nikos ) hiding face.

La voiture s'arrête, la chaleur s'intensifie lorsque retombe le vent. Elle se sent fondre sur place dans ses vêtements trop chauds pour la saison, resserre un peu plus le sac contre elle alors que Nikos reprend la parole pour lui donner des instructions. Son regard se dirige instinctivement sur le Lion qu'elle fixe avec attention, comme pour se rappeler à quoi il ressemble, essayer de deviner ce qui l'attend de l'autre côté. Bagnole à l'arrêt, la gamine resserre son emprise sur les poignées du sac qui demeurent son unique accroche à la réalité. Ce morceau de tissu bourré d'autres morceaux de tissus reste son unique but de la semaine alors que le conducteur lui en rajoute un autre. Elle a encore du mal à y croire, ne se fait pas d'illusions. Elle sait ce que rien n'est jamais dans la poche, connaît les risques. Si l'orpheline a su garder son boulot à la bibliothèque, c'est avant tout parce qu'elle est seule, qu'aucune autorité ne fait pression sur ses épaules. Là, elle a besoin d'élargir ses horizons parce qu'elle se sent prise au piège. Si son cerveau n'analyse rien d'autre que ces livres morts elle finira par imploser. Son coeur est déjà sur le point de lâcher, elle le sait, le ressent, quelque part en elle, ne saurait pas décrire exactement cette notion qui la terrifie parfois. Déjà, sa main se pose sur la poignée de la porte sans l'ouvrir tout de suite. Sin tente d'enregistrer tant bien que mal les informations, de les imprimer dans ses pensées avant de se souvenir. Ses doigts s'exécutent alors qu'elle note sur un morceau de papier son numéro avant de lui tendre, soigneusement plié en deux. Tiens, on sait jamais. Elle ne s'avance pas sur le jour où elle viendra mais sera présente comme il le lui a demandé.

Sin termine par ouvrir la porte, juste assez pour laisser traverser un brin de vent et ressentir la chaleur étouffante de l'été contre sa peau déjà humide. Elle se tourne vers Nikos, plus compatissante qu'elle ne le voudrait, certainement parce qu'il ne lui a pas posé de questions avant de lui donner sa chance et qu'elle l'en remercie pour ça. Non, t'en fais pas. C'est déjà sympa de m'avoir ramené dans le coin. Elle quitte la voiture, passe la hanse de son sac sur son épaule et se penche à nouveau. Merci. Accompagné d'un sourire sincère, plus qu'elle  ne le voudrait. Ici, face à lui, il n'est pas question de vouloir tromper l'autre, simplement d'être suffisamment neutre pour espérer tenir ce boulot en plus de la bibliothèque.

Autour d'elle, les bruits de la ville s'éveillent et lui rappellent qu'elle est de retour dans la saleté de night falls. Tout ici lui donne la sensation d'avoir été mis en place pour respirer la violence et l'ardeur d'en vouloir aux autres. La colère dans les rues n'essaie même plus de se cacher, de poser des barrières entre le jour et la nuit. Ici, tu peux te faire casser la gueule en pleine journée comme te faire voler ton sac en rentrant du boulot le soir, lorsque le ciel d'hiver devient morne plus tôt dans la journée. N'importe quel jour la semaine prochaine. Deva en manager. Pas de période d'essai, un casier dans la réserve, tips obligatoires et perso. Récapitulatif lancé à la va-vite alors qu'elle ponctue ses mots par un bonne soirée qui caresse ses lèvres avec plus de délicatesse. La porte claque, Sin entame sa marche le long du trottoir qui la mènera à son univers vide et stérile. La chaleur du soleil sur le crâne, elle ne se retourne pas.