effleurer le rêve (ezra)

Déjà échappée, déjà loin. Abandonnant physiquement le foyer familial aux odeurs d'hommes inconnus qui s'enfuiront bien trop vite, lasser de croire à la famille unie quand maman ne fait venir que des oiseaux migrateurs. Et l'esprit voguant, pressée de retrouver un monde qui a la saveur des bonbons d'enfance. Doux, parfois acidulé, envahissant le champ de vision de couleurs agréables. Un cocon inventé qui tient chaud à son âme quand les courants se font glacés. Presque une couverture de survie, quand sa joie de vivre ne repose que sur ses instants d'évasion qui lui laisse le loisir de souffler. Rire. Voler même, si elle l'imagine assez fort. Le monde paraît toujours plus doux quand il est enrobé de rêves. Les réalités lui semblent rarement agréable, en comparaison. Une succession désastreuse d'instants foirés qu'elle remodèle à sa guise les nuits venues, parfois en plein jour. Obligeant son esprit à faire un focus pour discerner le vrai du faux, trouver ce qui existe au milieu des choses qu'elle invente.
un songe,
ou la réalité
Lui, il ressemble toujours à une vision chimérique, l'obligeant à cligner des yeux pour se persuader de sa présence. Pas un mirage dû à ses rêves mais un corps tangible sous son regard dont elle peut sentir l'aura si elle s'approche, palper du bout des doigts s'il elle tend la main. c'est réel, presque trop beau, un signe qu'elle interprète, homme mis sur sa route qu'elle devait croiser, qu'elle doit aborder. deva approche, légère, elle se croirait presque aérienne, emportée par l'euphorie dopée au stress qu'il génère toujours chez elle. Parce qu'elle sait d'avance que ses instants de joie sont des batailles, qu'il tire la couverture à lui, dévoilant son corps au froid mordant de l'indifférence. Si deva sait provoquer des réactions douces à défaut créer l'amour, il n'est pas de ceux qui apprécie son omniprésence et son fanatisme dérangeant. D'autant plus vexant lorsqu'elle sait qu'il fait de femmes ses égéries en refusant l'attention qu'elle lui porte à lui. Ezra est son précipice. Celui duquel elle connaît la rudesse de la chute mais ou l'on ne cesse jamais de s'y jeter à corps perdu. C'est sa gueule sur l'asphalte, à chaque fois, qu'elle oublie plus vite lorsqu'elle songe aux brefs instants imaginaires qui ont suffit à la combler. Si ezra est beau, il ne l'est que dans son univers, quand tout dans la réalité le rend laid face à elle, de ses yeux océan-orageux à sa langue acérée. « tu dessines quoi en ce moment ? » Penchée au dessus de son épaule, l'oeil sur les traits qui entache le papier blanc, dessine ce que deva croit être sa version à lui de l'irréalité. Quand tout vit dans sa tête, chez lui tout vit sur les images qu'il crée, les visages et paysages. Est-ce qu'il crée des mondes, miroir des siens ? Est-ce qu'il y a dans les esquisses les courbes de ses rêves à elle ? Deva aime croire qu'il y a dans son art beaucoup d'imaginaire qui trouve son chemin jusqu'au sien. Les emmène là, au carrefour de dieu sait quoi, assis à côté de lui comme si elle y avait sa place. Celle qu'elle prend plus qu'il ne lui donne. Le rictus au bord des lèvres, aussi sincère que maladroit, attendant la vague. La tempête ezra. Celle qui la noie. « j'ai rêvé d'un aigle qui se posait sur le bord de ma fenêtre et maintenant, je te croise. Est-ce que c'est un signe ? » elle, elle le croit, attendant la même chose de lui. Assentiment dans un regard. Sinon le destin, au moins une évidence. Le hasard n'existe pas, tout est question de planètes qui s'alignent, de bon karma et de vie déjà écrite. Elle n'y est pour rien, elle, si ezra est semble-t-il inscrite sur la sienne.