LIBRE - bébé au bar

T’avais pourtant rien commandé. Alors quand Lio te dit que t’as reçu un colis, ta première idée c’est qu’il a surement encore trop fumé. Ou que quelqu’un s’est gouré. La première option te parait plus probable. La deuxième plus agréable. Parce que, qui dirait non à quelque chose de gratos ? Trompé de destinataire. Oups. T’es presque heureux quand tu passes la porte du salon pour récupérer ton objet tombé du ciel. « …Tu t’fous d’moi ? » Il a pas l’air. Il t’tend un lettre en te disant que ça allait avec. Une lettre. Avec un putain de bébé. Pas juste une poupée. Non non. Un bébé. Un vrai. Qui gazouille en te regardant. Et évidemment, Lio s’échappe avant que t’ai réussi à lui mettre la main dessus pour lui faire regretter ses idioties. Il s’casse de la maison. Pour être sur que tu l’rattraperas pas. Mauvais souvenirs probablement. Alors tu sers les dents. Fort. Fort. Fort. « Nan mais il s’fout d’moi le con ?!! » Tu ouvres la lettre avec colère et empressement. Près à intégrer ses mots pour les lui recracher à la gueule dès qu’il osera repasser la porte d’entrée. Mais les mots, c’est dans ta gueule à toi qu’ils viennent se fracasser. Salement. Ca ressemble à une blague pas drôle. Et ça pourrait l’être si y’avait pas VRAIMENT un gosse associé à la lettre. Un putain de gosse dans un panier. Qui t’regarde avec des grands yeux. Manquerait plus qu’il chiale pour rajouter un peu de comique à cette situation complètement absurde. « Nan mais...  » Tu intègres même pas encore le tout. Y’a même pas encore de colère. Tu pourrais presque rigoler. Presque. Parce que ça sonne aussi terriblement vrai. Sans que tu saches exactement ce qui donne ce gout de vérité à cette scène ridicule.

Tu savais pas vraiment quoi faire. Et bordel, il te fallait un verre. Plus rien à la maison. Et c’te foutu gosse. Alors tu l’as mis dans ton sac. T’as laissé la tete dehors hein. T’es pas fou non plus. Tu sais bien que ça meurt si ça respire pas ces p’tit trucs. Et t’as déjà assez d’un putain de corps sur la conscience. Par contre. Il paraît que ça bouffe aussi. Tu lui as donné un cookie. C’est déjà sympa putain. Mais elle bouffe pas le cookie cette conne. Du coup … t’as reporté à plus tard. Et puis, elle chiale pas. Tu vas pas t’faire chier. Non. Un verre, c’est bien. Ou deux. Ou trois. Il faut même plus que ça pour encaisser la nouvelle. Non, mais de toute façon, elle reviendra demain la meuf. Elle récupèrera le truc rose et toi tu récupèreras ta vie. Tranquille. Tu vas juste faire comme si de rien était. Ca ira.

Ou pas. Elle s’est mise à chialer juste devant l’entrée du bar.

Connasse.