Avery ◊ Queen of words. Queen of hearts.

« Maman ? Pourquoi Marley ne parle pas ? » Tu n’es qu’une enfant. Tu ne comprends pas tout ce qui t’entoure et parfois, tu te retrouves à poser ce genre de question qui peuvent paraître étrange ou surtout indiscrète. Mais ce n’est pas quelque chose dont tu te préoccupes Avery. Tu es de celles pour qui les réponses priment avant la décence. Parce que toi, tu ne comprends pas vraiment ce qu’il est bien de faire ou ce qui est mal. Et puis ce n’est qu’une question, tu ne demandes qu’à savoir pourquoi ton amie ne parle pas. Pourquoi ton amie ne semble pas t’entendre non plus quand tu lui parles. Le regard tourné vers ta mère, tu attends une réponse, un large sourire barrant tes lèvres. Tu lui montres par là que tu es véritablement intéressée, que tu ne fais pas semblant pour être certaine qu’elle te réponde. « Et bien… Marley est en faites sourde. Elle ne peut pas entendre ce que tu lui dis, elle peut lire sur tes lèvres peut-être, si elle a appris. Elle peut parler aussi mais comme elle ne peut pas pas s’entendre.. tu comprends ? » Tu n’es pas sûre, tu penses comprendre en tout cas. Marley ne peut juste pas t’entendre, elle ne peut pas te comprendre et c’est pour ça qu’elle donne cette impression de ne pas s’intéresser à ce que tu lui racontes. Ton esprit tourne à vive allure, tu réfléchis à une solution, à quoi faire pour la suite mais rien ne te vient dans l’immédiat. « Comment je peux faire maman pour qu’elle me comprenne ? » Maman a toujours la solution bien que tu ne sois pas toujours d’accord avec elle. C’est ça aussi les familles. « Il y a le langage des signes. Il s’agit de parler avec les mains et chaque gestes veut dire quelque chose de différent. » Tu parais surprise, tu sembles étonnée mais c’est de manière agréable. En réalité, tu vois dans l’aveu de ta mère une manière bien différent de voir les choses. Tu vois là une porte de sortie, tu vois là une nouvelle façon de communiquer et ça te plait.  « Moi aussi je veux apprendre la langue des signes, pour pouvoir parler avec Marley. »

***
Tu en as marre, tu n’y arrives pas. En apparence, ça semble facile, juste en apparence. Tes doigts te font mal, tu te mélanges dans tout ce que tu fais et ça t’énerve. Un soupir traverse tes lèvres et tu t’assois sur une chaise les jambes ramenées contre ton corps et ta tête posée sur tes genoux. Tu laisses ton regard se perdre sur les environs. Vous êtes dans un parc, le soleil brille et vous voilà assise toutes les deux sur une couverture dans l’herbe. Vous. Marley et toi. Tu lui as parlé de ta conversation avec ta mère et tu ne l’as sans doutes jamais vu autant sourire. Celui franc et sincère d’une enfant à qui on promet un meilleur avenir. « Mais comment tu retiens ça ? Je n’arrive même pas à retenir l’alphabet. » Tu prononces distinctement en la regarder pour qu’elle puisse lire sur tes lèvres. Elle a confirmé les dire de ta mère, t’a fait savoir qu’elle pouvait te comprendre et ce fut là un premier pas vers ton apprentissage de sa langue. « Tu en veux ? » Tu demandes en récupérant un bout de gâteau dans le sac et en le lui tendant. Tu sais que ça n’est pas aujourd’hui que tu vas apprendre de nouvelle chose, ce n’est pas aujourd’hui que tu sauras la comprendre. Ca viendra.

Chaussure dans une main, veste en cuire posée sur son avant bras, tu es prête à sortir. Peut-être un peu trop maquillé, c’est comme ça que tu aimes faire les choses. Tu as à peine quinze ans, tu devrais être au fond de ton lit mais ce n’est pas ainsi que fonctionne le jeu pour toi. Joueuse invétérée, avec la vie, avec les sentiments, tu es une tête brûlée qui n’a pas peur de foncer tête baissé. Et c’est ce que tu fais à cet instant. Tu fonces, tu ne réfléchis pas, ne penses qu’à toi comme à chaque fois que quelque chose en vaut la peine. C’est qu’une soirée banale en ville, une soirée comme tu en as vu plein déjà mais dès que ça emmerde tes parents, t’es la première à en profiter plus que de raison sans doutes. Tu soulèves la fenêtre, jettes un coup d’oeil en bas. Ce n’est pas la première fois que tu fais ça, ce ne sera sans doutes pas la dernière. Juste une habitude. Mais tu viens à sursauter, un bruit dans le couloir, devant la porte de ta chambre et tu te retournes brusquement pour fixer la porte déjà en train de s’ouvrir. « Oria…  » Un semble murmure qui franchit tes lèvres quand tu reconnais ta petite soeur. Tu es soulagée, tu es plus qu’heureuse en réalité que ce soit elle et pas quelqu’un d’autre. « Tu m’as fait peur, j’ai cru que c’était maman. » Et si ça avait été votre mère, on ne peut pas dire que tu aurais eu la même réaction. Elle t’aurait sans doutes reproché de n’être qu’une inconscience, de n’être qu’une ratée, une fille qui ne sait pas ce que vaut la vie et qui en gaspille chaque instant. C’est comme ça qu’elle te voit, tu en arrives à douter de son amour pour toi et pourtant, jamais tu n’as rien dit à quiconque de cela. C’est ta vie privée, ça ne regarde que toi. « Tu dois me faire une promesse Oria, tu ne dois parler de ça à personne, tu ne dois pas dire à maman que je suis sortie ce soir… je ne rentrerais pas trop tard. » Mais dans ton langage, ne pas rentrer trop tard n’a pas vraiment de sens. C’est quelque chose de vague qu’on ne saurait pas vraiment associer à quelque chose en particulier Raisonnable, tu ne l’es pas alors rentrer tôt, ce n’est pas pour toi non plus et ta cadette le sait très bien. Elle le sait mais te sourire, tu sais qu’elle fera ce qu’il faut pour te couvrir, tu sais qu’elle va t’aider, comme toi tu ferais tout pour elle.

Vivre avec quelqu’un, tu ne l’as jamais fait. Enfin, avec ta famille, ton père, ta mère et Oria. C’est bien tout. On peut pas dire que ce soit une grande expérience. Mais là, maintenant que tu es à l’Université, tu ne peux plus rester à vivre dans la maison familiale, tu ne supporterais ni l’ambiance, ni les interdits qui t’empêcheraient de faire ce que tu veux. T’as choisis une résidence universitaire sans te douter une seconde qu’il te faudrait vivre avec quelqu’un. T’étais pas trop pour, t’étais pas favorable à l’idée et tu ne t’es pas gênée pour le faire savoir à qui voulait bien t’entendre. Tu es parfois un peu trop impulsive comme fille. Tu le sais, c’est déjà un bon point de départ. Ce n’est pourtant pas pour ça que tu vas faire en sorte que les choses s’arrange. A quoi bon ? POurquoi faire ? On t’aime comme tu es. On t’aime ou on te déteste et ça, c’est un point dont tu te contrefiche royalement. La clé de l’appartement dans une main, tu viens ouvrir la porte et en voyant que ça bloque tu constates qu’on a déjà pris possession des lieux. Tu te mets à soupirer, tu aurais aimer avoir quelques instants pour toi, pour être seule ici mais il faut croire que ça ne sera pas possible, remonter le temps ne l’étant pas. Frappant quelques coups à la porte, tu finis par entrer sans attendre une quelconque autorisation. Tu es chez toi après tout, tu n’as frappé que pour signaler ta présence, rien de plus. « Bon...jour… il y a quelqu’un ? » Il y a des cartons, il y a un bordel sans nom que tu ne saurais décrire et pour le moment, pas un signe de vie. Pourtant, tu entends du bruit, tu te diriges vers la source sans un mot de plus. Tu ne sais pas vraiment ce que tu vas trouver, ni qui tu vas trouver, on ne t’a pas vraiment renseigné. La peur n’est pas quelque chose qui te ressemble, tu es plutôt méfiante, à te demande si oui ou non c’est une bonne idée. Et finalement, au détour d’une porte, tu la vois. Elle est plus jeune que toi, peut-être un ou deux sans, tu ne saurais pas dire exactement, ça se voit à peine d’ailleurs et dans le fond, ça te rassure. C’est quelqu’un avec qui tu pourras peut-être partager, quelqu’un avec qui tu pourras te trouver des points communs. « Je suis Avery. » Tu tends ta main vers elle, attendant qu’elle la serre. Elle s’appelle Beverly. Tu ne sais rien d’elle, mis à part le fait que dorénavant, tu vas partager ta vie avec elle.

Jem. Jem, c’est le prénom qui te hante. Le prénom qui t’obsède et dont tu ne sais plus te passer. Jem, la douceur sur ta langue lorsque tu le prononces devant le miroir de ta salle de bain. Jem, tu veux le rencontrer, tu veux pouvoir lui parler, le toucher et surtout qu’il te remarque. Tu veux qu’il sache que tu n’es pas une fille banale, une fille parmi les autres. Mais le plus important, tu veux qu’il connaisse ton nom et sache l’associer à ton visage. Tu sais tout de lui, tu connais sa vie en détails. Ce qu’il fait, ce qu’il aime, où il va. Tu ne manque rien, jamais. Les réseaux sociaux sont tes amis, ils sont ton monde et te permettent de ne rien manquer de lui. Obsession. C’est de ça qu’il s’agit. Une obsession parce que tu sais que que tu as raison. Lui et toi, il y a quelque chose, lui et toi, vous êtes fait pour vous rencontrer et vous connaître. Il te l’a fait savoir. Tu as posté cette photo il y a peu de temps. Une photo d’un concert de Compulsion, un hashtag bien placé et il a liké ta photo. Il sait que tu existes, tu en es certaine, tu en es persuadée maintenant et c’est tout ce que tu voulais. Allongée dans ton lit, tu déverrouilles ton téléphone pour avoir un peu de lumière. Tu es incapable de dormir. Tu ressaces encore et encore les évènements des derniers jours sans trop savoir où ils vont te mener. Tu y réfléchir beaucoup, tu n’as personne à qui en parler. Marley ? Elle a mieux à penser et à faire, tu ne veux pas la déranger et c’est pour ça que tu essayes de faire les choses à ta façon. Tu ouvres twitter, tu regardes un insta les dernières publications et finalement, c’est toi qui poste. Rien de bien pertinent, rien de bien important pour le reste du monde. Mais pour Jem, ça devrait compter, pour Jem, ça devrait avoir son importance car à cet instant, la traque commence. #compulsion