les pieds dans l'eau. (zachary&junior)

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zachary&junior

il ouvre les yeux dans le noir total. sa main tâtonne sur le matelas à la recherche de la télécommande de la télévision, bingo, elle lui tombe sous les doigts, il appuie sur l’un des seul bouton qui sert vraiment on/off. l’écran diffuse une lumière bleutée dans la pièce juste de quoi pouvoir regarder autour de lui et apercevoir quelque chose, il baille à s’en décrocher la mâchoire. son téléphone indique qu’il est presque dix-sept heures, bientôt l’heure d’enfiler sa casquette rouge au logo effacé et de partir travailler, livrer des pizzas à des emmerdeurs qui finiront toujours par lui claquer la porte à la gueule en criant « en retard. » alors qu’il a deux minutes d’avance sur l’horaire et son patron qui le regardera d’un oeil mécontent parce qu’il aura pas ramené un seul billet en plus. il soupire, saute du lit et c’est là qu’il se rend compte. il est bercé par le silence, c’est troublant d’habitude l’appartement est toujours en effervescence entre les soirées, les disputes et les rires des autres ou le simple brouhaha de la radio allumée. mais aujourd’hui rien de tout ça, ça le fait sourire d’être aussi tranquille. junior, il est fils unique et il avait l’habitude du calme mortel de son chez lui. quand il était gamin ça lui tapait sur le système, mais parfois dans cette colocation brouillon, ça lui manque quelque peu. quand il sort de sa chambre pieds nus, il espère que quelqu’un a nettoyé depuis la soirée d’hier, qu’il n’y a plus d’alcool renversé par terre, normalement c’est chacun son tour, mais il arrive que presnel parte en oubliant que c'est à lui et c’est toujours junior qui finit par s’y coller, parce qu’il a pas envie de faire tout une histoire de rien et puis même si sa chambre est un bordel sans nom, il aime pas que les autres pièces de la maison soit dans le même état, junior c’est un paradoxe, une contradiction. à lui seul, on se pose des tonnes de questions. il avance jusqu’à l’une des salles de bain, il y en a deux, l’une est aux gars, au début c’était junior dans son coin et les deux autres se partagaient la seconde, mais loan a revendiqué le droit d’en avoir une pour elle seule et personne a su quoi dire à part oui. et puis maintenant y’a zachary, alors ça coule de source de laisser les meufs baigner dans leurs produits de make-up et boule de bain lush, tant dis ce que les mecs se contente d’un gel douche pour trois. il allume l’eau de la douche pour qu’elle puisse chauffer pendant ce temps, il ouvre celle de l’évier, retire son tee-shirt et attrape un rasoir. même pas le temps de retirer les deux, trois poils qui lui recouvrent les joues que l’un des joints saute. ça le fait jurer fort, et il jure encore quand il voit le torrent qui se déverse dans la salle de bain. il cherche la source de la catastrophe, les pieds dans l’eau, celle-ci déborde déjà sous la porte quand soudain elle débarque sans prévenir la gamine. elle arrive paniquée, sûrement qu’elle l’a entendu s’exclamer et puis elle a du voir l’eau, mais elle est trop rapide et cette idiote manque de glisser sur le sol mouillé. il rattrape son bras presque à temps.. « MAIS BON DIEU, T’ES COMPLÈTEMENT STUPIDE? » ses fesses se retrouvent sur le carrelage, alors que lui a dû s’accrocher au rebord de l'évier pour pas se casser la gueule à son tour. il lui crie dessus sans même réfléchir et comme c’est pas non plus un total connard, il décide de l’aider à se relever, bien qu’une foutue rivière coule encore dans la pièce. il croit pas qu’il serre son poignet si fort que ça, d’accord il est agacé, et il l’a peut-être un peu secoué, mais quand il la relève et que ses yeux tombent sur la manche mouillée et remontée sur son bras, il tilte. un bleu se forme déjà. il peut pas savoir lui qu’il était déjà là. il ouvre la bouche pour dire quelque chose et puis il voit, y’a le sang qui tranche étrangement avec le revêtement blanc du sol, ce rouge foncé qui forme déjà des petits sillons dans le lac qu’il a créé. il fronce les sourcils. « tourne toi ! » mais pas besoin, elle se touche la tête et c’est là qu’il voit d’ou la couleur provient. c’est à son tour de paniquer maintenant, c’est sa faute ça. il aurait pas dû lui crier dessus, il aurait pas dû lui tendre la main. il a fait qu’empirer les choses, ce crétin. « il faut t’emmener voir un médecin. »

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zach et junior, ils sont collés dos à dos. enfin, pas exactement. y a dix petits centimètres de plâtre qui se dressent entre eux, le mur qui sépare la chambre de junior et celle de presnel. symétrie saisissante puisque zach se réveille de sa sieste au moment même où junior émerge de ses draps enchevêtrés, presse le bouton du vieux poste de son petit copain alors que le garçon allume sa propre télé. fichue habitude américaine que d’en avoir une dans chaque pièce, aurait grommelé sa mère. âmes parallèles. la comparaison s’arrête là, puisque zach compte bien rester flâner à la maison ce soir. elle a bien des livres à rendre à la bibliothèque, mais elle est perpétuellement en retard et la gentille employée de l’accueil annule systématiquement ses amendes – il faut dire que zachary lui apporte des cupcakes de temps en temps pour le déjeuner. elle s’étire avec langueur, grimace lorsque l’un de ses bleus rentre en contact avec le bois du lit. l’appartement a l’air inhabituellement vide et c’est ce qui pousse la brunette à s’extirper de la couverture. autant en profiter pour filer se laver. elle n’aime pas se dévêtir quand il y a du monde à la maison, même si elle se sait protégée par le verrou sur la porte de la salle de bain. l’idée d’exposer ses quelques bleus sous la lumière crue de la douche alors que des gens se trouvent à quelques mètres d’elle la met profondément mal à l’aise. elle s’emmitoufle dans le peignoir de presnel qu’elle a mis par-dessus ses vêtements, les manches trop grandes pour elle lui tombant sur les mains. on est jamais trop prudent. passe devant la porte ouverte de la chambre de junior. elle esquisse un sourire, pas de risque d’être dérangée avec celui-là, qui semble se défiler à chaque fois qu’elle pointe le nez dans une pièce. ça lui trotte dans la tête, à zach. peut-être qu’il déteste le bruit ou qu’il n’aime pas les filles ou… qu’il lui en veut de ne pas payer de loyer ? elle traverse le salon en jetant un regard alentours, remarquant une petite flaque de bière oubliée entre la table basse et le canapé. c’est elle qui a récuré le sol et jeté les bouteilles vides, ce matin. elle a insisté pour que presnel lui prête main forte, après tout, c’est plus chez lui que chez elle ici, mais il a aboyé un sec j’ai pas l’temps et elle a pas persisté, zach. c’est vrai qu’il a d’autres soucis en tête que le ménage, en ce moment, presnel. zach, elle est pas maniaque du tout de toute façon. elle essaye simplement de maintenir la chambre dans le meilleur état possible, se dit naïvement qu’une grosse déprime comme celle que son copain est en train d’affronter, ça passe toujours plus vite dans le propre… non ? elle jette un coup d’œil à la salle de bain des garçons dans laquelle junior est visiblement en train de se préparer et rougit légèrement à l’idée que les mecs se tassent tous dans la plus petite des deux, alors qu’ina et elle prennent des bains langoureux. zach, elle aurait aimé qu’ina s’abstienne d’éjecter les garçons à son profit parce qu’après tout, elle ne paye même pas de loyer, elle. mais presnel lui a dit de lâcher l’affaire, que de toute façon junior n’avait pas l’air de vouloir partager un espace avec elle, alors le statu quo n’a pas bougé. zach, elle se dévêt à demi avant de se raviser et de considérer le ballon d’eau chaude d’un air perplexe, se demandant si elle ne ferait pas mieux de revenir tout à l’heure. pas sûr qu’il y ait assez d’eau pour elle et junior en même temps. elle est en train de se rhabiller pour aller attendre qu’il ait fini dans le salon quand elle entend un gargouillement de très mauvaise augure dans la plomberie, suivi d’un bruit de jet soutenu. se rue hors de la salle de bain pour ouvrir la porte de junior à la volée, à mille lieux d’imaginer l’inondation catastrophique qui vient de débuter. eau qui vient lui ébouillanter les orteils. zip. son pied se fait la malle sur le carrelage glissant et elle sent les ongles de junior lui mordre le poignet pour la retenir. mais mon dieu, t’es complètement stupide ? "j’suis désolée !", qu’elle articule dans un cri alors que son coccyx heurte le sol et son crâne l’évier. elle tente de se remettre seule sur pieds en agrippant le rideau de douche, qui se craque lentement sous son poids. zut. zut zut zut. elle est aveuglée pendant un moment, ne sent plus rien d’autre que les doigts d’un junior en colère enroulés autour de son bras, lui qui la soulève sans ménagement. elle reprend ses esprits en le voyant poser les yeux sur son hématome violacé, rabat sa manche rapidement en priant pour qu’il ne se demande pas quelle en est la cause. elle plisse les yeux, tente de chasser le mal de crâne qui la cloue sur place alors qu’elle balise en se rendant compte que junior lui a donné un coup de rasoir dans la tête. à moins qu’elle n’ait heurté trop violemment le carrelage dans sa chute ? zach, elle lui dit rien alors qu’il la traîne hors de la salle de bain, trop absorbée par la vue de son propre sang qui goutte lentement sur le peignoir jaune. jolie association de couleur, qu’elle se dit en ayant l’impression qu’elle va s’évanouir. elle ouvre la bouche pour rassurer junior – de toute façon il est hors de question qu’elle aille voir un docteur, qui aurait vite fait de comprendre que quelque chose d’autre ne tourne pas rond. "fallait m'dire dès l'début que j'devais m'ouvrir la tête pour attirer ton attention", qu'elle murmure avec humour avant de s’écrouler sur le sofa.

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junior, le sang c’est pas son fort. dans les films, dans les vidéos gores, il observe l’hémoglobine couler à flots sans broncher, mais dans la vie c’est une autre histoire. il se souvient d’une journée quand il était gamin, il jouait à la récréation avec d’autres garçons, il était à quelques centimètres du sol perché sur un truc dont il n’a que des vagues souvenirs, un copain arrive en hurlant, il lui plante son coude dans le dos, ça suffit à faire vaciller junior du côté du sol, sa tête ne s’écrase pas contre le bitume, ses mains le rattrapent juste à temps, mais ses genoux éraflent violemment l'asphalte noir, il se relève les larmes aux yeux qui menacent de déborder, mais la fierté qui est plus forte, ses prunelles topaze tombent sur la peau écorchée et puis c’est le trou noir. il s’est évanoui qu’ils lui on dit, maman est venue le chercher, elle lui a fait son goûter et l’a bordé, mais après ça ce fut difficile de confronter son gamin aux prises de sang et rendez-vous chez le médecin. il avait en horreur le sang. il prend soin de respirer correctement en regardant la main rougeâtre de zach disparaître dans ses cheveux une nouvelle fois comme pour recueillir plus de sève entre ses doigts, il tourne légèrement les yeux juste pour pas tomber à la renverse à son tour. « ça pourrait être grave » il sait qu’une brèche sur le crâne saigne plus qu’une coupure au doigt, il veut pas l'inquiéter pour rien n’empêche qu’elle est en train de déambuler dans la maison comme si de rien était, et que lui, il veut pas avoir ce qui pourrait lui arriver sur la conscience, les commotions cérébrales sont pas des choses qu’on diagnostique sur le canapé du salon, et pourtant c’est là qu’elle s’assoit, le peignoir de son mec tâché qui traîne sur le sol, un peu de sa peau dorée qui dépasse du col. il déglutit, pense encore au sang pour réfréner le sien qui coule soudainement plus vite dans ses veines. « sérieusement, zach, on devrait voir quelqu’un, je peux appeler un docteur à domicile. » il ne se savait pas du genre mère poule, mais il n’avait jamais blessé quelqu’un avant ça, évidemment rien n’était intentionnel, mais il se sent plus coupable que jamais. si je n’avais pas ouvert tous les robinets en même temps, si j’avais fermé la porte à clé, si je ne lui avais pas attrapé le bras comme si elle était une vulgaire poupée, si je n’avais pas crié, peut-être que… peut-être que… il sait que ressasser ne sert à rien, mais il peut pas s’en empêcher. il se dit que si elle veut pas voir un médécin c’est qu’elle est certainement allergique à eux, elle aussi, ceux qui viennent à la maison sont plus rassurants, moins inquiétants. mais là encore, elle secoue la tête pour dire non. non, non, non. il commence par être légérement irrité par la situation, c’est quoi son problème? il savait pas qu’elle était si têtue, bordel. puis alors qu’il recommence un sermon pour qu’elle lui donne raison, elle lâche un doux rire. et d’une voix pleine d’humour, elle lance. « fallait m'dire dès l'début que j'devais m'ouvrir la tête pour attirer ton attention » leurs yeux se percutent, il retient son souffle tant dit ce qu’elle s’enfonce un peu plus dans le sofa. la colère surgit sans prévenir, la rage qu’elle ait remarqué à quel point il l’ignorait peut-être, la peur de se faire démasquer de ses sentiments insensés? peu importe, il lui crache à la figure, bien qu’elle soit blessée : « qu’est-ce que ça peut te foutre d’attirer mon attention? t’as besoin d’avoir tous les mecs autour de toi, pour te sentir exister? » lui qui s’était agenouillée près d’elle se relève d’un bond. « oh, et puis démerdes-toi. je suis pas ton gars. si tu crèves sur le sofa, j'appellerais directement la morgue. »

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jaune et rouge qui se mélangent devant ses yeux un peu flous. jolie association de couleur, qu’elle se répète bêtement, un peu apathique sur les coussins, essayant de chasser la douleur qui résonne encore dans son crâne. zach, elle s’inquiète pas outre mesure. elle passe une main sur la coupure en grimaçant, examine le sang poisseux qui lui colle un peu les doigts, se sent curieusement capable de gérer. c’est sacrément embêtant, c’est sûr, mais elle n’est pas en train de se pâmer à la vue du liquide rouge qui perle sur le vêtement qu’elle laisse légèrement glisser sur le sol. elle aurait cru, pourtant – elle qui n’a jamais eu d’accident, parents trop anxieux certainement pour prendre des risques avec leur précieuse mioche. pas étouffants, ils lui ont toujours laissé son autonomie, à zach. mais suffisamment prudents pour lui avoir épargné les urgences – en fait elle n’a jamais mis les pieds dans un hôpital, zachary. jamais. elle ne répond pas immédiatement à junior qui s’inquiète plus qu’elle, paradoxalement, trop occupée à tenter de calmer son cœur qui bat la chamade. elle s’est faite peur, c’est certain, mais malgré le lent écoulement du sang sous ses cheveux, ça a l’air d’aller. une petite virée à la pharmacie – au moins – pour se rassurer ne serait pas de trop, mieux vaut prévenir que guérir avec les traumatismes crâniens. junior insiste sur ce point et elle se sent royalement idiote de lui dire non, ça va, laisse tomber, alors qu’elle est absolument de son avis. mais si visite chez le docteur il doit y avoir, ce sera seule. sans avoir à s’inquiéter des yeux perçants de junior qui risqueraient de tomber sur un deuxième bleu, quelque part sur ce petit corps, et d’avoir des raisons pour nourrir des soupçons. elle a déjà suffisamment merdé avec luca, hors de question de courir un risque supplémentaire. zach, elle desserre tout de même son col parce qu’une soudaine bouffée de chaleur lui fait monter le rouge aux joues. elle aimerait que junior capitule, qu’il chasse cet air soucieux de son visage. ça aurait pu être bien pire, ils sont tous les deux en un seul morceau, les orteils cramoisis et un peu ébouillantés – et puis il y a tout ce sang – mais elle est certaine qu’une compresse fera l’affaire provisoirement. … non ? elle esquisse un autre de ses sourires, dévoile ses petites dents alors qu’elle l’entend proposer d’appeler un médecin directement à la maison. c’est gentil, très gentil. il lui parle comme quelqu’un qui la connaît bien, qui saurait qu’elle ne connaît pas la salle d’attente des urgences et qu’elle préfère le calme d’une consultation à domicile. et puis elle note qu'il utilise son diminutif et sans qu'elle sache très bien pourquoi, ça lui fait plaisir. elle ne l'a jamais entendu prononcer son prénom, jusqu'ici. elle veut le remercier, accepter cette proposition délicate. peut-être dire un mot sur le fait que c’est vraiment cool, de rester là pour elle. elle sait bien qu’il travaille ce soir, junior. mais rien de tout ça n’arrive aux oreilles du garçon parce qu’elle préfère le piquer, trop taquine pour s’en empêcher, dévoilant une faussette avec malice. ça va mieux – un peu – et la dernière personne qui lui était hostile dans cette colocation l’observe enfin sans ciller, que demander de plus ? zach, elle ne se souvient pas d’une seule fois où junior l’a fixée plus de trois secondes. en fait, elle est en train de se repasser le film de leurs quelques interactions lorsqu’elle remarque son visage crispé, visiblement agacé par sa remarque qui se voulait légère. susceptible, junior. il ne l’a jamais été avec les autres, mais ses traits de caractères positifs s’effacent lorsqu’il a affaire à elle, visiblement. et puis ça ne doit pas arranger, qu’elle s’obstine à refuser les services qu’il lui propose. elle sent quelques secondes avant qu’elle va s’attirer les foudres du sale gosse, referme la bouche et plonge le nez dans un coussin en se demandant ce qu’elle a fait de mal alors qu’il aboie avec une violence qui la déconcerte. qu’est-ce que ça peut te foutre d’attirer mon attention? t’as besoin d’avoir tous les mecs autour de toi, pour te sentir exister? zach, les piques qui n’attendent pas de réponses, elle ne maîtrise pas. alors elle se débat maladroitement en essayant d’en donner une, balbutie un petit "j’ai pas dit que j’voulais que tu fasses gaffe à moi ! je… c’est juste que j’suis bavarde et toi pas trop". elle tente la pirouette – elle veut pas le faire culpabiliser, zachary. oh, et puis démerdes-toi. je suis pas ton gars. si tu crèves sur le sofa, j'appellerais directement la morgue. il crie trop fort, ses mots durs et inexplicables accentuent le mal de tête de la brune qui presse ses mains contre ses tempes et l’observe sans rien dire, lui laisse le temps de décolérer. "mon gars est pas là en tout cas". mon gars est jamais là en ce moment, junior. "tu veux bien le remplacer juste le temps de me trouver du tulle dans l’armoire de la salle de bain ? j’crois en toi, tu vas y arriver." elle lui fait des grands yeux, c’est quand même bête de partir au quart de tour pour ça, non ? et puis elle se rend à l’évidence. il la déteste, en fait.

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“mon gars est pas là.”ouais, et bien ça te fait une belle jambe à toi. tu tournes en rond, les mains sur le haut du crâne, un peu comme un lion en cage. “tu veux bien le remplacer?” des mots qui en apparence ne sont que innocents, elle se doute pas de tes tourments intérieurs pour elle c’est juste le moyen de pas rester seule avec une brèche sous les cheveux. mais pour toi, c’est juste la goutte d’eau qui fait déborder le vase, c’est comme si elle avait allumé l’étincelle de ta colère et celle-ci se transforme en brasier sous ses yeux. tu pivotes de nouveau vers elle, tu lances le regard le plus noir et le plus hostile que tu as en réserve. comme si tu n’en avais pas déjà assez fait. “je crois en toi, tu vas y arriver” mais qui est cette fille? elle te prend pour un enfant de quatre ans ou quoi? tu décides que tu en as marre, que tu fais qu’aggraver la situation et qu’elle c’est vraiment pas quelqu’un qui sait trouver les mots, tu fais demi-tour jusqu’à ton antre, claque la porte assez fort pour qu’elle comprenne que non, elle ne peut pas rentrer à l’improviste comme dans la salle de bain ou sinon c’est pas le carrelage qui lui fera mal à la tête, mais ta voix quand tu lui hurleras de dégager. tu poses ton front contre le battant en bois limite fatigué de ton propre comportement, tu détestes que les gens te traitent comme un gamin attardé, avant ça arrivait tout le temps, dès que t’ouvrais la bouche les autres se moquaient, maman te reprenait. parce que tu communiquais pas comme tout le monde, parce que pour eux ton charabia ressemblait à rien, puis il y a eu cette prof en primaire, les tests, les questions, les évaluations et la réponse insoupçonnée jusque là. surdoué. c’est ce que tu étais. et soudain, le caractère anti-social, les crises, les humeurs instables tout prenait un sens et on te l’excusait, au début c’était grisant, tu sautais des classes, tu avais toute l’attention des parents, du corps enseignant, et puis ça t’a suffit, ces regards sur toi en permanence, ce truc qu’avait les gens de t’enfantiller. ton intelligence ne t’a jamais paru être un cadeau, mais plutôt un fardeau, dans les situations normales, tu ne sais pas réagir comme les autres généralement tu piques une colère, tu fuis. c’est plus simple comme ça t’as tout le loisir de penser à ce que t’aurais pu dire ou faire sur le moment, même si c’est trop tard. enfermé depuis dix minutes dans ta chambre, tu soupires, ta main glisse sur la poignée de la porte pour la faire tourner, tu vas dans la salle de bain des filles pour trouver ce qu’honey a demandé et tu retournes dans le salon complètement calme à présent. heureusement pour toi, elle n’a presque pas bougé. tu tends les bandages vers elle en signe de reddition. “je pourrais te préparer un truc.” tu chuchotes doucement comme pour contraster avec les cris de tout à l’heure. “un chocolat peut-être?” tu enfonces tes paumes dans les poches de ton jean. “je pense que tu dois pas rester inactive comme ça.” tu pointes sa position mi-allongée, mi-assise sur le canapé.

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palpage méthodique de la zone abimée de son crâne, honey grimace. lève un regard plein d’attentes sur junior, qui a l’air littéralement tiraillé entre l’envie d’imploser et celle d’exploser. honey, elle comprend pas trop pourquoi. après tout, elle a cru bien faire en venant à sa rescousse dans la salle de bain, même si la situation s’est rapidement envenimée à cause de son arrivée. toujours est-il qu’elle balise à l’idée de rester là toute seule à chercher un moyen de faire s’arrêter l’écoulement poisseux. mais junior, il ne l’entend pas de cette oreille, visiblement. il semble laisser libre cours à une rage contenue depuis longtemps et honey, elle n’y comprend rien. elle est juste la copine de son coloc, elle prend pas vraiment de place, fait des pancakes le dimanche… il est si facile de la détester ? le regarde conclure le débat qu’il tient avec lui-même et balayer ses mots gentils en la plantant là. le bam de la porte retentit et résonne entre les parois du crâne de la brune, qui amorce un mouvement pour s’extraire du sofa et se diriger vers la chambre. elle ne redoute pas les mots durs et le courroux des autres, honey. elle redoute plus que tout de ne pas comprendre ce coup de sang. elle a peur d’avoir fait de la peine à junior, d’une manière ou d’une autre – même s’il est difficile de l’imaginer. à moins qu’il pense qu’elle a fait exprès de s’ouvrir la tête pour le faire chier, et ça serait franchement idiot. de toute façon, elle n’arrive jamais à destination. elle s’appuie contre le papier-peint du mur pour éviter de chanceler encore davantage, se morigène silencieusement de ne pas être capable de rester dans le conflit avec quelqu’un, et surtout pas avec junior. c’est bizarre, mais ça la touche beaucoup. peut-être parce que presnel lui fait tant de reproches et donne si peu de valeur à sa personne en ce moment que voir son comportement adopté par d’autres la fait douter encore un peu plus. elle n’a pas l’habitude de se voir détestée, honey. à vrai dire, tout le monde l’adore dans son cercle social. parce qu’elle est gentille et de bon conseil – ça au moins, elle le sait. elle a cette présence solaire qui attire l’attention et pousse son entourage à prendre grand soin d’elle. avec junior, c’est visiblement trop. peut-être qu’il exècre les réactions trop enthousiastes, parfois trop naïves et enfantines de hon mais si ça lui hérisse les poils, elle ne peut rien pour lui. elle est comme elle est, et s’il a décidé de ne pas l’accepter, tant pis. elle continuera à lui offrir chaque sourire, chaque bien dormi ?, chaque attention et il il finira peut-être un jour par arrêter de les repousser. ou peut-être pas. elle quitte enfin le mur qui lui sert d’appui et se dirige en titubant légèrement – toujours prise de quelques vertiges suite au coup violent – vers la cuisine pour y trouver quelque chose de sucré qui pourrait chasser les nuages qui lui obstruent un peu la vue, comme un signal qu’elle risque de s’évanouir. la tête lui tourne un peu trop et elle capitule, retourne sur le canapé et respire lentement, les yeux mi-clos. ça va passer. elle a eu tord de se lever trop vite, c’est tout. et puis elle croit rêver un instant. le visage de junior qui la fait sursauter, deux yeux qui la regardent et elle prend le bandage qu’il lui tend avec reconnaissance. lui offre le sourire spécial junior, celui qui est beaucoup plus large qu’avec quiconque d’autre – parce qu’elle doute qu’il remarque les sourires de taille normale. un chocolat peut-être? elle est pas du genre à en vouloir à qui que ce soit, honey. alors elle passe l’éponge et répond simplement "avec plaisir" et se demande vaguement ce qui lui a pris. fourre ses mains dans le plaid du canapé pour qu’il ne pose pas à nouveau le regard sur son petit bleu au poignet. je pense que tu dois pas rester inactive comme ça. "je vais rester assise encore un peu, j’ai essayé de me lever et ça a pas très bien fini !" elle le rattrape par la main alors qu’il se détourne pour se diriger vers la cuisine. "en fait, j’ai envie de rentrer chez moi et de manger un gros sac de chips ou un truc comme ça." petit rire qui résonne dans le salon vide, elle sait bien que ça doit paraître complètement idiot mais c’est ce dont elle pense avoir besoin là, tout de suite. la certitude de ne pas voir presnel débarquer et la harceler de questions sur sa chute et la saveur de pringles barbecue. elle hésite à lui demander s’il peut la raccompagner, faudrait peut-être pas pousser. décide qu’il y a bien quelque chose sur quoi il peut l’aider. "tu peux m’aider à mettre le bandage ? j’arrive pas bien à le faire sur ma propre tête, à vrai dire." elle relève les yeux vers lui, les doigts toujours au contact de la paume du garçon, et ne le quitte pas du regard. ça sera peut-être même l'occasion d'avoir leur première conversation. please ?

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junior c’est un type particulièrement rancunier. dans des rares moments avec des gens auxquels il tient réellement, il lui arrive de donner des secondes chances à ceux qui ont fauté, mais la plupart du temps, il suffit d’une erreur pour qu’ils soient rayés de sa vie, il ne se laisse pas distraire par la nostalgie, par les pour et les contre, il part du principe que si c’est arrivé une fois, ça arrivera forcément une seconde, puis une troisième. heureusement pour lui, tout le monde n’est pas comme ça parce que des erreurs junior en fait à la pelle, des mots durs qu’il lâche sous la colère, des gestes insultants qu’il fait sans s’en rendre compte, des bourdes qu’il commet sans même les remarquer, et ses amis le pardonnent pratiquement à chaque fois. plusieurs fois, il s’est dit qu’il pourrait se montrer plus conciliant puisque c’est ce que les autres semblaient faire avec lui, mais le naturel revient toujours au galop et quand il en veut à quelqu’un c’est pour toujours. heureusement pour lui honey fait partie de ceux qui pardonnent facilement sans même poser de questions, il se dit que ça ne fait la rendre que plus naïve, il aimerait se remettre en colère contre elle juste pour ça, mais il ne le fait pas. après tout, il a déjà de la chance qu’elle accepte les bandages sans tiquer sur les raisons de son retour dans le salon. il grimace quand elle lui dit qu’elle a essayé de se lever, mais là non plus il ne pipe pas mot, il est content qu’elle accepte sa boisson chaude, ça lui permettra d’avoir les mains et l’esprit occupé, junior déteste ne pas penser. ou penser à des d’autres trucs, comme qu’est-ce qui se cache sous le peignoir de cette fille? “je vais te faire ça alors.” il chuchote toujours, tourne les talons en direction de la cuisine, mais la petite main chaude d’honey vient se glisser dans la sienne, il s’arrête net. junior n’est pas particulièrement fan des contacts physiques, luca est d’ailleurs l’une des rares personnes qui puissent le toucher sans qu’il trouve la sensation étrange ou désagréable, et avec les filles c’est un peu la même chose généralement il boit quelques verres avant d’aller draguer et encore quelques uns s’il sait comment la soirée va se terminer, sinon il serait bien incapable de les déshabiller et encore plus de les embrasser. alors quand honey le touche, il n’est pas surpris de voir qu’il a la chair de poule, des frissons qui lui remontent jusqu’en haut du bras, ce qui est agaçant c’est de constater que ce n’est pas désagréable. il retire sa main avec quelques secondes de retard, mais à une vitesse qui fait quand même comprendre à la gamine qu’elle ferait mieux de s’abstenir la prochaine fois. il trouve qu’il en fait déjà bien plus que d'habitude pourquoi ne peut-elle pas s’en contenter? “tu peux m’aider à mettre le bandage? j’arrive pas bien à le faire sur ma propre tête à vrai dire.” il lâche un profond soupir, il se résout à ne pas lâcher un non catégorique et s’enfuir dans la cuisine pour lui faire son chocolat parce que après tout c’est un peu à cause de lui qu’elle a une entaille de la circonférence d’une pièce de monnaie derrière le crâne. “pousse toi” il dit un peu sèchement pour pouvoir s’asseoir derrière elle sur le canapé. sa main reste en suspend un instant avant qu’il n’applique les compresses, il essaie de ne pas penser qu’il la touche ou du moins de se souvenir que ce n’est que médical. “je pense que ça devrait tenir.” il se lève et sans un mot et part enfin vers la cuisine pour préparer la boisson chaude, d’une main il textote à luca et de l’autre il ajoute le chocolat. quand dans la casserole, le liquide frémit, l’écran de son cellulaire s’allume. luca est aussi rapide que l’éclair quand il s’agit de sms. au lieu de mettre la boisson dans une tasse, junior l’enferme dans une gourde thermique munie d’une paille dont il visse bien le bouchon. “je peux te ramener chez toi avec la voiture de luca.” il lance à la gamine quand il la voit. ce n’est pas pour elle qu’il fait ça, mais pour lui. plus elle est loin, plus il se comporte bien. “est-ce que tu dois prendre des affaires? t’habiller peut-être?”

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elle retient son souffle, se demande s’il va l’envoyer chier une nouvelle fois. ce qui ne l’étonnerait pas puisqu’il a l’air d’être constamment agacé dès qu’elle ouvre la bouche, comme du lait qui se retient de déborder de la casserole sans prévenir. il semble surpris de la réaction d’honey, de sa bonne humeur en dépit de la situation. malgré le fait qu’il vienne de lui gueuler qu’elle peut crever sur le sofa il y a à peine un quart d’heure. charmant. mais honey, elle sait bien que répondre à la rage par de la gentillesse est le seul moyen de pousser une personne aussi butée que junior à se remettre en question. alors elle pardonne sans le faire attendre un instant – ce qui aura peut-être pour effet de l’adoucir. et puis qui ne tente rien n’a rien. elle lui adresse un sourire rempli de candeur et elle voit les traits de son visage se crisper légèrement, comme dans un rictus. il semble se retenir de lui dire ses quatre vérités mais les mots qui franchissent la barrière de ses lèvres surprennent honey par leur douceur. contraste agréable et étrange à la fois. je vais te faire ça alors. elle le dévisage, le retient de sa main, inconsciente des images indiscrètes qu’il tente de chasser de son esprit. persuadée qu’il ne pense à rien d’autre qu’au fardeau qu’elle peut être à ce moment précis. la brusquerie avec laquelle junior pile lorsqu’elle le touche la fait sursauter, ravivant son mal de crâne alors qu’elle se remémore les câlins taquins que luca lui administre devant toute la coloc, et qui ne semblent pas le déranger outre mesure. ouais. mais luca c’est un mec, et brusquement ce détail saute aux yeux de honey. jamais elle n’a vu le jeune brun passer une main dans le dos d’une fille, laisser courir ses doigts sur la jambe d’une nana. c’est à peine s’il claque la bise à ina au réveil. qu’il soit gêné, elle peut le comprendre – même si elle ne l’a jamais considéré auparavant. mais le léger spasme qui lui parcourt le bras et les poils qui se dressent la sidèrent une seconde. wow. il doit vraiment être en manque de contact féminin, junior. il se défait de la prise qu’elle a sur son poignet d’un geste si vif qu’elle est légèrement tirée en avant et manque de tomber cul par-dessus tête. visiblement pas enchanté qu’elle ait pris une telle initiative. message reçu, ils sont toujours pas potes. elle lui fait une place sur le sofa et attend patiemment qu’il ait terminé. je pense que ça devrait tenir. relève les yeux vers lui, ouvre à nouveau la bouche. incorrigible pipelette. "merci beaucoup ! c’est super bien fait, tu étudies la médecine ?" question bête par excellence, si c’était le cas il lui aurait fait un meilleur diagnostic dix minutes plutôt. elle le sait bien, honey. mais elle joue à l’idiote pour en apprendre un peu plus sur le phénomène – pose la question avec légèreté, ignorant délibérément le fait qu’elle lui a déjà demandé ce qu’il faisait dans la vie, trois ou quatre fois, même, et qu’il a trouvé un prétexte pour quitter la pièce avant qu’elle ne termine sa phrase à chaque fois. elle remarque la lumière qui filtre sous le téléphone du garçon, posé à plat sur le bar de leur cuisine ouverte. se demande un instant s’il a un rendez-vous – galant ? non, c’est visiblement luca qui lui écrit, puisqu’il consulte le message et lui propose de la raccompagner. elle se mordille la lèvre, ne répond pas immédiatement. il est certainement en train de rater le travail, quand elle y pense. et puis il y a toujours l’eau dans la salle de bain qui infiltre les parois. il a d’autres soucis et elle se sent coupable de monopoliser son temps. elle détourne le regard une seconde pour qu’il ne remarque pas le trouble sur son visage, débat intérieurement de la possibilité de prendre un uber et de rentrer seule. ouais, mais elle a pas d’argent, en ce moment, honey. merde. elle plonge à nouveau ses yeux dans ceux de junior, et ce qu’elle y déchiffre la convainc d’accepter. déjà, il lui offre ses services – ce qui arrive trop rarement pour qu’elle puisse les décliner. ensuite, il semble avoir vraiment envie qu’elle se casse, et elle se dit qu’il aura de plus grandes chances d’être efficace pour appeler les plombiers et s’occuper de l’inondation quand elle aura débarrassé le plancher, vu comme elle l’agace. est-ce que tu dois prendre des affaires? "non, j’ai ce qu’il me faut." elle répond sobrement, se mure à son tour dans un silence un peu gêné le temps d’aller se changer dans la chambre de presnel. revient cinq minutes plus tard dans un legging et un sweat shirt bien trop large pour elle qui appartient à son mec. petit corps qui semble se noyer dans les plis du vêtement trop grand. elle attend junior à la porte, légèrement rougissante. honey, elle veut toujours prendre soin de tout le monde, mais personne ne veut prendre soin d’elle en ce moment. alors quand la seule personne qui se plie en quatre se révèle être l’individu qui semble la détester le plus au monde, elle n’a d’autre choix que d’être un peu gênée. elle fourre ses mains dans ses poches, piétine devant l’ascenseur. elle va bien retrouver sa langue à un moment, mais il lui faut deux minutes pour assimiler ce qui est en train de se passer. elle concentre son attention sur le voyant qui indique les étages, attend que junior la rejoigne. let’s get going.

» tout dans la queue, j'ai plus d'sang dans la tête
» je ne suis pas jaloux. t'es à moi c'est tout. (zachary)
» pré lien de junior
» de la bière et des filles. (junior)
» les maux mal pansés | junior