-- I feel lone, why shouldn't I go? (demius)

(I don't wish to try this alone
I feel lone, why shouldn't I go?
Cause even the time we're so longing gets blown)

Elle le regarde de travers. Il est là, la cuillère en bouche. Le lait déborde autour de ses commissures. Il arrive à peine à manger. Ca pèse dix kilos, mais ça mange comme un ogre. Un mètre sur patte d'estomac insatisfait. Elle le nourrissait pas, Mama ? Elle peut pas s'empêcher de contempler ces joues encore rondes. Toutes rosies. Ca lui fait quelque chose, mais elle identifie pas ce que c'est. C'est inconnu. Ca l'énerve. Elle décroise les bras et finit par bouger. Elle peut pas rester là sans rien faire. Elle peut pas passer une mâtinée à regarder un marmot s'empiffrer. Et lui, il peut pas rester là. C'est comme ça. Elle s'approche de la table pour parler, mais il lui sourit. Putain, il sourit. Il a ce regard tout brillant. Ces dents pas droites et toute une innocence. Il peut vraiment pas rester là. Elle arrive pas à lui dire quoi que ce soit.
-- Range, qu'elle lui lâche froidement.
Elle ose pas en faire plus alors qu'elle débarrasse déjà la table. Des cheerios à deux dollars et une bouteille de lait qu'elle avait. Elle aimait boire du lait, Demi. Et lui aussi. Pourquoi il pouvait pas être plus comme son père ? Une petite raclure. A neuf ans, y a des gamins qui tuait leurs voisins. Non, lui, il fallait qu'il soit mignon. Elle savait pas quoi en faire. Le ramener chez Mama ? Il lui avait dit. "Si tu me renvoie chez mama, je saurais toujours prendre le bus." Neuf ans et plus malin qu'elle a son âge. Faut dire, hormis poussé Maddy la gothique dans la boue, elle savait pas faire grand chose à l'époque.
-- Je peux aller dormir ? J'ai sommeil, lui demande le gosse.
Il est là, à agiter ses jambes sur la chaise bien plus haute que lui, un sourire jusqu'aux oreilles. Pourquoi il sourit l'idiot ? Y a quoi à sourire comme ça pour rien ? Depuis quand on sourit pour rien ici ? Elle sourit même pas toute seule Demi. Elle sourit que pour les hommes, quand il faut bien avoir un petit extra. Et lui, il sourit pour dormir. En plus, il est dix heures. Il vient de se lever. Pourquoi aller dormir après s'être levé ?
-- Parce que je veux dormir, qu'il lui dit quand elle demande.
Elle le regarde en biais. Elle cligne des yeux, le bol et le torchon encore dans la main. Ce gosse est pas normal. Pourtant, c'est bien le sien. Elle le ressent. Enfin, elle croit. Elle ressent un truc en tout cas. Et puis, elle appelé sa mère. Le môme s'est bien barré de chez elle. Que des problèmes, qu'il lui apportait, elle a dit Mama. Qu'il reste chez toi, qu'elle a ajouté. Super. Un cadeau.
Elle lui dit qu'il peut aller dormir. De toute façon, elle a rien pour lui. Ni console de jeu, ni jeux de carte, ou peluche, ou dieu sait quoi pour occuper un gamin. Elle a rien pour lui. Elle le regarde fuir dans sa chambre. Il dort là. Elle se voyait pas lui laisser le canapé. Elle sait pas pourquoi. Peut-être que ça peut empêcher de grandir, de dormir sur un canapé, non ? Elle l'entend fermer la porte et elle se demande encore, comme depuis deux jours, quoi faire du marmot. Une plaie. Elle peut plus ramener de clients. Non pas qu'elle en ramène beaucoup ici. Les spéciaux. Ceux qu'elle affectionne un peu plus que d'autres. Elle devait se débarrasser du gamin. Vraiment. Ces clients payaient bien. Pas sûr qu'ils apprécient d'avoir un p'tiot de neuf piges venir en pleurant dans le lit à cinq secondes au bord de l'extase. C'était des pourboires en moins, voir carrément un client de perdu. Les hommes n'aiment pas les enfants. C'est un fait.
Ding dong.
Qui c'est à cette heure-ci ? La dernière fois, c'était une mauvaise nouvelle. Enfin, c'était un nouveau problème à ajouter à la longue liste des problèmes pré-existant. Elle n'était plus rassurée. Comme d'habitude, elle ouvre la porte en gardant le loquet. On sait jamais, ici. Trop de gang. Trop de merde. Elle s'attendait au pire, à dire vrai. Le pire n'était visiblement plus d'actualité. Une peau soyeuse, divinement colorée. Des lèvres plus appétissantes qu'un raille en pleine soirée. Et ce regard. Ce regard, elle ne s'en lassait pas. Elle le préférait presque à ses caresses. Presque. Darius savait comment l'échauffer. Elle se remémorait déjà certaines de leur mesquineries coquines. Mais un gamin court sur pate se rappela à elle. Il faudrait souiller sa voiture, s'il venait pour quelque chose. D'ailleurs, pourquoi il était là ?
-- Pourquoi t'es là Darius ? demande-t-elle sans défaire le loquet.
Il ne peut pas rentrer. Elle ne peut pas le laisser rentrer. Quatre ans qu'elle le travaille au corps. Un de ses meilleurs clients. Un de ses plus agréables. Un de ses meilleurs payeurs. Un de ses favoris. Sans plus attendre, elle referme la porte pour la rouvrir. Une main sur son torse, doucement, elle l'éloigne du pallier pour sortir avec lui et fermer derrière elle. Pas ici. Pas maintenant, Darius.
-- Si tu viens pour le Sinners, je n'ai pas encore eue d'info, malheureusement. On parle d'un acte volontaire. Mais impossible d'en savoir plus pour l'heure, elle lui détaille doucement, avec sa voix de sirène.

La nuit a été longue. Infructueuse. L'atmosphère est lourd en ce moment à Crescent Heights et si on en croit les infos un orage d'été comme Darius les aime se prépare. Du bruit, de la violence, une ambiance de chaos. Puissant et inévitable. Tout ce qu'il tentait d'être quand il portait l'uniforme. Et même quand il s'en séparait d'ailleurs. Cette patrouille a été d'autant plus douloureuse qu'il ne l'a pas faite seul. Sur le siège passager, une jolie blonde aux yeux bleus drapée dans une fierté insolente lui imposait peu à peu son rythme sans même qu'il ne s'en rende compte. Gallagher était une vraie plaie mais c'était une bonne flic. De celles qui n'avaient pas encore compris qu'elle ne pourrait pas changer le monde à elle toute seule et que le monde était beaucoup plus manichéen qu'elle n'osait se l'avouer. Darius avait bien tenté de lui expliquer son point de vue mais il était rarement tombé sur une personne de qui il était si différent. En tout point. D'habitude il se console avec l'idée de se réfugier au Sinner une fois sa patrouille terminée mais son refuge préféré a péri dans les flammes il y a quelques semaines déjà mettant un mal tout un écosystème économico-social. Parmi les victimes Demi Fowlers dont il n'avait absolument aucune nouvelle depuis la dernière fois qu'il l'avait vu. Demi était son passe-temps référé. Sulfureuse, maligne, délurée, féline. Elle était la favorite de beaucoup des gros porcs qui se trainaient au Sinner. Lui le premier. Sauf qu'à la différence, bien qu'il payait grassement pour la voir se déshabiller, jamais il ne l'avait payé pour coucher. C'était du moins la petite histoire qu'il aimait se raconter. Penser qu'elle couchait avec lui uniquement par plaisir et pas pour les pauvres billets qu'il glissait de temps à autres entre sa peau et son string était beaucoup plus valorisant pour son égo débordant. Il doit avouer qu'elle a un truc qu'il a jamais vu ailleurs, une sorte d'audace maitrisée mélangé à un désespoir touchant. Il l'a déjà vu gifler un client trop entreprenant, il l'a déjà vu frapper une des filles du Sinner qui avait tenté de faire croire au patron qu'elle gardait certains tips pour elle. Il sait que c'est une psycho et c'est exactement pour cette raison qu'il y retourne. Car sa capacité à elle à se foutre de tout se conjugue parfaitement à son manque d'intégrité total. Une chose est sûre, démon et diablesse aiment danser la Samba ensemble et alors que le soleil se lève timidement sur Crescent Heights, sa première pensée va vers elle.

Lorsqu'il passe devant chez elle une première fois sur la route du retour vers le commissariat où il doit déposer Gallagher il songe à passer. Il réfléchit à si il n'est pas plutôt d'humeur à rentrer chez lui auprès de son chien puis finalement après avoir déposé sa collègue, c'est comme si sa caisse trouve naturellement le chemin qui mène à chez elle. Vingt minutes plus tard il est devant sa porte et elle lui demande pourquoi il est là. Ah. Ouais. Bon. Il se gratte l'arrière de la tête, un peu gêné. Il s'était imaginé qu'elle allait lui ouvrir grand la porte et l'inviter à rentrer avec cette moue coquine qui le rendait complètement dingue et résultait 100% du temps en un tas de vêtement éparpillé dans son appart. J'ai fini ma patrouille j'me suis dit que je viendrais bien prendre le café... Et peut-être même quelque chose d'autre qu'il a envie de rajouter. Sauf que voilà, elle le prend de court en l'obligeant à rester dehors. Darius devient instantanément suspicieux. C'est un putain de flic, il sent quand quelque chose n'est pas normal et il comprend immédiatement que Demi cache quelque chose. Quelque chose qu'elle n'a visiblement pas envie qu'il sache. Il ne s'étonne pas une seconde qu'elle ne lui fasse pas confiance mais c'est la curiosité qui le pique avant tout. T'as quelqu'un ici ? Il imagine un autre mec, un client. Il a pas envie de penser que Demi puisse vendre son corps à des connards du coin mais il sait que la vie est dure à Night Falls. Et que la beauté et la jeunesse peuvent être de sérieux atouts quand on lutte pour sa survie dans ce monde de merde. Qui tu veux pas que je le vois ? Je le connais ? Son ton est un peu plus dur, il est presque impatient.

Il a son truc en plus, Darius, y a pas à dire. Maintenant qu'il est là, devant elle, elle le ressent un peu plus. Quelques semaines sans lui, elle sait faire. Elle a jamais eue grand monde en même temps. Mais elle se rendait compte, là, maintenant, de cette petite pointe d'impatience qu'elle avait. Qu'il passe glisser ses mains sur sa lingerie. Foutues habitudes. Elle avait pas besoin d'un manque. Encore moins d'un Darius. Elle l'oubliait pas. Véreux et flic. Si elle en tire tous les bénéfices grâce à ses yeux de chats -et surtout grâce à ces quelques petits trucs qu'elle sait faire avec son corps- elle n'oublie pas qu'il est aussi dangereux pour lui que les informations qu'elle lui passe sous l'oreiller. Darius, le diable déguisé. Elle, la vipère assumée. Peut-être que c'est ce qu'il leur faut l'un l'autre. Mais il n'y a rien de plus trompeur que l'un et l'autre séparé. C'est comme si au lieu du ying et du yang, on s'accordait sur un yang ténébreux unique. Les deux pourraients surement faire des merveilles de perversions. Mais personne ne le souhaiterait. En tout cas, même Demi ne le souhaiterait à personne. Si ce n'est elle. Ca lui arrivait le soir, seule, d'avoir une pensée pour son bel étalon badgé. Mais vague. Distante pensée. Le genre qu'on enterre plus vite qu'un corps car bien plus dangereuse. Bien plus ténébreuse. Même maintenant, elle tentait de plonger dans les abysses cette sensation de soulagement. Ce petit pincement qu'il vienne jusqu'ici.
Elle le regarde les bras croisés, mais sans aucune animosité. Non, au contraire, elle est presque touchée. Presque. Elle roule les yeux vers le haut, se détendant. "Je viendrais bien prendre le café." Elle en connaissait suffisamment, des hommes, pour savoir qu'on ne fait jamais "que prendre le café". Mais ça la touche. Ca lui fait tout chaud quelque part. Dans une zone inexplorée en elle. Quelque part sous les côtes. Ca fait presque mal. C'est pas agréable. Elle sait pas d'où ça vient. Prendre le café. Elle sait. C'est comme le code. Le mot de passe pour entrer. Dommage, mon mignon. Tu n'est pas le seul déçu. Demi t'aurai ouvert bien plus que la porte de son appartement. Et sans hésitation. Juste pour un café.
-- Tu peux aussi simplement dire que je t'ai manqué...
Elle se glisse vers lui plus féline qu'à l'instant. Plus entreprenante. Plus avide. La proposition est si alléchante. Et elle n'a toujours été que désir. Avec lui, comme d'autres. C'est bien ce qui lui a valu un môme sur les bras, après tout. Cette avidité. Ce besoin de plaire et de satisfaire pour s'enorgueillir d'être un peu mieux. Un peu plus jolie. Un peu plus riche. Un peu plus. Elle sait. Et Darius aussi. Il lui plaît plus que les autres. Enfin, leur arrangement démontre un intérêt. Tant qu'il est professionnel. Mais joindre l'utile à l'agréable n'a jamais fait de mal. Elle joindrai bien l'agréable Demi. De bon matin. Elle lui aurait offert le café alors qu'elle se courbait sur la table pour le lui servir. Mais non. Quand enfin elle pourrait se faire plaisir, il faut qu'il y ai une complication. Elle bouillonne contre le môme. Ca ne tiendrait qu'à elle, elle l'aurait traîné dehors le temps de faire son affaire. Attendez, elle pourrait le faire.
-- Qui tu veux pas que je vois ? Je le connais ?
Non, elle pourrait pas le faire. C'est pas un client lourdingue à remercier une fois l'argent encaissé. Non, s'agit de son gosse. Elle aime pas ça. Elle aime pas, parce que ça attire la pitié ces choses là. Elle a pas besoin de pitié. Elle est pas une énième strip-teaseuse à la vie ratée. Son métier, elle l'a choisit y a presque dix ans. Sans une once d'hésitation. Fallait taffer. Elle savait taffer. Bordel, elle était douée. Plus douée qu'en cours la gamine. Pas étonnant qu'elle soit jamais sortie de là. Elle en tire une satisfaction grandissante. Enfin, les temps sont durs, elle envisage d'autres choses. Mais c'est de l'argent facile. Soit bonne et tais-toi. Encaisse vite, dès que t'as le liquide.
Elle le sent curieux. Elle le sait, il a autant de coeur qu'elle. Ses questions, c'est pas mal placé. Sauf qu'elle voit pas pourquoi elle y répondrait. Mais elle sait y faire. A contrario du policier de ses nuits, elle se détend. Qui qu'il y ait chez elle, il n'est plus au Sinner. S'il veut encore un peu de bride de plaisirs soupçonné d'un zest de rumeurs et de commérage, il allait devoir aligner. Et un peu plus. Comme elle l'a dit, les temps sont durs. Les beaux yeux et les bonnes caresses d'un hommes n'adouciront pas les éclairs de la tempête.
-- Oui. Non. Qu'est-ce que ça peut faire. C'est chez moi quand même. Aux dernières nouvelles, tu n'as payé que pour le Sinner. Chez moi, c'est autre chose.
Elle susurre presque la fin de sa phrase. Elle peut pas s'empêcher de jouer un peu de ses courbes, les alignants plus proche de Darius. De son corps. Comme pour noyer le poisson. Ca ne lui suffira pas, mais déjà, si elle peut gagner un peu de temps. Et de l'argent. Pourquoi se priver ?! Ce sont des denrées de plus en plus rares à Night Falls.
-- Si vraiment tu ne peux pas attendre, sache que j'ai toujours rêvé de le faire dans une voiture de police, qu'elle lui murmure à l'oreille.
Elle a ce sourire en coin Demi. A trop parler, elle s'embrase. Elle veut. Elle le veut. Ca la distrait un peu de tout ce qu'il s'est passé. De tout ce merdier. Du Sinners, du gamin, du temps.
Ça la détend. Ca lui change les idées. Elle se sent moins crispée. Pourquoi ne pas continuer.

C'est peut-être ça son problème. Ce besoin viscéral de tout contrôler. Il ne supporte pas de perdre la main sur n'importe quelle situation que ce soit, même s'il s'agit simplement de sa strip-teaseuse préférée qui lui fait de la résistance. Il a besoin de se concentrer pour pas la laisser le berner. Elle sait. Elle sait mieux qu'aucune autre l'effet qu'elle a sur lui. Il ne sait pas comment, jamais il n'avait rencontré une femme aussi consciente de son pouvoir de séduction. A chaque fois qu'ils se retrouvaient tous les deux dans une pièce calfeutrée et qu'elle commençait à se pencher vers lui, ses courbes déclenchaient une putain de fanfare dans sa tête dont elle était la chef d'orchestre. Sa manière d'onduler, de bouger, de lui parler : tout chez elle lui donnait une envie immédiate de la posséder et de ne plus la lâcher. Heureusement qu'elle ne se gênait pas pour leur dire quand la fin de la récréation avait sonné car il aurait pu se perdre entre ses jambes un siècle entier. Sa voix doucereuse, parfois dure, cette putain de paire de fesses qu'il n'avait eu nulle part ailleurs. Ca le faisait chier de l'avouer mais l'idée que d'autres mecs puissent en profiter avait commencé à le titiller récemment lorsqu'il l'avait vu sortir d'une cabine avec un autre mec, plutôt pas mal d'ailleurs dans le genre white trash tatouée et balafrée. Demi était une ode au sexe, tout chez elle donnait envie de se damner et le piège était de se laisser charmer au point de perdre le sens des réalités. Demi est maligne, elle sait comment détourner l'attention et c'est exactement ce qu'elle fait ce matin en susurrant à son oreille. Est-ce que moi je t'ai manqué ? Qu'il demande en glissant une main directement sur sa fesse, il la colle à lui légèrement puis la relâche lorsqu'elle lui répond qu'il n'a payé que pour le Sinner. Darius hausse les sourcils, pas très impressionné; Ah parce qu'il faut un pass spécial pour jouer à domicile ? C'est vrai que son appart était un peu off-limit en comparaison avec tout ce qu'ils avaient fait avant mais Darius était le genre de mec qui se lasse vite. Un petit coup de canif dans le contrat ferait pas de mal pour redynamiser un peu tout ce bordel qu'était leur relation. Surtout depuis l'incendie du Sinner dans lequel ils avaient perdu leur terrain de jeu préféré. Sauf que voilà, elle a attisé sa curiosité à jouer les innacessiblles et bien que sa proposition d'aller faire des cochonneries sur la banquette arrière de sa voiture de flic est tentante, Darius a autre chose en tête. Son comportement est suspect, il sait qu'elle lui cache quelque chose et il est bien déterminé à le découvrir. Ca tombe bien car j'ai ma caisse perso. Il jette un coup d'oeil par dessus elle vers la porte close, il se demande ce qu'elle peut cacher là-dedans. Un mec en cavale ? Un client qui met plus du temps que les autres à remettre son pantalon ? T'es bizarre. qu'il rajoute l'air circonspect. Sa manière de parler, de se comporter. Quelque chose cloche. Il sonde son regard quelques secondes avant de finalement céder à la tentation, beaucoup trop forte. Il la contourne, frôlant son épaule au passage et rentre dans l'appartement. Il balaye la pièce du regard, rien en vue, lorsqu'il entend du mouvement dans la chambre. Bingo. Elle était en train de se taper un connard alors qu'il venait comme un con quémander un petit-déjeuner. Mais qui ça pouvait bien être pour qu'elle prenne le risque de lui cacher, lui qui finissait toujours par tout savoir ? Elle commençait à le connaitre pourtant maintenant, c'était difficile de garder un secret avec lui. Il ouvre la porte de la chambre à la volée, prêt à en découdre avec le trouduc qui a décidé de l'empêcher de se distraire ce matin. Il s'attend à voir un pauvre type bedonnant en train de galérer avec sa braguette ou un voyou du quartier en train de fumer une clope au bord de la fenêtre encore à moitié habillé mais non. Rien de tout ça. Ce qu'il découvre assis sur le lit, le laisse perplexe. Un gosse d'environ dix piges assis sur le lit avec un gun dans les mains qui semble être sorti de la table de nuit. Mais... T'es qui toi ? Effaré, Darius tourne la tête légèrement sur le côté pour que Demi puisse l'entendre. Euh Demi c'est normal qu'il y ait un môme en train de jouer avec un gun assis sur ton lit ? Il avait aucune idée de qui était ce sale morveux, mais ce qui est sûr c'est que jamais Demi n'avait fait mention d'un môme dans son lit. C'était sûrement un neveu, le fils de la voisine ou un truc dans le genre. Impossible que Darius soit passé à côté d'un truc pareil, ok ils n'étaient peut-être pas du genre à se confier à l'autre mais de là à ne pas avoir entrevu l'existence d'un gosse dans la vie de la strip-teaseuse. Le pire c'est que Darius commence à lui deviner des airs de ressemblance avec Demi au petit lascar. Le flic commençait lentement à comprendre pourquoi la jeune femme l'avait empêché de passer la porte de chez elle. Ce n'était pas un squelette qu'elle avait dans le placard mais pire encore. Darius n'était plus du tout sûr de vouloir prendre son petit-déjeuner ici à présent. Même pas un café.

Elle sait pas Demi. Elle sait pas ce qu'il se passe avec cet homme. Elle en veut toujours plus et doit sans cesse se refréner. Elle a rarement perdu le contrôle. Ce qu'elle fait. De son corps. De ses mains. De sa bouche. De son entre-jambe, c'est du taff. Un comme un autre. Mais un travail en plus. Si il faut vraiment des heures supplémentaires, elle n'hésite pas. Those things we do for money. Pourtant, avec Darius. Ce n'est plus une question d'heures sup, ni d'argent. C'est une question de temps en plus. Elle doit le remercier. S'eclipser plus vite. Échapper à quelque chose qu'il lui est devenu inconnu. C'est quelque chose qui se passe en elle. Un pic dans le coeur. Un filet de sueur dans la dos. Pas de peur. Ou peut-être. Juste, autre chose. Elle voudrait qu'il la retienne parfois. Mais en s'oubliant. En oubliant qui il est. En oubliant qui elle est. Se perdre un instant l'un en l'autre, sans retenue, sans vergogne. Sans pensée pour l'argent. Sans pensée pour le travail. Peut-être l'écouter un peu plus, lui. Peut-être l'écouter un peu plus, elle. Mais non. C'est Darius. Ce filet de sueur n'est probablement pas là pour rien. Elle le ressent. Et elle souhaitait qu'elle ne soit pas juste une de plus, au fond. Bien qu'elle le connaisse, d'une manière ou d'une autre. Tout en lui, lui parlait. Même dans ses râlements de plaisir à chaque mouvements de ses reins. Il était comme un parfait reflet de ce qu'elle pouvait être. Comme un écho à elle-même. Etrange sentiment. De connaître l'âme de quelqu'un. Et d'être encore là. Les nuits qu'il voulait. Mais ce contrôle constant qu'elle avait sur elle-même pouvait être épuisant. Parfois. Sauf quand elle avait la surprise de le voir arriver ici. Chez elle. Ce petit coup de chaleur en elle, l'excitait plus qu'il ne l'effrayait. Et cette main sur ses fesses. Ferme. Elle voulait l'autre sur son sein. Puis accroché à son cou, pour un baiser comme il savait en donner. Bloquée contre cette porte. Si elle répondait oui, à sa question, elle se sentait plonger lamentablement dans les problèmes pour s'y noyer définitivement. Elle préfère ne pas répondre. Fuit. En un regard de chat, vers lui. Elle a pas envie de lui donner satisfaction. Elle devrait, c'est son métier. Elle peut être qui elle veut pour lui. Une ex, une pute, une femme mariée, une maîtresse. Ce qu'il veut, il peut l'avoir. Mais avec Darius, elle veut simplement être elle.
L'idée de la voiture l’excite. Elle en veut toujours plus, Demi. Elle cumul les clients, parce qu'elle veut plus d'argent. Un jour, elle espère bien sortir de ce trou. Jouer les taupes pour sortir du tunnel et se barrer. Être loin de tout ce foutoir. Mais sans môme. Sans rien. Juste elle, ses fesses au chaud et un joli montant en poche. Un jour. Elle en est sûre. Elle est prête à l'emmener dans sa caisse. Presque, elle lui prend la main pour le tirer dans la direction. La meilleure direction. Loin de sa responsabilité. Loin de Devon. Loin de ce môme indésirable. Loin de ce surplus de problèmes. Viens Darius, on s'enfuit. On se tire. Y a rien ici. Rien pour toi, ni pour moi. a-t-elle envie de lui dire. Mais déjà, son regard est derrière elle. Vers cette porte. Un mur. Pourtant, les portes sont fines ici. Elle sait qu'elle ne tiendra pas Darius. C'est un pitbull.
-- Je ne suis pas bizarre. Je t'ai dis, pas ici.
Elle est froide, soudain. Elle a dit non. Elle ne veut pas. Ne fait pas ça Darius. Un non est un non. Elle ne peut pas se battre contre lui. Il gagnera. Ca ne serait pas le premier coup de sa vie. Mais ce n'était pas juste une comparse. Il était plus grand. Plus fort. Plus puissant. Elle avait entendu parler de lui. Tout le monde dans le Sinner, avait entendu parler de Darius King. Sale flic. Faux flic, parfois même. Emmerdeur de première. Castagneur invétéré. Elle éviterait de se frotter à lui. Elle évitait déjà. L'avantage des courbes sensuelles avec elle. Avant qu'elle n'est eue le temps de souffler, il la frôlait déjà pour entrer.
-- ]Putain de merde, lache-t-elle
Elle le suit, mais elle sait qu'elle ne peut l'arrêter. Au lieu de quoi, elle récupère une cigarette laissée de la table. La grille. Puis le suit à la chambre. Elle ne sait pas ce qu'il la choque le plus. La tête de Darius ou le gosse avec son arme. Probablement le môme vu qu'elle lui fond dessus.
-- Putain de merde de bordel de mes couilles, Devon ! Tu fou quoi avec mon arme. T'étais sensé dormir !
Elle lui arrache l'arme à feu des mains. Elle hésite à lui en mettre une, mais une chose en elle, une petite voix, lui souffle de ne pas le faire. La main est pourtant déjà en l'air. Mais le gosse n'est pas le problème. Elle se tourne vers Darius. Elle n'est pas heureuse Demi. Tous ses trais sont plissés. Elle fulmine. Elle le pousse.
-- Toi. Je t'ai dis non.
Elle le pousse encore.
-- C'est quoi ton problème avec un non. Putain.
Elle le pousse encore hors de la chambre. Elle le giflerait. Mais à ce jeu là, elle perdra. Elle se tourne vers le petit, une dernière fois.
-- Tu bouges, c'est cette arme contre ton front.
Elle n'en peut plus de ces hommes, parfois. Toujours à vouloir un gros calibre en main, et une grosse paire dans le pantalon. Pourtant, dans la tête, il y a rarement plus que le vent qui souffle. Elle dépasse Darius dans le couloir pour atteindre la cuisine. Elle a rarement ressentie une telle colère. Elle n'a pas envie d'avoir à justifier ce qu'il se passe à Darius. Ni à lui expliquer. Il ne mérite probablement pas tout ça, lui, qui n'est qu'un client, après tout. Elle l'oublie parfois tant les moments sont bons. Pourtant, n'est-ce pas ce qu'il est ?
-- Tu le veux ton café ? Tiens !
Elle pause une tasse remplie sur la table. Le geste est si brusque que la moitié doit se renverser sur la table. Elle croise les bras avant de le regarder droit dans les yeux. Il fallait que ce soit lui. Lui, qui le découvre en premier. Le poids du passé.
-- Heureux de ta petite découverte ? demande-t-elle sèchement.
Le gosse derrière semble chouiner dans son coin. Elle n'en a rien à faire. Ce n'est qu'un gosse. Probablement en manque d'attention. Jouer avec un flingue. Quelle idée !

Darius s'était imaginé un tas de mec sur ce lit mais sûrement pas un môme d'une dizaine d'année en train de jouer avec un gun. Le gosse a l'air franchement paniqué quand il le voit surgir de nulle part. Faut dire que Darius ressemble pas franchement au Père Noël et que son air aimable n'est pas franchement ce qui saute aux yeux en premier. Le gosse sursaute vivement, très mauvaise idée quand on tient un flingue et finalement c'est Demi qui surgit à son tour pour arracher le flingue des mains du gosse. C'est la première fois qu'il la voit en colère, ça l'exciterait vite fait s'il n'était pas en train de comprendre que sa distraction préférée avait peut-être un gros truc à cacher. Le gosse abdique mais son menton tremble, signe qu'il va pas tarder à ouvrir les vannes il a l'air un peu dépassé et pas franchement à sa place. Il fait tâche dans cet appart mais pourtant il est bel et bien là. Darius regarde tout ce petit manège avec un air perplexe, Demi est à deux doigt d'en coller une au môme et c'est pas le flic qui va l'en empêcher. C'est clairement pas un jouet adéquat pour un môme de cet âge là mais c'est monnaie courante dans ce genre de quartiers où les gosses apprennent presque à tirer avant de savoir marcher. C'était vraiment pas une bonne idée petit mec. Non seulement le gosse se prend une soufflante mais Darius semble être sur le point d'en récolter une aussi, la strip-teaseuse la pousse une première fois et Darius, même si il ne recule pas d'un pouce le prend franchement mal. Eh mais c'est quoi ton putain de problème ? Elle le pousse une deuxième fois, elle est folle de rage parce qu'il a découvert son petit gros secret, quel domamge. Son gros petit secret est d'ailleurs totalement éberlué, Darius a pas encore confirmation de qui est qui mais quelque chose lui dit que ces yeux noirs il les a déjà vu quelque part. C'en est presque perturbant. Lorsque Demi balance au gosse qu'un geste de plus et elle le mettait en joue il ne put s'empêcher d'esquisser un sourire. Cette meuf était vraiment une putain de badass.

Sans même qu'il ait pu s'en apercevoir, Darius se retrouve propulsé dans la cuisine de Demi. Elle virevolte autour de lui, animée par une colère incontrôlée qui ne la rend pas moins jolie. Bien au contraire, elle est carrément bandante avec ses yeux noirs furieux et sa mine renfrognée. Elle lui balance un tasse de café dont la moitié du contenu se retrouve sur la table et il la regarde faire, les sourcils haussés, les bras croisés face à sa performance dramatique hors du commun. Elle s'en remet pas, qu'il ait insisté pour rentrer dans son appart pour voir ce qu'il s'y cachait. Preuve qu'elle le connait encore mal, Darius ne demande jamais l'autorisation. Il fait, c'est tout. Je pensais que tu cachais un vieux mec. J'étais curieux de savoir à qui tu donnes ton cul pendant tes jours off, j'ai pas le droit ? La jalousie et la possessivité n'étaient franchement pas dans le contrat mais franchement ça serait mentir que de dire que ça lui faisait particulièrement plaisir de savoir qu'elle s'adonnait aux mêmes choses avec lui qu'avec d'autres. Parce que clairement, elle était sa préférée d'entre toutes. Et de loin. Le fait qu'elle soit également son indic était un magnifique plus qui le confortait dans ses mauvaises habitudes de courir la voir à chaque fois qu'il avait besoin de relâcher la pression ou simplement penser à autre chose pendant l'heure où il payait pour être en sa compagnie. Donc, j'suppose que ce morveux est ton gosse vu ta réaction. Il ne l'avait jamais imaginé avoir un gosse mais maintenant qu'il le savait c'était presque logique. Il la pensait plus maligne que de tomber enceinte aussi jeune mais dans son taff il voyait tous les jours des gens qui prenaient des mauvaises décisions. Alors pourquoi pas elle après tout. J'sais pas pourquoi tu réagis comme ça, j'en ai strictement rien à foutre que t'ai un mioche. Faux. C'était une information qu'il aurait besoin d'un peu de temps pour process correctement. Un gosse franchement ? Du moment que c'est pas le mien. Il adorait les gosses pourtant. C'était pour ça qu'il était aussi impliqué dans la vie associative de sa communauté. Leur apprendre le basket, les emmener à la plage, leur faire découvrir de nouvelles choses c'était le seul truc qui lui plaisait dans la vie. Mais il n'avait pas signé pour s'occuper des mioches de ses plans cul ça non franchement très peu pour lui. Darius jette un regard autour de lui. En tout cas tu le caches bien ce gosse, on dirait pas qu'un môme vit ici. Le fait que le gosse partage sa chambre avec sa mère est quand même un peu chelou quand on connait l'emploi du temps particulier de la belle brune. Darius a du mal à comprendre pourquoi elle lui a caché, même si faut dire que les conversations qu'ils avaient d'habitude au Sinner n'avaient pas grand chose avoir avec leur vie perso.

Il avait ce regard qu'on a, la première fois qu'on pointe une arme contre sa tempe. Pourtant, elle l'avait pas fait Demi. Elle lui avait pas pointé l'arme. Juste arraché des mains. Il devait comprendre. Ici, c'est pas comme chez Mama. C'est pas tout rose. S'il pensait partir en vacances, le gosse devait avoir fait fausse route. Peut-être que c'était ça le secret, l'effrayer et il disparaîtrait. Mais s'il était la raison de tout ce merdier, il n'empêche que c'était qu'un môme. Le problème, c'était Darius. Elle ne voulait pas qu'il soit là. Elle le voulait pas dans ce tableau. Ni qu'il interprète les mauvaises choses. Elle lui avait jamais caché ce gamin. Jamais. Il n'était pas son fils. Elle l'avait à peine vu une fois expulsé de son ventre. Juste le temps de l'entendre crier, de donner un nom et sa mère s'était chargée du reste. Elle avait rien donné pour lui. Et elle pensait qu'il ne demanderait rien en retour. Une erreur, apparemment. L'autre erreur avait été de croire que Darius s'en irait sans quémander un dû. Elle avait été trop optimiste cette fois. Et maintenant quoi ? Elle savait que Darius bossait avec des gosses à ses heures perdues. Mais elle voulait pas qu'il soit mêlé au sien. Elle fait rarement des cas de conscience Demi, mais elle a pas envie de son gamin dans ses pattes ni proche d'un mec comme Darius. C'est comme ça. Trop de sales histoires. Même elle n'était pas "bonne" pour un gamin. Pas besoin d'en rajouter. Elle a du mal à se calmer. Son humeur lui joue des tours. Et le mioche qui pleure en fond n'arrange pas les choses. Elle sait pas y faire. Elle sait pas calmer les gens. Encore moins en état de colère. La seule chose à laquelle elle pense, c'est qui frapper. Le môme, Darius, elle-même. Un petit coup. Juste pour faire sortir tout ce qui bout en elle.
Elle regarde le flic avec ce regard noir, les bras croisés contre sa poitrine. Elle sait même pas quoi lui dire. Non, elle n'a jamais prévu de ramener Darius dans sa vie. Pas dans cette partie de sa vie. Le passé. Où tout est brouillé et mauvais et fade. Quand elle n'était qu'une gamine amoureuse. Personne savait qu'elle pouvait aimer Demi. Hormis les billets.
-- Non Darius, ça fait pas parti du contrat, elle dit sèchement.
Quel contrat, d'ailleurs ? Au bout d'un certain temps, elle avait finit par voir leurs sessions torrides comme autre chose qu'un simple accord. Comme un rendez-vous sensuel où les deux prenaient du plaisir. Elle voyait Darius par plaisir. Sans aucun doute. Mais elle s'attendait pas à ce qu'il fasse irruption comme ça. Elle avait pas envisager qu'il puisse la vouloir que pour elle. Tant pis, Darius, tu fais tes petites affaires, elle en entend parler constamment, surtout au Sinner. Alors s'il imagine qu'elle se priverait pour ses mouvements de reins, il avait tort.
-- C'est pas mon gosse. Je l'ai pas élevé. C'est qu'un gamin têtu, stupide et inutile.
Elle sait pas comment le décrire autrement. Elle peut pas. Elle le connait pas. Il a juste fait irruption comme ça, du jour au lendemain. Elle avait presque oublié avoir un môme un jour. Comme elle avait faillit oublier son passé. Elle avait fait une croit dessus en même temps que les sentiments. En même temps que la candeur. En même temps que l'innocence. Il n'y avait rien d'innocent dans la naissance de Devon. Il était une erreur. Le genre d'erreur qu'on fait quand on est naïve, jeune et pleine de sentiments. Elle refera jamais ça, Demi. Elle se l'est promis. Comme ce genre de promesse qu'on fait pour aller mieux, pour être sure que sa vie sera toujours comme il faut. Juste comme il faut.
Elle peut pas s'empêcher de lacher un rictus. Non, pour sûr on dirait pas. C'est pas un lieu pour un môme ici. Pas dans ce quartier.
-- Tu crois vraiment que je t'ai cacher un gosse, Darius ? J't'ai dis, c'est pas le mien, je l'ai pas élevé. Il a juste débarqué.
Elle décroise finalement les bras, quelque peu relâchée de toute colère. Elle pose ses mains sur le comptoir de sa cuisine, toujours tendu. Elle est un peu dans l'attente, maintenant. Attendant de savoir ce que ça va changer d'avoir un gamin. Le silence qui s'installe est étranger. Avec un gamin derrière ce mur, qui crit à plein poumon.
-- Devon, souviens-toi, si tu continues, tu sais où cette arme va se trouver, crit-elle à travers l'appartement.
Derrière, le môme se tait. Enfin.
-- Bois ce café, lance-t-elle plus doucement à Darius.
Et s'il te plait, oublie ce que tu as vu, a-t-elle envie d'ajouter.

Lui qui était crevé par sa patrouille et rêvait d'un café chaud et de quelques pancakes... Il avait gagné un café froid à moitié renversé, un plan cul énervé et un gosse qui braille de l'autre côté. Quoi de mieux pour entamer la journée n'est-ce pas ? Les yeux de Demi lancent tellement d'éclairs qu'elle pourrait alimenter toute la ville à elle toute seule. Il avait raison donc, elle confirme à sa manière que le gosse est le sien. Elle l'a pas élevé, ça explique beaucoup de choses. Ce gosse elle en veut toujours pas visiblement. Les familles dysfonctionnelles ça le connait Darius. Un peu trop même. Il suffisait de jeter un coup d'oeil à son passé familial. Passé dont il ne parlait jamais pour des raisons évidentes. Des raisons qui font mal. Des raisons qui font celui qu'il est devenu aujourd'hui. Son père a fini en taule pour avoir volé et tué sa cousine âgé de cinq ans à l'époque, sa mère est une maniaco-dépressive qui est parti vivre en Arizona parce qu'elle arrivait pas à l'élever. Il ressemblait trop à son monstre de père qu'il disait. Il a jamais eu de repères si ce n'est ses grands-parents qui ont tenté tant bien que mal de s'occuper de lui, de l'aider à devenir un homme malgré cette colère qui le rongeait et qui le ronge encore constamment. Il le porte sur son visage, ça se voit dans ses coups, dans sa manière de traiter les gens et les femmes. Alors finalement, il avait de quoi s'identifier au pauvre môme qu'il venait de rencontrer par hasard mais entre partager quelques points communs et être attendri y avait un monde. Il fait tout son possible pour ne pas juger Demi mais c'est dur. Elle est un putain de cliché vivant. Beaucoup plus qu'il ne l'avait soupçonné. Stripteaseuse, mère irresponsable, accro au cul. Y avait-il quelque chose chez elle de louable ? Il en doutait et c'était tant mieux, il aurait moins de scrupule à la malmener si un jour ça doit arriver. Parce que ça arrivera. Ca arrive toujours. Mais surtout parce qu'avant tout Demi est une indic. Le sexe est censé venir en second. Elle est là pour l'informer sur tout ce qu'il se passe derrière les rideaux du Sinner, qui a cramé maintenant, certes. Mais Darius se doute qu'elle continue d'être informée. Ne serait-ce que par ses clients. Elle reste une balance à ses yeux la pire race qui marche sur terre et sans doute que si elle avait pas un cul d'enfer il la mépriserait de tout son être. Mais y a un truc touchant chez elle, un truc de petite gamine paumée qui a sacrément merdé. Ou peut-être qu'il était simplement aveuglé par sa beauté incontesté. Ouais c'était sûrement ça. Il est surpris de voir qu'en colère elle dégage quelque chose d'autre. Quelque chose de sombre. Quelque chose qu'il n'avait jamais vu auparavant. Mais ça ne suffira pas à le faire rester. Ouais t'as raison. Ca fait pas du tout parti du contrat donc je vois pas pourquoi je me ferais chier à rester ici à bouffer tes conneries en guise de petit-dej. Il n'est pas venu là pour se prendre la tête bien au contraire. Il constate la tasse à moitié vide un instant puis la regarde à nouveau. Sa décision est prise il se barre. Finalement j'suis plus intéressé. Bonne journée Demi et bon courage avec ton gosse. Je crois que tu vas en avoir besoin. Il n'attend même pas de réaction de sa part, il connait le chemin de la sortie et il l'emprunte sans se faire prier. Soit c'est simple, soit il se barre. Il a toujours été clair là-dessus. Demi ne s'était pas gêné pour lui dire que ça ne faisait pas partie du contrat et elle avait parfaitement raison. Puisque ça ne faisait pas parti du contrat il allait justement en profiter pour s'éclipser pour rentrer chez et végéter devant Netflix jusqu'à ce que le sommeil l'atteigne. Il se réveillera des heures plus tard reposé et peut-être qu'il ira bouffer un morceau avec Cash ou un truc du genre. Assez de drama pour aujourd'hui. Voir même pour la semaine. Demi était à deux doigts d'être rayée de son carnet d'adresse. Comme quoi parfois il suffisait juste d'dun café froid.

» he did it for the aesthetic (demius)
» One day I'd feel it too.
» sometimes, i feel. /jake
» (compliqué) make me feel ... (00/01)
» feel good inc. (nathan)