soon we'll be found (deva)

Entre paradis perdu et terre promise, Nikos et Deva se retrouvent à mi-chemin. Les fossettes de Nikos se creuse lorsque Deva admet qu'elle ne l'imaginait pas artiste. Pas grand monde l'imaginait ainsi à vrai dire, c'était une sensibilité qu'il gardait bien cachée au plus profond de lui. Il ne chantait plus depuis longtemps, c'était un processus trop intime qu'il ne se sentait plus d'assumer. Puis de toute façon, il avait toujours préféré jouer. La musique était un langage qu'il comprenait, comparé aux mots du commun des mortels qui ne l'atteignait jamais. Ouais j'suis pas vraiment James Blunt mais ça me détend. Ca me coupe du monde. Ca et le sport. La musique était passée derrière le reste, parfois il a la nostalgie des soirées qu'il passait à s'occuper uniquement de musique, à jouer de la guitare sous le ciel étoilé, même si au fil du temps il s'était un peu plus dirigé vers l'alternatif. Mais rien de tout ça ne comptait à présent. Il avait d'autres préoccupations qui lui prenait tout son temps.  Il composait de moins en moins, il avait plus le temps. Depuis qu'il avait 21 ans, son père se pointant de moins en moins au Roaring Lion si ce n'est pour gérer les recrutements parce qu'il pensait que c'était important pour lui de savoir qui allait gérer son bar. Son bar dans lequel il n'avait pas mis les pieds depuis quinze jours. Ca avait l'air d'être du sérieux avec sa copine, même si ça ne l'empêchait pas de flirter avec les clientes quand il y passait une tête le vendredi soir avant de partir pour la ville voisine ou sa copine du nom de Reva, une afro-américaine tout en courbe l'attendait gentiment. Nikos l'avait vu une ou deux fois et il savait que c'était qu'une question de temps avec cette femme, beaucoup trop intelligente pour son père ne se rende compte de l'affront qu'elle se faisait à elle-même de sortir avec un connard pareil. Mais ça faisait tout de même six mois, il fallait se rendre l'évidence, peut-être que la jolie Reva n'était pas si maligne que ça. Ou totalement sous son emprise. Parce que oui, le Stavros il en avait de l'emprise. Y'avait qu'à voir comment Deva était devenue addict à ses petites attentions stupides qu'il avait eu avec toutes les nanas jolies qui passaient ici. Néanmoins pour la première fois, dans sa réponse, après sa mise en garde, Deva afficha un peu plus de distance avec son père. Comme si la petite fille aux daddy's issues avait tout de même quelques résidus de bon sens suffisant pour la sauver d'elle-même. Mieux que ça même, elle met le doigt sur le fond du problème. Sur l'essence même de Nikos et ça, le grec l'avait pas prévu. Il avait pas prévu qu'elle soit capable de dire des choses qui raisonne si fort en lui alors qu'ils s'adressaient quasiment jamais la parole. J'essaie pas de te paterner ou quoique ce soit, c'est juste un conseil parce que j'ai vu trop de nanas ici se faire des films, penser qu'elles arriveront à l'adoucir et repartir brisée. T'as l'air d'être une fille bien, mais c'est un excellent manipulateur. Alors je préfère te prévenir. Il se doute qu'elle a pas besoin de lui pour prendre des décisions ou décider de qui lui brisera le coeur ou l'abimera mais il aimerait lui éviter au moins la maladie Avergopulos. Il limite les dégâts comme il peut, parce qu'une fois encore Deva met dans le mile lorsqu'elle lui demande si il a perdu la sienne. Un sourire triste se dessine sur le visage de Nikos. Si tu savais... murmure t-il en repositionnant un carton de serviettes en papier distraitement. Sa relation avec son père, c'est la clé de toute sa vie. C'est l'explication de son comportement, de sa personnalité. La raison de ses excès de colère, ses excès de méfiance. La raison pour laquelle il s'est mis au sport très tôt pour pouvoir rendre coup sur coup, pour pouvoir se défendre. Non, je suis plus très sûr d'en avoir une... De façon elle me servait pas à grand chose. Il est touché, un peu trop. Il s'attendait pas à cet échange à coeur ouvert, à la base il voulait juste la tenir éloignée du bar et de tous les gros porcs qui s'y accoudaient pour qu'elle se concentre un peu. Et finalement, Deva avait montré une facette d'elle que Nikos aurait pas soupçonné. Loin de la nana légère et insouciante, presque naïve qu'il s'imaginait. Chacun portait son masque, et parfois de temps en temps, il tombe. Cette discussion l'a fait changer d'avis sur elle, il la voit autrement à présent. Et c'est là que l'idée lui vient. Limpide. Pratique. Utile. Ca te dirait de devenir manager ? Les événements de ces derniers temps lui avait montré qu'il n'était pas infaillible, il se crevait à la tâche mais ce n'était pas forcément une bonne chose pour lui sur le long terme. Tout son temps était consacré au Canvas et il ne trouvait jamais le repos, en partie car il n'avait jamais eu confiance en qui que ce soit mais bizarrement, il avait le sentiment que, peut-être, ça pouvait être une bonne idée.

« je savais meme pas que tu sortais d'ici. » sur le ton de l'humour mais pas tant que ça, c'est pas une surprise qu'elle en sache si peu, elle compte plus le nombre de jours a se croiser sans se voir vraiment. Des inconnus qui auraient pu se connaître, des a priori bâti sur ce qu'ils ont vus. Fantôme silencieux, lolita pathétique. Y a toujours eu une ligne invisible entre Nikos et Deva, c'est peut-être seulement aujourd'hui qu'ils ont passé le pas. Elle a déjà oublié qu'elle était là pour l'inventaire, que nikos râlait y a pas si longtemps. Elle a presque oublié qu'il y a encore quelques heures il avait des allures d'ombres oppressante et muette planant sur le roaring lion autant que sur elle. Et finalement même ce qu'elle prend pour du paternalisme irritant, elle le préfère encore aux regards  crispés qu'il lui lançait y a pas si longtemps. « je ferais attention. je fais attention. Ça m'empêchera pas de l'apprécier, même dans tout ce qu'il a de mauvais. » et elle l'avouera pas, encore moins  a Nikos, mais c'est justement tout ce qu'il lui reproche que Deva appréciait le plus, les mensonges et les belles paroles, de la poudre aux yeux pour créer un rêve, un endroit qui avait l'air beau, un fantasme qui paraissait réel. S'abreuvant bêtement de jolis espoirs auxquels elle a jamais vraiment cru mais qu'elle rêvait souvent. La sensation de compter, futile et chimérique, mais assez vrai pour que ça fasse du bien. Elle a pas envie de l'expliquer, pas même de s’appesantir sur le sujet Stavros. Que cet instant soit une faille temporel ou demain ils feront comme si rien n'avait existé ou que ça change leurs façons de se voir l'un l'autre, elle sait que ça sera toujours un point sur lequel ils ne tomberont jamais d'accord. De toute la haine que Nikos lui porte, Deva en éprouve autant d'affection. Elle préfère regarder ailleurs, ponctuant la fin qu'elle espère, se focalisant plutôt sur un sujet qui lui semble plus neutre que la mer houleuse qu'est son père. « Tu peux pas le savoir tant que tu l'as pas retrouver. Suffit de la récupérer » comme si c'était facile, et peut-être que ça l'est pourvu qu'on le veuille. Elle, elle voudrait le secouer, le plonger dans un océan de paillette ou le forcer a rester au soleil un jour de printemps pour qu'il voit les choses avec plus de nuances, un peu plus de couleurs. Trouver ses morceaux d'âmes, les recoller et les lui rendre. Branlante mais entière.  Elle s'invente déjà une expédition, exploratrice en pleine chasse au trésor. Elle divague assez pour pas être certaine de pas avoir rêver ces derniers mots. virage a trois cent quatre-vingts degrés, finalement elle préférait six flags, bien plus prévisible que nikos et ses conversations fluctuantes, de la colère du patron, à l'homme amer, jusqu'elle se sent obligé de le scruter, sourcils froncés dans une concentration extrême, cherchant sur son visage ne serait-ce qu'une micro expression qui suffirait a prouver qu'il se moque d'elle.  « y a moins d'une heure tu me reprochais de faire ami-ami avec les clients. » elle peut pas s'empêcher de lui dire, doigt pointé sur ses contradictions. Peut-être qu'il a pas toute sa tête et que le nez plongé dans sa tristesse il a sortit une bêtise, juste comme ça. Ou peut-être que, trop rêveuse, elle a du mal a croire que la réalité puisse offrir sa chance a une fille comme elle. Il doit bien savoir que deva elle a jamais eu de responsabilité sinon de se gérer elle-même, chose qu'elle n'a jamais réussi avec énormément de brio, suspendu sans cesse aux chimères auxquelles elle s'accroche, aux hommes qu'elle rêve, aux histoires qu'elle s'invente. Jamais totalement indépendante, jamais totalement ancrée dans le monde. « laisse tomber. » elle soupire, s'éloignant de nikos, déjà elle sent qu'elle aime un peu trop ça : cette chance, infime. Cette main tendue. Elle pourrait prétendre avec la dignité des plus grandes dames qu'elle est honorée, se fendre d'un sourire poli et accepter humblement l'offre qu'il lui fait, parler affaires avec le plus grand des sérieux. Elle pourrait mais ça lui ressemble si peu que toute contenance s'échappe entre les lèvres étirées dans un sourire béat. Rehaussé sur la pointe des pieds elle attrape une bouteille, note consciencieusement sur l'inventaire un moins un, enorgueillit par des responsabilités qu'elle n'a même pas encore et revient s'asseoir a meme le sol vers Nikos, le bouchon entre les dents. « t'avais promis une bouteille, j'veux fêter ça. Tu changes pas d'avis hein ? J'y connais rien mais j’apprends vite. Enfin je crois. Je ferais de mon mieux, et j'arrêterais de draguer les clients, en tout cas les ivrognes mariés et violents. Et t'as pas besoin de m'augmenter, je veux dire si t'y avais penser, ça me va mais t'es pas obligé. » c'est seulement le manque de souffle qui l'empêche de continuer, elle aurait un million de choses a dire. Des tas de questions a posés, sur ses motivations autant que sur ce qu'elle devra faire, elles sont toutes dans un coin de son esprit, étouffées sous la joie enfantine qui brouille tout les propos raisonnés qu'elle pourrait sortir. Elle ravale ses mots d'une gorgée qui lui arrache une grimace sans lui retirer son sourire. « merci » c'est tout ce qu'elle voulait dire finalement. Merci pour s'être intéressée a elle juste une seconde, merci pour avoir parler, merci pour la promotion. Pour tout, pour rien. Pour un tas d'infimes raisons qu'elle ne saurait pas expliquer.

Elle lui rétorque que y a moins d'une heure il lui reprochait de draguer les clients et Nikos finit par éclater de rire. Elle a pas tort, y'a de quoi se poser de questions. La différence entre y'a une heure et tout de suite, c'est qu'il a comprit le personnage. Elle lui a montré à quel point elle pouvait être fine, observatrice, et son petit côté manipulatrice pour subvenir aux besoins de son ego était bénéfique pour le chiffre d'affaire. Alors ok, ce n'était pas forcément hyper moral mais de toute manière : qu'est-ce qu'il l'était vraiment ? Il n'y avait qu'à jeter un coup d'oeil au Sinner pour comprendre que le fric primait sur tout à Night Falls. Ce quartier miteux broyait toutes les âmes qui y mettaient les peids et pourtant tout le monde continuait d'y retourner. Nikos se plaisait à croire que le Roaring Lion détonait avec le reste quelque part. Ici personne ne sortait impuni d'une bagarre, d'une agression envers une cliente ou quoique ce soit qui pouvait mener au pire. Même si l'agression de Nikos d'il y a quelques mois prouvait qu'il pouvait y avoir des ratés... Mais une bonnne équipe était la clef.  Sauf que voilà, Nikos avait vu 90% de son staff démissionner ou se barrer sans même lui signifier ces derniers temps, la gestion du Lion l'épuisait de plus en plus et il avait d'autres problèmes en tête que de nettoyer le comptoir et servir des shots. Même si gérer un bar pouvait paraître cool de l'extérieur, en réalité il n'arrivait même plus à profiter du peu de bon moment que ses échanges au comptoir avec les clients lui offraient. Il devait rembourser ses dettes, à commencer par celle qu'il avait envers Gemma et pour ça il fallait que quelqu'un soit capable de superviser les opérations tandis qu'il vaquait à d'autres occupations. Il avait pensé un moment à désigner Adam comme manager, jusqu'à ce qu'il apprenne qu'il avait couché avec Gemma. Un pieu dans le coeur pour Nikos qui avait pas tardé à se mettre sur son dos et à lui foutre la pression jusqu'à ce qu'il craque et se casse de lui-même, même si les bruits de couloir disaient qu'il l'avait viré. En réalité il y avait un peu des deux. C'est sans doute parce qu'elle était une femme et parce qu'elle était très (trop) appréciée de la clientèle que Deva lui apparaissait être la candidate idéale. De plus elle plaisait à son père, qui ne s'opposerait donc pas à cette promotion puis on ne pouvait pas nier que la jolie barpmaid avait trop à coeur de plaire à ses patrons pour sciemment tout foutre en l'air et prendre le risque de les décevoir. Du moins c'était comme ça qu'il le voyait. Tu veux le poste ou pas ? lui demande t-il en guise de réponse à sa répartie pour le moins très juste. Il se doute un peu de ce qu'elle doit penser, elle doit sûrement le trouver un peu taré et il peut pas la blâmer. Il l'est. Mais il se demande un quart de seconde si Deva va donner suite à sa proposition lorsqu'il la regarde s'éloigner. Puis finalement elle s'empare d'une bouteille sur l'étagère, la décompte de l'inventaire et vient s'asseoir à même le sol, quasiment aux pieds de Nikos. Son sourire revient de plus belle lorsqu'il entend Deva s'enquérir. Le grec descend de son tabouret, saisit deux verres vides et propres sur la table pour s'asseoir en face de Deva tout en s'appuyant contre le mur. Pourvu que son père les croise pas dans ces conditions ou il risquerait de lancer encore une attaque éclaire. Peu importe. J'ai qu'une parole, bien sûr t'auras une période d'essai pour voir comment tu t'en sors et si t'es vraiment à l'aise. Les gens n'aiment pas le manager en général, c'est toi qu'on va pas appeler si y'a des emmerdes, c'est à toi qu'on va demander de trouver des solutions et si quelque chose fonctionne pas comme d'habitude c'est toi qu'on viendra emmerder. Sans parler de l'inventaire et des comptes que tu devras te coltiner avec moi pour comprendre comment ça marche. C'est peut-être con mais au fur et à mesure qu'il parle, Nikos se sent presque soulagé de ne plus être le seul à porter le bar sur ses épaules. Son père s'était totalement dédouané de toutes ses responsabilités ces derniers mois et si au début il continuait de passer pour jouer les coqs, la dernière fois remontait à lorsqu'il avait mal parlé de Gemma. Il le voyait de temps en temps en coup de vent ou devinait qu'il était rentré lorsqu'il voyait un tas de linge sale près de la machine à laver qui signifiait clairement 'fais ma lessive, fils' et qui avait le don d'agacer Avergos Junior. Mais Nikos s'était habitué à cette nouvelle routine, ça lui donnait plus de marge, plus de liberté et ça comprenait également de pouvoir prendre de nouvelles décisions. Il laisse Deva servir les deux verres et soulève le sien à l'unisson de sa nouvelle manager. A ta nouvelle promotion et aux âmes courageuses. Les verres tintent et pour la première fois depuis très longtemps, Niko s'autorise à faire confiance à quelqu'un de nouveau.