rouler dans tes mécaniques (jax)

Chargée de son sac de sport, Jo passe la porte d’entrée de la salle de sport. Déjà l’atmosphère se charge en testostérone, en sueur et en grognements virils. Même si ça ne semble pas très glamour, rien n’est plus familier pour Jo que cet endroit. La salle c’est un peu comme un sanctuaire pour elle, son repère, son endroit sûr. Elle aperçoit Bernie, le proprio au fond qui lui sourit. Bernie c’est un peu comme un membre de la famille alors Jo se dirige vers lui pour venir le saluer. « Voilà la plus belle ! Ma p’tite Jo, prête à rentrer dans l’arène ? » Jo sourit tandis qu’elle prend Bernie dans ses bras. Bernie il a toujours un sourire pour elle. Il a toujours cru en elle et Jo, elle sait qu’elle peut avoir confiance en Bernie. C’est un type formidable. « Tu me connais Bernie, j’suis toujours prête. » Ils échangent encore quelques paroles puis Jo continue son chemin jusque vers son spot. C’est là qu’elle aperçoit son partenaire du jour, Jax (le terrible). Ou du moins il cherche à l’être mais y a personne qui fait peur à Jo, surtout pas dans cette salle. Elle les prend tous, un par un jusqu’à ce que plus aucun de ses gaillards sourient en la voyant débarquer parce que c’est une « nana ». Faibles pensants. Jo ça fait des années qu’elle leur montre qu’ils ont pas à rigoler. Ils s’en rendent compte quand le combat termine par un ko magistralement administré par la demoiselle Garcia. Y en a très peu qui la prennent au sérieux du départ. Pourtant, Bernie les prévient mais un mec c’est bête, ça veut jouer des mécaniques, montrer que c’est un bonhomme. C’est pas d’aujourd’hui… Enfin, pas loin de Jax, Jo laisse tomber son sac de sport par terre. « Salut Abalhadj ! Prêt à en prendre plein la tronche ? » Sourire malicieux. C’est pas méchant, ni menaçant, c’est de bonne guerre. Elle l’aime bien Jax, Jo mais ça ne l’empêchera pas de lui assener des coups. Tout comme elle sait, qu’il se retiendra pas non plus et c’est tant mieux. Jo, elle a tellement horreur de ces personnes qui veulent la ménager. Elle a pas besoin d’être ménagée, comme tous ceux présents ici, elle a besoin de cogner, de se défouler, de canaliser son énergie, sa colère et sa haine. Si elle peut pas le faire dans cette salle, elle péterait un plomb et elle peut pas se permettre ça. Elle le sait, elle doit rester forte parce que l’équilibre de sa vie ne tient qu’à un fil.

Les poings scellés sous les bandes noires, il cogne le garçon. Tantôt doucement, d’autre fois bien plus fort. Il donne tout ce qu’il a dans le ventre contre ce sac inerte remplie de sable. Le rythme effréné de son cœur qui bat contre ses tempes, les écouteurs vissés dans ses oreilles, complètement perdu dans son monde. Il est là depuis très tôt le brun, « trop de temps déjà » d’après le gérant du club mais il a cessé d’aller le raisonner, cessé d’avoir un espoir de la voir dégager cette crapule qui lui fusille trop rapidement son matériel de boxe, à son gout. Alors il le regarde faire au loin, fixe le tatoué foutre toute sa rage dans son chaque coup de poing qu’il engage sur le sac de frappe. Et lui, le basané il ne voit même pas qu’on le toise, il n’est pas là pour faire le spectacle. Pas le matin, ça, c’est réservé le soir, dans le quartier de night falls, au Sinners plus précisément. Quand on parie des sommes astronomiques sur lui. Là il divertie la foule, là il encaisse et file des coups.

L’ennuie de frapper toujours contre un poids mort, l’envie d’aller plus loin d’attaquer les vivants. Le ring sur lequel il monte après un bon échauffement, le ring sur lequel il devient roi rapidement. Il cogne son adversaire avec trop d’aisance, sourit presque d’un air narquois tant c’est facile pour lui de faire ça. Il prend cher le mec en face, c’est de bonne guerre mais on voit bien la différence entre les deux. On voit celui qui fait ça pour s’amuser, et celui qui est un réel habitué, celui qu’à ça dans le sang, qui pourrait vivre que pour ça. Et les coups fusent, les têtes qui vacillent bien que ça soit que de l’entrainement. Jax il mesure pas trop sa force et ça va trop vite pour lui d’en face, il signale qu’il veut stopper le match en tapotant sur l’épaule de son adversaire et il rit Jax, le gant qui vient doucement taper dans le dos de son opposant pour mettre fin à cette bonne guerre. Les garçons qui sortent un instant du ring pour boire un peu d’eau.

Le bruit assourdissant qui s’explosent à ses pieds, le sac qu’il reconnait avant même d’avoir relevé les yeux vers la brune qui vient à ses côtés. Il ricane, les lèvres contre le goulot de sa bouteille d’eau le saoudien. Encore et toujours elle, la petite princesse des lieux, Bernie qui garde toujours un œil sur elle, son poulain féminin. Et elle provoque la diablesse, elle le provoque et il tombe aisément dans son jeu éloquent, comme toujours pour lancer la partie.

« Beaucoup de parlote Garcia mais j’vois que t’as pas encore tes gants, t’attends quoi ? »

Le garçon qui pose sa bouteille d’eau à-même le sol, qui passe entre les cordes du ring et l’attend avec impatience, sautillant d’un pied à l’autre, les poings en garde prêt à lui montrer qui est le roi du crochet droit.

« Aller ma p’tite j’ai pas que ça à faire que de t’attendre ! »

« Beaucoup de parlote Garcia mais j’vois que t’as pas encore tes gants, t’attends quoi ? » Jo sourit. Elle n’en n’attendait pas moins de lui. C’est leur façon de saluer, de dire « content de te voir ». Il attend pas davantage, ne dit rien d’autres non Jax est déjà monté sur le ring prêt à boxer. N’importe quelle personne pourrait se sentir offensée mais pas Jo. Elle ne veut pas de traitement de faveur et c’est ce que lui donne Jax. Non elle se contente de commencer à se préparer. « Aller ma p’tite j’ai pas que ça à faire que de t’attendre ! » Toujours plus. C’est son impatience et sa prétention qui le perdront… comme la plupart des hommes quand on y pense. Jo peut parler, il nous semble qu’elle est aussi assez impulsive comme personne. « Sois pas si pressé de finir au sol. » Elle finit par mettre son protège dents. Elle ne doute pas de sa victoire mais parfois, Jax a des coups bien envoyés. Ça serait trop bête de perdre une dent et puis elle a pas trop les moyens de se payer le dentiste. Elle enfile ses gants, trottine rapidement et monte sur le ring. Le ring, son territoire. Elle sent déjà quelque peu l’adrénaline monter en elle. Elle se met également à trottiner pour se mettre en chauffe. Elle se prépare aussi, se met en condition de guerrière. Allez viens, j’vais te défoncer, pas de quartier. Elle se rapproche et commence à tourner, rapidement suivi par Jax. Ainsi commence le ballet infernal. Boxe un sport qui demande adresse, précision et force. Jo est tendue, se défend et cherche l’angle mort, le moindre signe de faiblesse ou de relâchement. Jo est une adversaire redoutable et impitoyable d’autant qu’elle sait que son adversaire en fera autant. Soudain, elle voit une faille, un bout de peau dégagé alors elle frappe et va enfoncer son poing – enfin son gant – directement dans la chaire de Jax, sa joue droite pour être précis. Elle frappe de toutes ses forces mais malheureusement pas aussi qu’elle aimerait. Elle n’a pas pu prendre autant d’élan qu’elle aurait aimer mais c’est un début. C’est le premier coup, le véritable début des hostilités jusqu’à ce que mort s’en suive… non, pas jusque là, jusqu’à ce que l’un d’eux abandonne ou se retrouve K.O. Pas question que ça soit elle, Jax sera infernal après ça. Mais après tout, ce n’est pas leur premier combat, ils comptent tous deux des victoires comme des défaites.

Elle fait sourire Jo avec ses petites piques qui n’feraient pas peur à une mouche. Elle se pense invincible, un peu comme beaucoup de femme ici. La force qu’elles ont acquise au fil des entrainements, à force de mettre à terre des hommes. Elles s’pensent tout permis, jurent qu’elles n’ont peur de rien jusqu’à qu’elles ne tombent sur le mauvais adversaire. Celui qui ne prend pas la peine de les considérer comme des femmes. Elles comprennent pas, elle voient pas que certains peuvent leur faire vraiment mal. Jax il fait partie de ceux qui respectent les femmes, du moins il en faisait partie, fut un temps. De ceux qui n’acceptent pas un combat avec la gente féminine, car elles sont beaucoup trop jolie, beaucoup trop faible face à lui pour qu’il ne tape dans le mile. Il tenait se discours de macho c’est vrai. Avant elle, avant que la p’tite Garcia ne le mette à bout, elle l’a cherché, des jours et des jours. Elle a piqué, parlé de sa virilité qu’elle moquait, remettait en question. Il en riait, jusqu’à qu’elle mette de l’argent sur le tapis, une petite somme plus symbolique qu’alléchante qu’il a fini par accepter. C’comme ça que tout a commencé.

« J’suis plutôt pressé de t’en coller une en fait, t’as une jolie gueule à amocher aujourd’hui princesse. »

Il la cherche, aime faire monter ses nerfs. Le clin d’œil qu’il lui adresse, c’pas de la drague, jamais. Pas entre eux. Mais plutôt de la nargue, il veut faire monter l’adrénaline dans sa caboche de femme effronté. Il la voit mettre son équipement, les gants qu’elle resserre contre ses poignets à l’aide de ses dents. Il la voit venir sur le ring. Enfin. Que les hostilités commencent. Et ils se tournent autour, serpent contre lionne. Nerf contre arrogance. Ils se toisent en chien de faïence. Les prunelles qui cherchent le point faible, le talon d’Achille qui fera faiblir. Elle débute Jo, elle ne perd pas son temps et attaque, le gant qui glisse contre la joue du basané, le visage qui tourne à moitié et à son tour, pas une minute à perdre il vient taper dans les côtes, assez pour la déstabiliser et lui glisser une feinte au visage. Il rit, se remet à tourner autour d’elle le bel enfoiré.

« Aller réveille-toi, j’t’ai déjà connu en meilleure forme ! »

Le gant qui vient taper légèrement sur sa caboche, encore un truc pour la foutre en rogne. Il adore, se joue de ses humeurs, de sa rage trop grande dès qu’elle rentre dans la salle de boxe. Les coups qui s'engrainent alors d'un camp à l'autre, le combat gentillet suivi d'un oeil distrait par le gérant des lieux.

«  J’suis plutôt pressé de t’en coller une en fait, t’as une jolie gueule à amocher aujourd’hui princesse. » Dans un autre contexte, peut-être qu’elle se serait sentie flattée mais pas là. Non, c’est juste une petite provocation, certainement pas la dernière. Surtout qu’il accompagne ses paroles d’un clin d’œil. Jax n’est pas le roi de la drague, ça non, plutôt prince de la nargue. « Tu sais bien que c’est pour toi que je me fais belle. » Tu parles. Justement Jax c’est bien que c’est pour la rime, pour la réplique. Y a pas de ça entre eux, c’est juste des coups de poing bien envoyés, pour frapper, toucher où ça fait mal pour remporter le round.

Il touche les côtes. Il se rate pas. En même temps elle sait à quoi elle s’expose. Elle l’affronte parce qu’il est doué et qu’il hésite pas. Si elle voulait de la tendresse, elle serait pas là. Mais faut dire que son air l’agace particulièrement. Il se permet de rire et de tourner autour d’elle comme s’il se pavanait. Voilà ce que donne l’excès de testostérone. Toujours en faire des caisses, rempli de manivelles. Et qu’est-ce que ça l’énerve profondément Jo. Elle veut lui faire ravaler son caquet, pas uniquement pour elle, pour toutes les autres. Il fera moins le malin quand il commencera à pisser du nez. «  Aller réveille-toi, j’t’ai déjà connu en meilleure forme ! » Et ça continue. Jo sait bien qu’il le fait exprès, pour l’énerver et qu’elle se déconcentre. Mais c’est pas parce qu’elle le sait, qu’elle tombe pas dans le panneau. C’est plus fort qu’elle, la rage est trop forte. Alors elle fonce dans le tas. Elle tape, envoie coup sur coup. Certains fonctionnent, d’autres pas du tout. Elle se recule, met de la distance pour reprendre un peu des forces et évaluer la situation. Il en a pas perdu son sourire mais elle, ça lui a fait du bien. Ça lui a permis de relâcher un peu d’énergie négative. « T'en fais trop Abalhadj, c’est ça qui va te perdre. Ça impressionne peut-être tes minettes mais pas ici, pas avec moi. » On peut applaudir la ténacité de Jo. Elle en veut, elle se laisse pas démonter. Œil pour œil, coup pour coup, lutte incessante. Elle attend qu’il vienne et la succession de coups reprend. Elle esquive une première fois, une deuxième fois, vient protéger son visage avec ses gants, tiens bon même s’il frappe fort. Puis, elle en profite, se baise et frappe en plein dans le ventre. Quand elle n’est pas aveuglée par la rage, elle est meilleure. Là encore, elle en a une belle preuve.

Spoiler:

Tornade qui fonce droit sur lui, les bras qui se mettent en défense de manière automatique. Il pare, un deux puis trois coup. Elle s’enflamme, surement trop pour être efficace. Elle perd sa garde la grande gueule, ça pourrait lui être fatal. Il pourrait lui mettre un K.O maintenant mais c’est trop facile, ils n‘ont pas assez joués à son gout. Alors il se contente d’un p’tit coup en plein dans le minois, la joue qu’il érafle avant de se remettre à tourner autour d’elle. Lui qui joue le chat, elle la sourit qu’il essaie de titiller. Il ricane de ses palabres Jax, c’est elle qui vient d’être touché et elle qui joue la carte de la fierté. Surement que Jo elle a le caractère fait de fer ou bien de plomb pour être autant courageuse, pour oser venir défier un p’tit con de boxeur des rues comme si elle n’avait ne serait-ce qu’une chance de vraiment le mettre KO.

« Celles que j’veux impressionner croit moi j’les amadoue pas sur le ring … J’m’occupe juste des teignes comme toi ici. »

Les taquineries qui prennent fin dès qu’il se retrouve de nouveau devant elle. Le gant qui vient s’abattre dans le fin biceps de la demoiselle, le sérieux qui peint les traits de l’un et de l’autre. Y’a une nouvelle ambiance soudainement sur le ring. Y’a plus de place pour l’échauffement, la rigolade des premières minutes. Il sont passés des rires à la haine. Coups de poing qui fusent d’un coté à l’autre depuis dix bonnes minutes. Et elle y met toute son âme la diablesse, elle commence à le cerner et s’améliorer, y’a bien un coup de poing qui vient lui éclater la joue ; d’autres coup qu’il arrive à parer mais le quatrième ça n’marche pas, il n’est pas intouchable Jax. Crochet du droit dans le ventre de la part de Garcia, les muscles qui se contracte mais ça suffit pas à pallier à la douleur il grimace et enfonce son poing à la hâte dans ses côtes à elle. Tous les deux atteints, en sueur, les respirations haletantes. La main gantée qui vient s’poser d’une part sur l’épaule d’la demoiselle, et son autre main sur son propre ventre meurtri par le dernier coup qu’il s’est prit.

« Tu t’améliores…. sale garce ….j’vais finir par… te lancer dans les combats de rue pour me faire du fric sur ton dos… »

Il ricane, pas sûr qu’il soit d’ceux qui embauche les filles pour les mettre sur un ring en pariant sur laquelle finira à l’hospice le plus vite. Y’a le gérant qui les siffles, le gérant qui leur suggère de bien vouloir finir leur discussion ailleurs que sur le ring pour laisser la place à d’autre boxeur et il hoche d’la tête Jax, passe entre les cordes et les tiens pour que Jo le suive. Les deux jeunes en sueurs qui viennent s’assoir sur un banc, regarde les deux prochains rentré dans l’arène. Jax, commence déjà à enlever ses gants, passer les doigts sur ses phalanges meurtries, la faute aux nuits de combats répétitives, les heures passés ici à ne leur laisser aucun répit.

« Ça fait un moment j’t’avais pas vue ici, madame était occupé ? »

Teigne. Ça lui va comme surnom. C’est pas une insulte à ses yeux sur le moment. Nop, c’est même carrément valorisant. On se méfie pas trop d’une teigne mais ça lâche rien. Ça lui apporte davantage de force et elle en a besoin car pendant ce combat, elle dépense beaucoup d’énergie. Plus le temps passe, plus c’est dur. Elle se fatigue et elle espère bien que Jax aussi parce que sinon elle ne va pas faire long feu. Mais la fierté ça porte, aveuglée par son envie coûte que coûte de ne pas perdre, elle puise dans ses réserves. « Tu t’améliores… sale garce … j’vais finir par… te lancer dans les combats de rue pour me faire du fric sur ton dos… » Plutôt crever. Il est pas question qu’elle fasse des combats de rue – sauf si nécessité – mais sûrement pas pour lui. Elle s’est sortie de cette galère c’est pas pour y retourner, tête la première. Elle est mature et responsable, il paraît la demoiselle Garcia. Il profite d’un moment où elle n’a plus la force de cogner pour balancer une telle réplique. Cependant ce qui l’adoucit c’est que lui aussi est fatigué. Au final, l’objectif est atteint : lui montrer qu’elle est de taille, à lui mais aussi à tous les autres. Y a Bernie qui siffle. Jo jette un regard dans sa direction. Il leur signifie de sortir, y en a qui attendent. Sacré Bernie, pas vraiment laxiste. Bon faut dire qu’il faut que la salle tourne mais s’il laissait deux minutes à Jo, elle était prête à y retourner pour terminer Jax. Exagère-t-elle ? On ne saura jamais. Jax quitte le ring, lui tenant les cordes alors Jo suit, sans rien dire. Après tout, elle apprécie le geste.

Ils s’assoient sur le banc guettant leurs remplaçant, deux baraqués qui ne sont clairement pas là pour faire dans la tendresse. Elle voit Jax enlever ses gants et Jo fait de même. « Ça fait un moment j’t’avais pas vue ici, madame était occupée ? » Elle se passe la main sur le dos pour le masser un peu. Ça lui fait un peu mal, ça sent la courbature mais ça fait partie du jeu. « Rythmes de vie sûrement trop différents. » Jax n’est-il pas un oiseau de nuit quand elle se pare de ses rollers la journée ? Elle taquine mais en réalité il a raison, elle s’est faite rare ces derniers temps. La cause ? Des changements dans la coloc, un refuge dans le taf pour ne pas voir le reste. « Mais oui, pas mal de changements, ça doit être dans l’air, j’imagine… » Elle lui fait un clin d’œil. Que ça soit sur le ring ou dans la vie, Jo se laisse jamais abattre. Elle a pas le temps pour se plaindre ou les faiblesses, c’est un roc. Elle pose les yeux sur les mains de Jax, instinctivement elle fronce les yeux. « Faut que tu les laisses reposer de temps en temps, sinon ça cicatrisera jamais. » Le ton est neutre, pas spécialement jugeur même si tout dans les mots le laisse présager.

La réponse qui le fait sourire en coin, les prunelles toujours rivés ailleurs que sur elle. Surement ouais, surement qu’ils mènent pas du tout le même rythme de vie. Lui qui se complait dans les ruelles sombres de Crescent Heights, à faire des métiers frauduleux qui le font maintenant aisément vivre quand elle s’occupe de manager une équipe au groove, à servir des milkshakes et des hamburgers trop gras que tout le monde kiffe. Donc ouais, peut-être bien que si il venait à des heures raisonnables et non pas entre six heures du matin et dix heures comme aujourd’hui, p-t’ être bien qu’il croiserait plus souvent Jo, et les autres connaissances qu’il a, qui fréquente cette salle de sport.

« J’crois bien qu’on est en jet-lag ouais, j’dois être branché à l’heure de Tokyo »

Souvent là quand personne ne l’est, déjà parti quand les lieux s’affluent dans la journée. Jamais là au bon moment, la solitude qu’il a choisi comme meilleur ami depuis bien trop longtemps mais qui en ce moment lui fait défaut, Garcia elle dit que y’a du changement dans l’air et lui ne peut qu’approuver. L’appartement aux effluves un brin plus féminines depuis quelques semaines, le langage natal qui des fois reprend vie de façon trop naturelle quand Nejma trouve pas le mot en anglais. C’est différent depuis qu’elle est là, même lui agit différemment dans son propre appartement depuis qu’elle a posé ses bagages dans son entre masculine. Mais ouais, elle a raison la mexicaine, y’a du gros changement dans l’air. Jo elle sait rien de sa vie, ne connaitra surement jamais celle qui s’improvise comme sa colocataire en ce moment, mais au moins elle le comprend dans ce tournant de nouveauté auquel ils n’ont pas l’air habitué.

« Ouais p-t’ être même un peu trop de changement dans l’air, c’est louche mais on va s’habituer, j’suppose. »

Jax certainement pas accablé par le karma mais pas des plus rassurés quand le changement s’opère sur sa façon de vivre. Il s’doutait pas un moment que son amie d’enfance ferait un jour de nouveau surface dans sa vie. Grand garçon qui a du mal à s’faire à cette idée, qui reste chaque matin étonné de la voir, l’entendre dans les parages, ayant toujours cette impression qu’il l’aurait rêvé, que c’est tout sauf vrai. Elle le sort de sa torpeur, la tête qui tourne machinalement vers Jo dès qu’elle s’met à parler, les sourcils qui se froncent un instant avant de comprendre qu’elle parle de ses doigts, qui s’assimilent plus à des plaies que de réelles phalanges. Il déplie et replie ses doigts Jax, fait craqueler un peu les quelques croutes déjà former.

« Essaie d’enlever l’air autour de toi, on va voir comment tu réussis à respirer sans. »

L’insinuation évidente qu’il lâche en riant, la boxe et les combats qui dictent son existence. Le sport qu’il considère comme son oxygène, échappatoire à ses idées sombres. Y’a pas grand-chose qui l’aide mais au moins y’a ça, et il s’en fout si ça lui coûte des mains pas jolies à voir, si y’a toujours un endroit où ça fait plus mal qu’un autre. Tant qu’il en a l’usage, il les utilisera. Et enfin, il lâche son regard, les yeux qui vont de nouveau se perdre sur le match de boxe, les prunelles sombres qui s’égarent sur les mouvements d’un et puis de l’autre.

« Tu paris sur lequel ? J’mise dix dollars sur lui au short vert. »

Compétition entre les deux incessantes, quand ce n’est pas sur le ring, Jax continue sur le banc.