ivre de tes rêves. (aran&leo)

les cauchemars de la gamine sont terribles, certainement pas aussi anodins que ceux des autres. elle tremble, elle bouge, elle parle, elle crie, elle frappe parfois. elle se débat même dans ses nuits, avec la vie, avec les gens. quand elle ouvre les yeux cette fois, c'est différent, le froid glacial de dehors ne la ramène pas directement à la réalité, non d'abord elle est projetée de nouveau dans sa chambre d'enfant au chaud où elle se croit en sécurité, son père est au dessus d'elle, non elle secoue la tête. c'est aran. rien qu'aran. aran n'a jamais rien fait de mal. jamais rien sur toi tout du moins. tu inspires profondément, rejette les couvertures sur tes jambes moites, il fait trop chaud ici. tu passes une main dans tes cheveux blonds. c'est juste un cauchemar, tu lui dis pour qu'il se rendorme qu'il te laisse tranquille. mais s'il y a bien quelque chose qu'il est ton inconnu à la capuche, c'est têtu. il s'allonge sur le flanc pour t'observer. dans le noir, tu ne vois que sa silhouette, ses yeux se distinguent à peine de l'obscurité. « pourquoi, j'ai l'impression que ça t'arrive souvent ce genre de choses. » il ne pose même pas question, il le sait c'est tout, mais tu hausses quand même les épaules, détourne les yeux pour regard ailleurs, dans le vide surtout pour oublier les images qui t'angoisse encore. « t'as quel âge leo? » elle pivote vers lui, assise en tailleur sur le lit, elle l'observe un peu avant de répondre, comme si elle réfléchissait à l'idée de mentir. mais aran n'est pas un idiot, il comprendrait tout de suite qu'elle ment et bizarrement, elle ne veut pas être cataloguée comme malhonnête à ses yeux après tout, lui ne l'est pas envers elle. « je suis trop jeune pour toi. » elle chuchote, une ébauche de sourire qui apparaît sur son faciès avant de disparaître quand elle remarque que lui ça ne le fait pas rire. détends-toi, elle a envie de lui dire. il est trop strict, trop sérieux, elle se demande s'il lui arrive souvent de rire. est-il même drôle quelque part sous cette carapace? a t-il des amis avec qui se rejoindre autour d'une bière et d'un match quelconque à la télévision, elle ne l'imagine absolument pas comme cela, mais après tout que sait-elle de lui. « dix-neuf ans. j'ai dix-neuf ans. » et ça fait des années qu'elle n'a pas vraiment fêtée une nouvelle année, pourtant elle adore ça les anniversaires, les fêtes, les cadeaux et souffler les bougies, mais avec qui aurait-elle pu s'extasier de passer le cap d'une année de plus? pouvait-elle même le faire? une année de plus à errer dans les rues, à fouiller dans les poubelles, à crever de faim et de froid, il n'y avait rien à fêter là-dedans, il n'y aurait jamais plus rien. elle se mord la lèvre s'apprête à rabattre les couvertures sous elle, quand il lâche la bombe. « tu devrais être chez tes parents. » et là, elle explose. ses membres se figent, sa respiration se coupe, ses yeux trouvent les siens. froide comme le marbre, elle ne fonctionne plus que par pilote automatique. « et toi, tu devrais pourrir en enfer. » elle se lève, ne pense plus à rien d'autre que s'éloigner de cet endroit, de lui et de ses questions intrusives. il ne sait rien ce type. comment a t-elle pu croire une seconde qu'il la laisserait là sans lui demander des explications, elle enfile ses chaussures, et sa veste qu'elle ne quittera plus jamais. elle se fiche qu'il veuille la retenir, son passé c'est l'ouverture des brèches de sa souffrance et leo, elle en a marre de souffrir. elle claque la porte en partant et puis pour qu'il ne la rattrape pas, elle se met à courir. elle court tellement vite, elle court tellement loin que quand elle reprend le fil de ses pensées, qu'elle éclate en sanglots sur le bitume frais, elle se rend compte qu'elle est perdue et quand il se met à pleuvoir, elle se dit que peut-être elle aurait du réfléchir.