SOLVEIG - oiseau de nuit.

( la tête tournée vers les étoiles )
« artiste ce n'est pas un métier artiste » disait son père, et Solveig, les doigts colorés de peinture continue de peindre la toile blanche, encore et toujours. Le coeur mis à mal, quand il a décidé de lui avouer qu'il l'avait trompé. Et elle, elle n'a que ses yeux pour pleurer et sa peinture pour panser les plaies. Parce que Solveig elle est comme ça, un peu bancale depuis la naissance, un mariage à dix-huit ans, un homme bien plus vieux qu'elle, elle n'a jamais bien compris comment il a fait pour la trouver jolie, elle qui ne se trouvait pas belle, elle qui se cachait sous des affaires trop grandes, trop larges. Puis un divorce quatre ans plus tard, parce qu'elle avait été infidèle, mademoiselle qui aime sans attendre, mademoiselle qui aime sans compter. Infidèle. Des études à Harvard, l'art et la littérature, parce qu'elle voulait être journaliste, parce qu'elle voulait dénoncer l'atrocité du monde, journaliste, reporter, elle voulait montrer sa voix, dire ce qu'elle pensait. Diplôme décroché haut la main. Puis l'amour lui est tombé dessus encore, il était plus vieux, encore. Professeur même. C'était étrange cette sensation qui lui prenait le coeur, qui lui prenait le corps quand il était dans les parages, mademoiselle intrépide. Elle l'a aimé, elle l'aime toujours d'ailleurs. Profondément, sincèrement. Puis son père qui interfère, encore, toujours. La haine crachée au visage, les mots qui dépassent la pensée « je te hais, j'aimerais que tu crèves. » qu'elle lui a dit un jour, parce qu'il a osé venir chez elle pour lui dire qu'il ferait tout pour que leur relation ne marche pas, allant jusqu'à payer un type pour qu'il le supprime. Solveig elle a tiré un trait sur sa famille ce jour-là, ses frères qui n'étaient là que pour l'héritage de Maman, décédée d'un arrêt cardiaque un peu avant Noël, Maman qui est partie parmi les étoiles, son père, banquier véreux qui ne voit que la réussite. Et Solveig, elle a de la peinture sur les mains, parce que c'est ce qu'elle aime faire, peindre, créer dans l'atelier qui jouxte la galerie. Toujours un peu rêveuse, elle peint, a abandonné son métier de journaliste, pour devenir artiste à plein temps. olveig elle l'aime toujours autant, comme au premier jour, ce professeur qui a prit son coeur, qui a capturé son âme pour en faire quelque chose de beau, elle qui avait voulu partir, après leur séparation, elle se doutait qu'ils allaient se retrouver et même si la vie est compliquée même si elle est encore sous anxiolytiques, parce qu'il n'y a que comme ça qu'elle peut sourire, et vivre sans avoir peur des insomnies, elle l'aime. Sans attendre, sans artifices, elle l'aime. Et elle aime le fait d'être la maman par procuration de cette petite blondinette qui fait vivre la maison de ses éclats de rires. Alors peut-être qu'artiste, ce n'est pas un métier, mais Solveig, elle n'a jamais été aussi vivante que depuis qu'elle est libre.