les gens sont différents de partout ailleurs. et même si c’est pour une nuit seulement c’est bien plus que ce qu’on ne lui a jamais proposé ailleurs jusqu’à présent. c’est insensé. faute de mieux et surtout parce qu’elle ne veut pas jouer les ingrates deux fois dans la même soirée, elle hoche la tête pour dire oui et mime deux minutes d’attente avec ses doigts. elle revient en moins de ça avec un carton minuscule qui regroupe à peu près tout ce qu’elle possède et dont elle refuse de se séparer quand elle s’installera chez aran. elle ne sait pas exactement encore quand est-ce qu’elle y retournera, mais le conducteur de la voiture vient de lui offrir encore quelques heures de répit avant la décision fatidique. elle fait bien attention quand elle s’assoit que le chat qu’elle a glissé dans la boîte ne s’échappe pas, elle a décidé qu’elle ne pouvait pas le laisser dans le froid et celui-ci était emmitouflé dans ses couvertures comme s’il avait toujours vécu là. sur un carnet cette fois, elle gribouille à l’attention du chauffeur. « merci. moi c’est leo et toi? »