océan pourpre | tim

Si il hurle c’est pour cracher la rancune qu’il a dans les os de ses poings autrement qu’en les fracassant sur sa gueule de prince des bas-fonds. Il ne méprise plus mais exècre, il ne chante plus la haine mais la crachote, laissant dévaler son poison tout le long de sa colonne vertébrale, rejoignant le point idéal pour le faire imploser. L’image du cadavre de Tim lui semble être une image si parfaite et réelle qu’il s’y perd un instant avant d’être de nouveau sortit de sa transe par ses doigts venant entourer son poignet, lui rappellant la réponse qu’il attend encore et qu’il craint en quelques sortes. Il a l’envie de fuir, de brûler l’image même de Rory s’agenouillant à ses pieds, prête à faire offrande de ses lèvres habiles pour infliger les maux les plus délectables. Sa poigne se resserre un peu plus sur le col de celui qui lui fait face, qui anime les flammes d’Enfer qui serpentent dans son âme, tournoyant dans une danse infernale, jetant l’acide de ses mots sur ses plaies à vifs. Il entrouvre les lèvres pour le presser d’ouvrir les siennes et de lui vomir la vérité ou celle qu’il voudra bien entendre. Nox cille, serrant les dents à s’en faire grincer les mâchoires, le torrent noir de sa vil frénésie coulant furieusement en lui à l’entente des mots qui suivent et résonnent étrangement dans la ruelle.

Il en reste muet, étrangement, comme si chaque mots qui auraient pu lui venir se faisait doucement gommer par l’instant qui lui semble irréel. Il envoie valser Rory bien loin, se fiche d’elle et l’écrase, l’écrase si fort qu’elle devient poussière enfouie sous un amoncellement de pensées qui se bousculent et s’emmêlent pour ne créer rien d’autres qu’un immonde bordel qu’il a du mal à comprendre. Il tombe dans le gouffre qu’est son corps, ressent fortement toute la douleur qui pulse dans son visage resculpté par les doigts de Tim, de ses phalanges écorchés, de la mélodie extatique de leurs respirations qui portent dans une ruelle vide. “Ferme la putain !” il s’emporte sans s’embarrasser à trouver des arguments qui ne tomberont que dans l’oubli. Tim et lui sont juste deux corps en effervescence, se heurtant si violemment qu’il ressent chaque parcelle de son putain de corps usé et brinquebalant. Il serre les dents, ses opales le fusillant et son esprit cherchant mille manières de le faire hurler pour enfin l’achever. Tim porte le nom d’un cancer qui commence à lui gangréner l’âme. Il en a subitement assez, relâche la pression de ses doigts, prêt à baisser les armes. Pour ce soir. Il n’a pas envie de penser à Rory et lui, ni de penser aux lèvres qui ont pu se mouvoir l’une contre l’autre pour s’amouracher de langues trop curieuses. Il lâche un soupir, comme subitement désoeuvré, dépassé et ivre, l’alcool serpentant dans ses veines prenant radicalement le dessus.

La porte s’ouvre de nouveau, faisant dévier son regard de l’océan agité qui sert de regard à Tim, hameçonnant le visage du type trop curieuse et qui interrompt de nouveau leur incartade. Nox finit par se reculer de lui-même, lançant un regard de chien enragé à cet inconnu qui tente de le repousser un peu plus et entraîne l’adversaire loin de lui. Les lèvres restent entrouvertes sur des mots qui resteront silencieux. Il a abandonné et s’en veut brutalement de ne pas avoir défoncé le visage figé dans une folle arrogance, qui lui faisait face. Nox se finit par passer le dos de sa main contre sa bouche peinte en rouge, titubant comme une silhouette sortit des Enfers pour retourner dans son royaume où les sourires se cristallisent et les secrets se pressent entre eux. Il y revient avec le goût de l’inachevé sur la langue, ses poings hurlant encore de la chaleur de la violence. Il accueille sa soudaine solitude avec amertume, trop conscient de cette glace reprenant doucement sa place dans son ventre, son être entier voguant sur les vagues d’une rage qui ne s’amenuise pas, qui tremble, désir, jouit d’une envie viscérale d’éclater sans jamais trouver de refuge pour enfin s’éteindre.