ce n'est pas un rêve ▽ gina-maria de oliveira

( perd son énergie pour la préserver )

la vie était belle, avant. c’était gina et sa maman, contre le monde. elles avaient été laissées sur le bas-côté, par un père et un mari qui n’en avait rien à faire d’elles, c’était il y a longtemps, les choses avaient changées depuis, elles s’étaient améliorées, la vie avait repris son cour. leur relation était indescriptible. elles ne pouvaient pas se passer l’une de l’autre, même si elles ne se l’avouaient jamais. exposer ses sentiments, chez les de oliveira, ce n’était pas un fort, par peur de se faire trahir une fois de plus par quelqu’un qui n’en vallait pas la peine. c’est pour cela que la famille ne s’est jamais agrandie, la probable souffrance gagnant du terrain chaque jour depuis son départ.
puis il est arrivé un jour où gina n’a plus était la même, l’adolescence changeant les enfants innocents, à jamais perdus dans les couloirs infinis des querelles et portes claquées. elle n’est pas passée entre les mailles du filet, la jeune fille de quinze ans était tombée dans le piège comme tout le monde, le moment où la révolte fait rage, là où les parents se partagent les insultes et les pleurs. mais sa mère était seule, alors elle récoltait tous les fruits des colères de sa fille. elle savait que ce n’était qu’une passade, elle résistait car elle aimait gina plus que tout au monde. puis fut arrivé la fugue. quelques semaines à vivre chez une copine, l’horreur de croiser le regard de sa génitrice du matin au soir. c’était une période de sa vie que regrettait fortement gina, si elle avait pu connaître le futur plus tôt, elle n’aurait jamais fait ces choses-là, les cris, les vols, les coups, les pleurs, si elle avait la capacité de tout effacer, elle le ferait sans hésiter, laissant une partie d’elle au diable s’il le fallait.
car madame de oliveira, celle qui avait gardé le nom de son mari malgré qu’il ne soit plus là depuis de nombreuses années, tomba malade. un vilain cancer. une vie qui allait se continuer dans une chambre d’hôpital jusqu’à la fin. gina, présente, au moins une fois par jour, pour lui tenir compagnie, la soutenir, lui raconter la belle vie qu’elle s’était inventée, trop honteuse de lui raconter la vérité. il fallait qu’elle garde un souvenir heureux de sa fille et ne devait jamais savoir ce qu’il se passait vraiment dans les rues de la ville. avouer à sa mère qu’elle travaillait d’arrache-pied pour payer les frais et les opérations pratiquées par l’hôpital pour essayer de la sauver, jamais elle ne le ferait. Il fallait mieux la laisser croire qu’il lui restait quelques billets dans son compte, au lieu de lui dire que tout avait été utilisé pour les études non achevées et les caprices de gina. elle était redevable. à vie, ou du moins jusqu’à qu’elle s’en aille au ciel, rencontrer les étoiles et parler à la lune. elle imagine déjà ce qu’elle pourrait lui raconter, combien elle aime tant sa progéniture et qu’elle aurait une belle vie,  une belle famille. mais gina n’aura rien de tout ça, elle le sait. elle n’aura même plus sa propre mère dans quelques temps.

( tisse sa toile d'araignée sur sa protégée )

comme un échappatoire, gina qui a subitement trouvé un jour sa victime - ou son acolyte, au fond elle ne sait pas trop comment ressentir ce lien qui s’est formé sans raison, trop rapidement, pas le temps de penser ou de réfléchir à la suite. un piège ou un sauvetage, une amitié ou une animosité, un peu de bonheur ou beaucoup plus de malheur. personne ne le sait. gina encore moins. elle agit, fait des dégâts, inconsciemment, consciemment, cela dépend des moments, de son humeur, de ce qu’elle a vécu dans la journée. la pauvre est tombée dans la toile d’araignée qu’est la vie de gina. bousculer. faire du mal. depuis longtemps, elle ne sait plus faire grand-chose d’autre. elle en veut au monde entier pour ce qui lui arrive depuis le premier jour où elle a posé les yeux sur ce ciel bleu qui l’entourait.  qui lui dira, à cet enfant, qu’il ne vaut mieux pas être dans les parages la fois où la bombe de oliveira éclatera  ? ou arrivera-t-elle à la sauver d’elle-même ?

( oublie ceux qu'elle a aimé )

gina n’a jamais été facile à vivre. ses amis, ses amours, eux non plus. elle est toujours tombée sur des cas et il n’y a aucune exception dans  sa vie.
à part peut-être son groupe d’ami qu’elle connaissait depuis toute petite, eux qui habitaient dans le même quartier et qui sont toujours là, malgré les hauts et les bas. certains ont changé, d’autres se sont éloignés, des disputes ont éclatées aux fils des années, mais les souvenirs sont toujours là, gravés. des liens noués entre des invocations aux esprits, des arrestations pour petits délits ou possession, des bagarres avec d’autres clans. c’était ça les jeunes du quartier à l’époque. pauvres, mais riches de fortes amitiés, à se sacrifier pour l’un ou pour l’autre. y a eu une sorte de pacte entre eux, un secret bien gardé,  niché au fond de leur mémoire, le jour où ils ont vus quelque chose qu’il ne fallait pas. au mauvais endroit, au mauvais moment, c’est comme ça qu’on dit et c’est ce qu’il s’est passé. puis, piouf, dispersion, adieux, en attente du premier qui les trahira pour aller balancer aux policiers.
entre temps ou pendant, elle en a rencontré des garçons, des filles, avec qui elle aimait passer du temps. mais ça n’a jamais fonctionné, il y avait toujours quelque chose qui n’allait pas. comme avec lui, de la lassitude, des disputes, des trahisons, et puis un au revoir sanglant et insultant. plus que de la haine qui les retenaient.

(le repère des ogres de night falls)

le cygnus, c’est un des bars restaurants le plus apprécié de night falls, nom référence à la constellation du cygne. ça devait être un beau projet au départ, mais tout a vite dérivé vers d’autres contrées. appelé « la taverne », « le repère des ogres » par les habitants du quartier, ceux qui savent ce qui s’y passent tous les jours et surtout les soirs, à la nuit tombée, quand les enfants dorment et que les autres veulent s’amuser. c’est l’oncle de gina qui tient ce bar, mal fréquenté, lui n’est pas mieux, alcoolique et drogué depuis de nombreuses années. c’est même le cerveau de toutes ces opérations. Sa sœur a coupé les ponts il y a quelques années, mais gina n’a jamais pensé que c’était la bonne solution, elle a gardé contact en cachette, pour ne pas finir totalement seule un jour. car le cygnus, c’est comme sa deuxième maison. Depuis petite, elle traînait dans la salle la journée, à dessiner ses amis imaginaires. alors tout le monde la connait dans le quartier, la petite gina-maria, qui est maintenant devenue grande et forte. ça lui a peut-être permis d’avoir la clé de ce monde, d’avoir la protection de certains, mais ça ne lui a pas évité de tomber la tête la première dedans dès qu’elle en avait l’âge. et maintenant, elle y travaille, serveuse à plein temps, parfois le jour, parfois la nuit. ses collègues ne sont jamais les mêmes, effrayés par les ogres. et puis, la concurrence a toujours été la même depuis, le roaring lion qui essaye de faire du bruit et de rester en place. les gue-guerres des propriétaires qui font chuchoter les clients et énerver le voisinage.